L’air ou l’art du bien-être

La santé et le bien-être de l’humain sont caractérisés par de nombreux facteurs: l’alimentation, la pollution, le mode de vie ou encore son environnement. A l’intérieur des bâtiments se joue une partition invisible mais ô combien cruciale pour le bien-être des occupants: celle de la qualité de l’air. Eric Wagner et Dirk Nienhaus, respectivement responsable du secteur Air et responsable du secteur Environnement/Amiante chez Luxcontrol nous livrent davantage d’explications.

  

En quoi la qualité de l’air ambiant dans un bâtiment joue-t-elle un rôle dans le bien-être de l’utilisateur?

EW: Le bien-être dans un bâtiment est d’abord intimement lié aux deux facteurs: ressenti et santé. Pour se sentir bien dans un bâtiment, il faut que celui-ci soit sain envers ses occupants. Et la qualité de l’air intérieur joue un rôle important puisque de nombreuses personnes passent près de 80% de leur temps dans ces lieux fermés. Depuis les années 1970 après le premier choc pétrolier, afin de faire des économies d’énergie, les habitations et immeubles tertiaires ont commencé à être de plus en plus étanches. Ceci s’est amplifié au fil du temps avec des règlementations thermiques de plus en plus contraignantes et l’apparition des maisons passives puis des maisons à énergie positive.

Cette étanchéification a fait que les polluants présents à l’intérieur des lieux de vie ont eu tendance à y rester et à s’y accumuler et donc à s’amplifier puisque «pris au piège» des espaces clos – contrairement aux anciennes constructions qui véhiculaient l’air naturellement.

Nous constatons effectivement dans nos interventions de plus en plus de demandes liées à des problématiques de gêne et de désagréments et une qualité de l’air intérieur mesurée affectée par de nombreux polluants.

DN : Il peut s’agir de pollutions physiques (poussières, amiante, champs électromagnétiques,…), de pollutions chimiques (monoxyde de carbone, composés organiques volatiles,…) ou de pollutions biologiques (moisissures, bactéries, insectes,…). Des études menées sur l’impact de ces substances dans l’air ont identifié et qualifié ce phénomène comme le syndrome du bâtiment malsain (SBS). Il peut se traduire par l’atteinte des voies respiratoires (irritations, toux, asthme), des yeux et de la bouche (picotement, irritation…) et même des maux de tête, vertiges ou nausées.

Ces émanations proviennent de multiples sources et principalement des matériaux utilisés, des revêtements, des peintures comme également du mobilier selon sa constitution.

 

Comment intervenir pour ne plus avoir ou éviter ces désagréments et ce syndrome du bâtiment malsain?

EW : Nous intervenons pour analyser les paramètres et solutionner les problématiques rencontrées. Certains remèdes sont relativement simples à mettre en place, comme une augmentation de l’aération, de la ventilation, le remplacement de mobiliers. Mais il est vrai que d’autres sont plus compliqués à réaliser car très difficile techniquement à mettre en œuvre ou extrêmement onéreux (remplacement de matériaux sur de grandes surfaces, encapsulage,…).

DN : La meilleure solution pour éviter que les polluants ne s’accumulent dans l’air intérieur est de les bannir au maximum à la source et de construire sain. Ceci rentre également dans le concept de la construction durable qui prend en compte le bien-être des occupants.

Par une évaluation et un bon choix des matériaux, les bâtiments construits ou réhabilités peuvent être conçus en assurant aux occupants un environnement sain avec une qualité de l’air intérieur indéniable.

 

Quelle est l’expertise de Luxcontrol dans l’évaluation des matériaux de construction?

DN : Luxcontrol intervient en amont pour aider les acteurs de la construction à choisir les bons produits pour garantir une construction ou une transformation saine qui n’aura pas d’effet néfaste sur la santé de ses occupants. Nous proposons une évaluation des matériaux ou pré-étude visant à évaluer l’impact de l’ensemble des matériaux qu’il est prévu d’utiliser. Nous nous appuyons sur les fiches de données produits, les fiches techniques et les labellisations existantes. En analysant de près la liste des substances présentes et en interprétant les différentes données techniques et analytiques, nous pouvons avoir une idée assez précise de l’impact que peut avoir chacun des matériaux sur la qualité de l’air intérieur.

EW : Au fil du temps et de notre expérience, nous avons développé une base de données reprenant des centaines de produits que nous avons référencés et classés selon leurs émissions dans l’air intérieur. Pour ces données récoltées depuis plus de cinq ans, nous utilisons trois catégories: verte pour les vertueux, rouge pour les bannis et orange pour ceux qui peuvent être utilisés sous certaines conditions.

Afin de confirmer le choix des matériaux, une vérification peut être faite par des mesures dans une pièce test. Ceci est en particulier intéressant pour des objets d’envergure plus importante où la même combinaison de matériaux sera répliquée sur plusieurs ensembles.

 

Les architectes ou les promoteurs sont-ils sensibles à vos recommandations?

EW : Nous avons déjà réalisé de nombreux projets notamment dans le secteur public. Les avantages de cette pré-étude d’évaluation des matériaux sont indéniables. Mieux vaut anticiper que de devoir remédier à des problèmes et surcouts liés à des pollutions. Pour comparaison, pour un bâtiment livré ayant fait l’objet d’une évaluation préalable des matériaux, on trouvera moins d’une dizaine de substances polluantes. Ce chiffre peut grimper jusqu’à 150 dans un bâtiment qui n’aurait pas fait l’objet d’un choix judicieux des matériaux.

DN: Il n’existe actuellement pas de réglementation en vigueur traitant de cette problématique. La volonté de réaliser cette démarche d’évaluation préalable des matériaux émane donc directement du promoteur ou du maître d’œuvre. Elle se voit ainsi imposée dans son cahier des charges, dans les bureaux d’études, auprès des architectes. De cette façon, toutes les sociétés intervenantes sont amenées à jouer le jeu.

Même si dans le secteur privé, on est parfois confronté à l’adage «on a toujours construit de cette manière, à quoi bon changer ?», la tendance est positive. Les architectes sont par exemple beaucoup plus à l’écoute. Certaines certifications prennent aujourd’hui en compte la qualité de l’air comme le BREEAM (Building Research Establishment Environmental Assessment Method) ou le DGNB (Deutsche Gesellschaft für Nachhaltiges Bauen). Cela prouve que ce paramètre s’inscrit progressivement dans les éléments essentiels liés au bien-être à l’intérieur d’un bâtiment.

 

 

1 Avenue des Terres-Rouges

L-4330 Esch-sur-Alzette, Luxembourg

 

Lire sur le même sujet: