Le «fils de Diekirch» s’accorde au rythme de ses envies
C’est au cœur de la Cité des Ânes, plus connue sous le nom de Diekirch, que grandit l’actuel ministre de la Sécurité sociale et de l’Agriculture, de la Viticulture et du Développement rural. Sa jeunesse est partagée entre sa passion pour le sport et son intérêt pour les sciences économiques et sociales. Mais le désir de s’investir pour sa ville gagne toujours plus de place dans son esprit. Claude Haagen se met alors à son service en passant par les fonctions de conseiller communal, d’échevin et de bourgmestre. Il prolonge ensuite sa carrière en devenant député et finalement ministre. Retour sur le parcours de celui que d’aucuns surnomment «le fils du pays».
Un sportif dans l’âme… diekirchoise
Claude Haagen naît en 1962 dans la capitale et grandit à Diekirch, ville à laquelle il demeure encore aujourd’hui très attaché. Son père travaille à Luxembourg-Ville en tant qu’agent immobilier et sa mère reste au foyer pour s’occuper de lui et de ses trois frères. Comme pour bon nombre d’enfants de sa génération, les rues deviennent le terrain de jeux favori de la fratrie. «Dans les années 1960-1970, les smartphones, les ordinateurs ou les consoles de salon n’existaient pas encore. Rester chez nous rimait avec ennui. Alors, mes frères et moi profitions de ce que nous avions à disposition dehors. La plupart du temps, nous jouions au football avec nos voisins. Nous aimions aussi profiter des plaisirs de la nature en nous baladant dans les bois alentours. Même en hiver nous arrivions à exploiter tous les avantages que cette saison nous offrait», se rappelle l’actuel ministre de la Sécurité sociale.
Il suit la majeure partie de sa scolarité dans sa ville natale, d’abord à l’école fondamentale, puis au Lycée classique de Diekirch (LCD). Il se souvient qu’il était un élève «débrouillard» comme il le dit lui-même, un sourire aux coins des lèvres et un éclat de malice dans les yeux.
En parallèle, il se trouve une passion pour le sport. «J’ai d’abord découvert le basket auquel je me suis adonné jusqu’à l’âge de quatorze ans. Par la suite, je me suis essayé au handball dans le club local et je peux déclarer sans rougir que j’avais du talent! Notre équipe a d’ailleurs gagné le championnat du Luxembourg en 1993. J’ai pratiqué ce sport pendant une quinzaine d’années, jusqu’au moment où j’ai décidé de me consacrer à d’autres projets», explique Claude Haagen.
L’instinct pour guide
À la fin de ses études secondaires, et sans l’avoir véritablement prévu, il décide d’étudier les sciences économiques et sociales, qui étaient déjà son option au lycée. Il part alors deux années à Nancy et deux autres à Strasbourg. «Malgré mon intérêt pour ce que j’étudiais, je dois avouer que je n’étais pas un étudiant modèle. J’étais un peu à part et je n’avais pas énormément de copains. Je pense que mon identité luxembourgeoise contrastait un peu trop avec la mentalité française. Mais ces années m’ont permis de découvrir une nouvelle culture et d’apprendre de cette dernière», avoue le fils de Diekirch.
Je suis un homme spontané qui écoute ses envies du moment sans trop s’interroger sur l’avenir
Son diplôme en poche, Claude Haagen se lance dans une carrière de professeur de sciences économiques et sociales au Lycée technique d’Ettelbruck (LTETT). «Si vous aviez dit à l’adolescent que j’étais que j’allais devenir professeur, il ne vous aurait sans doute pas cru. C’est une carrière que je n’avais jamais envisagée… En vérité, je n’étais pas du genre à prévoir et ne le suis toujours pas, d’ailleurs. Je suis un homme spontané qui écoute ses envies du moment sans trop s’interroger sur l’avenir. Je pars du principe que ce qui est bon aujourd’hui ne le sera peut-être plus dans dix ans, alors je fais des choix pour l’instant présent et je m’adapte par la suite», précise le ministre de l’Agriculture. «J’ai profondément aimé enseigner! Si cela n’avait pas été le cas, j’aurais rapidement quitté la profession. J’étais en contact constant avec les adolescents et, inévitablement, cela influençait ma manière de voir le monde. Ils me permettaient de garder un esprit jeune, de les comprendre, et cela me plaisait beaucoup».
