Accompagner la revalorisation des friches industrielles

La crise du logement que connait le Luxembourg est notamment liée au manque de terrains constructibles. L’extension urbaine peut pourtant passer par la réutilisation des friches industrielles, souvent situées en centre-ville et à proximité d’un cours d’eau, autrefois nécessaire aux activités industrielles qu’elles abritaient. Dr Patrick Charbonnier, directeur technique en charge du service environnement & laboratoire de Luxcontrol, passe en revue les étapes nécessaires à l’assainissement de ces friches et nous parle de l’expertise de l’entreprise dans ce domaine.

 

Comment déterminez-vous le degré de contamination de friches industrielles?

Le sol est un milieu hétérogène et même avec la maille la plus réduite possible, nous pourrions passer à côté d’une pollution. La première étape est donc de réaliser une étude historique du terrain pour déterminer s’il a été le lieu d’activités potentiellement polluantes, leur nature et leur localisation. Nous pourrons ainsi cibler les zones où il peut y avoir eu de la pollution et établir un plan de sondages ou de forages. Ce service peut être utile au dernier exploitant d’un site, qui est tenu de soumettre ce plan à l’Administration de l’environnement dans le cadre d’une cessation d’activité au Luxembourg.

Une fois validé, nous mettons en place une campagne de sondages et de forages pour prélever des échantillons de dalles de surface, des sols et sous-sols, des eaux souterraines, des matériaux du bâti, d’air emprisonné dans le sol, d’eau de la rivière avoisinante, … Nous avons la chance d’avoir en interne un laboratoire dédié à l’environnement grâce auquel nous procédons dans les meilleurs délais à ces analyses.

 

Qu’impose la loi en matière d’assainissement?

Au Luxembourg, la réglementation liée à l’environnement détermine des valeurs seuils définissant la pollution d’un sol ou d’eau. En 2017, le gouvernement a adopté l’avant-projet de loi SOL dont l’approche orientée sur les risques détermine les seuils limites de pollution en fonction de l’usage futur qu’il sera fait d’un terrain. Nous avons dans ce cadre intégré un groupe de travail devant aider à la validation de cette méthode nationale en la mettant en application sur un site test.

Avec la méthode actuelle, de grands volumes de terre sont excavés en vue de la dépollution, or il n’existe pas de centres spécialisés luxembourgeois pour les traiter et ils sont donc envoyés dans les pays voisins à cet effet. Pour réduire cet impact environnemental dû au transport, la nouvelle approche valorise des techniques alternatives pouvant traiter la pollution et rendre l’état du sous-sol tout à fait compatible avec la construction de logements.

 

Concrètement, quelle méthode appliquez-vous aujourd’hui pour procéder à l’assainissement de friches industrielles?

Une fois le degré de pollution et l’usage futur déterminés, nous mettons en place un concept de déconstruction et un concept d’assainissement. Lorsque nous avons aidé nos clients à obtenir une validation de ces plans et un permis de démolir auprès de l’Administration, nous intervenons ensuite dans le suivi des déconstructions pour définir les filières de revalorisation et de recyclage des matériaux. Nous proposons par exemple la mise en place d’une base de données reprenant l’usage qui peut être fait des différents matériaux récupérés que ce soit sur le site même ou dans un autre projet. Nos concepts de déconstruction veillent à proposer la réutilisation directe sur le site des débris prétraités provenant du chantier afin de limiter l’apport de matériaux extérieurs. Pour ce qui est de la réutilisation de terre excavée, nous tentons de tracer ses mouvements depuis sa maille d’origine jusqu’à sa localisation finale.

Concernant le concept d’assainissement, nous excavons, remplissons des camions et les envoyons en centres de traitement. Avec la nouvelle réglementation, nous pourrions travailler avec des techniques novatrices in situ. Le sol resterait donc en place et nous utiliserions une trentaine de techniques existantes comme le venting, le stripping ou le lessivage pour le traiter. Le choix de la technique varierait en fonction de différents critères comme la perméabilité du sol, le type de polluant, la profondeur à traiter,… Notre équipe dédiée à la dépollution des sols compte une dizaine de personnes rassemblant une expérience à l’étranger dans ce domaine.

 

Vérifiez-vous la qualité du traitement par la suite?

Les travaux d’assainissement sont suivis par un organisme agréé comme le nôtre pour vérifier qu’ils sont menés correctement et jusqu’au seuil réglementaire. A la fin du processus, une certification est remise par un second organisme agréé afin de garantir que les teneurs résiduelles sont conformes à la loi. Avec la nouvelle réglementation basée sur les risques, l’organisme agréé pourra vérifier que les seuils obtenus sont bien compatibles avec l’usage qui sera fait du site.

Nous accompagnons par ailleurs l’Administration des bâtiments publics lorsqu’elle souhaite vérifier que les matériaux utilisés dans la construction d’un bâtiment public sont compatibles avec son usage futur. Nous avons donc créé une base de données recensant dans quelles conditions un produit peut être utilisé; nous pouvons donc aiguiller les architectes dans leurs choix et également vérifier la qualité de l’air dans le bâtiment neuf au moment de sa réception.

 

Quels sont les avantages de vos services?

Nous intervenons à tout moment de la chaîne d’assainissement d’un terrain. Que ce soit pour déterminer le degré de contamination par le biais d’analyses, établir des concepts de déconstruction et d’assainissement, réaliser des suivis de chantiers ou encore vérifier en fin de chaîne que les seuils de pollution ont bien été respectés. Nous fournissons ainsi aux clients les éléments nécessaires à l’établissement d’un certificat de bonne application des obligations.

En tant qu’organisme agréé, nous pouvons vérifier la qualité des interventions pour le compte de l’Administration ou être mandaté par un exploitant dans le cadre d’une cessation d’activité. Nous recommandons toutefois de nous contacter le plus tôt possible en amont du projet afin que nous puissions proposer une stratégie de réhabilitation originale et optimisée.

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