Retour aux origines d’un parcours

Originaire de Malmédy en Belgique, Stéphane Pallage a grandi non loin d’un Luxembourg qu’il a quitté pendant 27 ans. De retour dans cette région, il s’est dit impressionné par les changements qui ont façonné son nouveau visage. Empressé de voir évoluer la jeune Université du Luxembourg dont il est depuis janvier dernier le recteur, il nous a laissé apercevoir, le temps d’une rencontre, les coulisses de son parcours, de ses expériences passées et de ses ambitions. Portrait.

 

Les prémices d’une passion

La soif de savoir et le goût du voyage auront certainement marqué le parcours de Stéphane Pallage, et ce, dès l’enfance. Petit, il avait déjà beaucoup d’admiration pour le métier de sa mère, professeur de biologie et de chimie, «C’est un métier difficile mais quand on a un bon professeur, on le sait tout de suite, et cela peut changer des vies», nous dit-il.

A l’école secondaire, à une époque où choisir une option ne signifiait pas renoncer à d’autres matières, il s’était constitué un horaire très dense privilégiant les sciences et les mathématiques. Il passait alors son peu de temps libre à jouer les pièces de théâtre qu’il écrivait avec une petite troupe d’étudiants constituée avec ses camarades de classe. Cette activité le suivra dans sa vie d’adulte où, expatrié en Amérique du Nord, il trouvera dans l’écriture en langue française un refuge culturel.

Plus tard, à 17 ans, il part vivre un mois en Virginie dans le cadre d’un échange et en revient d’autant plus fasciné par l’Amérique du Nord et animé d’un besoin de voyage et de découvertes, tant et si bien qu’il se fixe pour objectif de faire carrière dans un domaine qui lui permettrait, entre autres, de voir le monde et de s’imprégner de lui.

 

Sur les bancs de l’école

Alors qu’il était sur le point d’entamer des études d’ingénierie, Stéphane Pallage décide contre toute attente de réaliser une licence en administration des affaires à l’Université de Liège, persuadé que cette voie lui permettrait de voyager davantage. Son directeur de mémoire, Albert Minguet, joue un rôle crucial dans son parcours universitaire en le poussant à rédiger un article qui débouchera sur une publication dans une revue scientifique et ensuite sur une bourse lui permettant de poursuivre ses études aux Etats-Unis.

Sans le savoir, Stéphane Pallage quitte le pays pour une durée de 27 ans. Si son intention première était de réaliser ses master et doctorat en finance, il rencontre à Pittsburgh les professeurs José-Victor Rios-Rull et Finn Kydland qui bouleversent sa vision: «Je désirais faire un doctorat en finance, mais en travaillant avec ces deux chercheurs, j’ai aimé l’économie au point de vouloir en faire ma carrière».

 

Là où le fleuve se rétrécit

Malgré l’accent chantant si caractéristique des Québécois, leur sens de l’accueil si chaleureux tranchant avec la dureté des hivers et l’identité culturelle forte et unique imprégnant la région, le voyageur prend conscience, au détour des rues parfaitement quadrillées de Montréal et des immeubles si hauts qu’on croirait qu’ils grattent le ciel, d’être en Amérique du Nord. Pourtant, la qualité de vie s’en dégageant rappelle l’Europe et c’est ce savant mélange qui a séduit le chercheur.

Au cours des 22 années qu’il a passées dans la métropole québécoise, Stéphane Pallage a gravi, sans trop y prétendre pourtant, les échelons de l’administration de l’Ecole des Sciences de la Gestion (ESG) de l’Université du Québec jusqu’à en devenir le doyen. Encadrant 15.000 étudiants inscrits à toutes les disciplines relatives à la gestion au sens large, son ambition était alors de construire un plan de développement pour l’Ecole et d’ensuite le matérialiser. Objectif pour le moins similaire à celui qui lui a récemment été confié à l’Université du Luxembourg…

 

Retour à l’envoyeur

Peu dépaysé par l’environnement industriel du campus de Belval – lui rappelant dans une certaine mesure ceux de Liège et Pittsburgh – Stéphane Pallage a accédé au poste de recteur de l’Université du Luxembourg en janvier dernier.

«Quand je suis parti, l’Université, le MUDAM, la Philharmonie et le quartier des affaires du Kirchberg n’existaient pas!», se souvient-il, impressionné par ce rapide développement. Et de rajouter: «Il y a 15 ans le gouvernement a décidé de créer une Université. C’est une décision qui a demandé beaucoup de courage politique, de persévérance et d’investissements», dit-il, admiratif.

J’ai aimé l’économie au point de vouloir en faire ma carrière

Aujourd’hui, le potentiel de cette jeune structure ne demande qu’à être exploité et son nouveau recteur se sent prêt à relever le défi: «Je pense pouvoir apporter beaucoup d’enthousiasme et une vision d’avenir: celle d’une Université excellente à tous les niveaux, reconnue partout dans le monde, y compris au Luxembourg». Pour ce faire, Stéphane Pallage est parti à la rencontre des communautés universitaire, économique, industrielle et politique luxembourgeoises. A la rentrée, il entend visiter les écoles secondaires du pays et des régions frontalières afin de mieux cerner les attentes des lycéens.

 

«L’avenir est radieux»

Le plan quadriennal dont s’est doté l’Université comprend huit domaines d’investissement prioritaires. Pour le recteur, l’accent devra impérativement être mis sur l’interdisciplinarité et la transversalité, surtout en matière de recherche. Parmi les défis en perspective, Stéphane Pallage a à cœur de renforcer la diversité parmi les membres du personnel de l’Université. «J’estime que l’Université est un reflet de la société et que l’on devrait y retrouver un équilibre en termes de représentativité. Nous allons nous doter d’une politique du genre pour opérer un changement à ce niveau», évoque-t-il.

Par ailleurs, la digitalisation en marche à tous les niveaux de la société n’épargne pas l’enseignement et les sciences de l’éducation et le recteur y voit une opportunité: «Nous pouvons bénéficier des apports de la technologie, surtout dans certaines matières où les images et vidéos apportent une véritable plus-value», souligne-t-il. L’Université travaille d’ailleurs actuellement sur un concept de programme hybride comprenant à la fois des cours magistraux dispensés par un professeur, des cours en classe sans professeur ainsi que des cours en ligne.

Selon le recteur, l’Université a trois missions: l’enseignement supérieur, la recherche et le service à la société. Dans le cadre de cette dernière, l’Université a créé un pré-incubateur: «L’Incubator s’adresse à la communauté universitaire au sens large et les entrepreneurs qui en sortent avec un plan d’affaire sont d’excellents candidats pour les autres incubateurs de la Place!», nous explique-t-il.

Enthousiaste à l’idée des défis qui l’attendent, il conclut: «Notre Université possède un caractère propre et une jeunesse qui lui permet de rêver. L’avenir est radieux car tout est encore possible! Quand on a 15 ans, on peut aspirer à tout…».

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