Les débuts en politique
Claude Haagen commence à s’intéresser à la politique à la fin de ses études universitaires, mais c’est en 1993 qu’il décide de se lancer en intégrant le Parti ouvrier socialiste luxembourgeois (LSAP) – le seul dont les valeurs lui parlaient véritablement – et en se présentant aux élections communales à Diekirch l’année suivante. Grâce à sa popularité locale, il intègre le conseil. «Mon parti voulait que je devienne échevin, mais il me semblait que c’était en quelque sorte mettre la charrue avant les bœufs. Je voulais d’abord être conseiller communal afin de préparer mes premières armes. Il me semblait nécessaire d’apprendre le métier petit à petit, surtout en politique. Il faut comprendre comment marche le système avant de vouloir se prononcer dessus, qu’il nous convienne ou non. C’est selon moi la manière la plus saine d’évoluer dans ce monde», explique Claude Haagen.
Il devient bourgmestre de sa ville natale pour la première fois en 2001. Cependant, il ne se fait pas que des amis en adoptant quelques fois une attitude véhémente envers ses opposants politiques. Ces derniers forment alors une coalition aux élections de 2005, empêchant ainsi la réélection de celui qui deviendra président de son parti. Mais la revanche arrive en 2011: le LSAP obtient une large majorité et le Diekirchois d’origine retrouve alors ses fonctions de bourgmestre.
Il faut comprendre comment marche le système avant de vouloir se prononcer dessus, qu’il nous convienne ou non
En 2009, son ami et collègue Romain Schneider est nommé au poste de ministre et il en profite alors pour le remplacer en tant que député. «J’ai appliqué la même logique qu’à mon entrée en politique: observer avant d’impacter. En outre, en intégrant la Chambre, j’avais cette volonté forte de représenter le Nord!», relate Claude Haagen. Il est réélu en 2013 et, au départ de Romain Schneider, une nouvelle opportunité s’offre à lui. «Quand mon ami a décidé de quitter le monde de la politique et de se démettre de ses fonctions, il paraissait logique que ce soit un autre représentant de notre région qui lui succède. Je l’ai donc remplacé, et si aujourd’hui je me dévoue surtout à l’agriculture, la viticulture, au développement rural et à la sécurité sociale, j’ai toujours à cœur de représenter ma circonscription au sein du gouvernement», confie le ministre. Et pour ne rien gâcher, le développement rural lui permet de renouer avec ses débuts en tant que responsable communal. «Ce portefeuille est selon moi essentiel dans un petit pays comme le Luxembourg. Il faut pouvoir aider toutes les communes, quels que soient leur taille et leurs moyens, afin que la cohésion sociale gagne toujours plus de terrain. Avec cette dernière, de nouveaux projets peuvent voir le jour, notamment dans les domaines de la culture et du sport. Ce dernier est très important, surtout pour les jeunes! Je veux pouvoir donner à chacun d’eux la chance de disposer d’infrastructures permettant la pratique d’une activité sportive. D’ailleurs, dans ce cadre, la sécurité sociale peut être d’une grande aide: elle apporte un soutien aux plus démunis qui peuvent ainsi offrir une activité extrascolaire à leurs enfants», expose Claude Haagen.
Ces 30 dernières années, celui qui était un sportif prometteur a su évoluer et forger ses armes dans le monde politique. S’il n’avait pas anticipé cette carrière, il est aujourd’hui plutôt fier de ce qu’il a accompli et souhaite garder un esprit ouvert pour la suite. «Je n’ai pas toujours été exemplaire dans mon parcours professionnel. Comme tout le monde, j’ai fait des erreurs. Malgré cela, je ne veux pas vivre dans les regrets. De toute façon, nous ne pouvons pas changer le passé, alors autant en tirer des leçons et continuer à avancer en étant plus riche de connaissances. Selon moi, le pire est de rester passif. Je conseillerais d’ailleurs aux jeunes générations d’agir et de prendre des décisions. Elles ne seront pas bonnes à chaque fois, mais elles nous transmettent toujours de précieux enseignements», conclut le ministre.
Par Pauline Paquet