La recherche au service de la société

En tant qu’institut de recherche public sous la tutelle du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, la mission du Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER) est de produire progrès scientifique, innovation sociale et recommandations concrètes pour des politiques en matières économiques et sociales plus adaptées et plus performantes par rapport aux besoins changeants de la société; une démarche nécessitant un dialogue continu avec la société et ses différents acteurs. Professeur Aline Muller, directeur général du LISER, revient avec nous sur la vocation, la stratégie et l’avenir de l’institut.

 

Quel est le plan stratégique du LISER pour produire une recherche de qualité?

Pour répondre aux défis sociétaux, le LISER déploie sa force de recherche selon trois axes.
Le premier vise à articuler nos expertises disciplinaires avec notre capacité à exploiter l’interdisciplinaire. L’interdisciplinaire naît du croisement des perspectives pour faire émerger par synergie de nouveaux savoirs, des apports scientifiques et sociétaux toujours plus innovants. Pour y parvenir, nous renforçons en continu notre savoir-faire au sein de nos départements de recherche (Conditions de Vie, Mobilité et Développement Urbain et Marché du Travail) tout en promouvant et stimulant, tant sur le fond qu’au niveau organisationnel, toutes les interactions inter et transdisciplinaires.

Le deuxième axe repose sur le croisement des données captées de manière objective (via des capteurs géo-localisés ou portés par l’homme) avec les données nous permettant d’appréhender la perception des hommes et femmes, tant par rapport à l‘évolution de leur environnement que par rapport à leur évolution au sein de cet environnement changeant. Les enquêtes que nous menons auprès de nos concitoyens nous permettent d’extraire ces perceptions et constituent une clé irremplaçable pour comprendre l’évolution de nos sociétés.

Le troisième axe vise à comprendre le fonctionnement de la prise de décision des acteurs dans cet échiquier. Nous touchons ici aux sciences comportementales – sciences qui visent à appréhender comment les personnes prennent leurs décisions en fonction de leur environnement objectif, de leurs perceptions de et dans cet environnement et en fonction d’autres facteurs moins explorés mais néanmoins déterminants dans la prise de décision comme par exemple le sentiment ou l’envie d’appartenance à un groupe.

Au final, toute cette démarche requiert une infrastructure technique importante pour pouvoir travailler simultanément et en synergie sur ces trois axes tout en exploitant l’énorme flux de données objectives et subjectives en résultant. C’est passionnant!

 

Tendons-nous vers une «data driven society»?

Une «data driven economy» tend à utiliser de façon optimale l’ensemble de l’information produite par la société pour en extraire un développement sociétal optimal. Pour tendre vers ce développement sociétal, il faut que la société ait la volonté et les moyens d’optimiser son utilisation de l’ensemble de l’information qu’elle produit et qui l’entoure.

De notre point de vue, il est primordial et imprescriptible que l’ensemble de la recherche visant à développer cette «data driven society» se réalise dans le plus strict et rigoureux respect de la vie privée des personnes. Les investissements que nous avons consentis pour être en totale conformité au Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) sont importants certes, mais ils sont le garant de la légitimité et de l’avenir de notre recherche.

Cela ne doit néanmoins pas occulter le fait que la collecte de données au niveau de notre société requiert infrastructures, investissements et volonté. Il est absolument nécessaire que tous les acteurs sociétaux et de la recherche se donnent les moyens de créer un cadre dans lequel notre «data driven society», à laquelle nous aspirons, puisse être techniquement et institutionnellement réalisable à Luxembourg.

 

Quel rôle joue le LISER dans le transfert de savoir?

Le LISER ne se positionne pas uniquement en termes de transfert de connaissance vers la société, mais s’ancre plus fondamentalement dans une démarche de «co-création» de l’innovation sociale et du progrès scientifique, et ce, en étroite collaboration avec les acteurs sociétaux.

Pour ce faire, nous entreprenons toute une série d’initiatives visant à élargir le spectre des acteurs sociétaux avec lesquels nous interagissons (décideurs politiques, secteur privé, société civile, …). Notre cycle de cafés-débats en est un bel exemple. Ces débats ouverts au grand public nous permettent de décrypter les défis sociétaux avec les acteurs vivant ces défis au quotidien. Ils sont un berceau d’informations et d’initiatives très riche pour nos chercheurs qui glanent là des informations et collaborations précieuses à travers un dialogue réel et concret portant sur le vécu et le terrain.

 

Comment mettez-vous à jour les compétences de vos collaborateurs?

Les chercheurs sont notre ressource la plus précieuse. Leur passion, leur savoir-faire, leur curiosité inlassable et leur intégrité sont nos plus précieux actifs et atouts – voilà pourquoi nous nous sommes engagés à continuellement développer leurs carrières dans un secteur (de la recherche) qui ne cesse d’évoluer et de plus en plus vite. Au LISER, par la construction d’une vision commune, nous fédérons nos équipes dans le plus profond respect de chacun, et de chacun des projets de vie individuels qui nous compose.

En recherche, nous sommes des organisations en apprentissage et en autoréflexion continuels. Pour mieux servir notre société et nos concitoyens, nous nous devons d’être toujours meilleurs, à la pointe du progrès. Cela passe par un investissement continu dans l’amélioration de nos compétences tout en assurant une allocation de nos ressources humaines, infrastructurelles et financières optimale – n’oublions pas que nous travaillons en grande partie grâce aux deniers publics.

Au LISER nous avons créé le poste de «Talent and performance Manager», occupé par Ulrike Kohl. Il a pour vocation de nous aider à devenir toujours plus performants pour la société et pour le secteur de la recherche, tout en optimisant l’évolution de carrière de chacun de nos talents. Il guide la mise en œuvre de notre ambitieux plan de développement des compétences tout en assurant l’alignement avec notre projet institutionnel au sein de la société.

 

Quels sont les prochains grands développements de vos activités?

La compétition au sein du secteur de la recherche devient toujours plus rude. Il faut donc armer notre institut et chacun de nos chercheurs. Comme je viens de le décrire, nous avons établi un plan de renforcement de nos ressources humaines significatif et audacieux. Nous préparons notre institut à la révolution des e-social sciences tout en investissant dans un renforcement technique infrastructurel pour traiter les flux colossaux d’informations digitales. Au niveau organisationnel aussi, nous nous sommes réorganisés pour mieux répondre à notre mission.

A ce titre, l’évaluation commanditée par notre ministère de tutelle constitue pour nous une opportunité unique d’autoanalyse, mais aussi de réflexion commune et d’échanges sur la manière dont nous opérons et dont nous nous développons. Nous sommes convaincus qu’à travers ce processus, notre alignement avec nos missions ne pourra que se renforcer, et ce, pour le bien de notre performance et de l’impact que nous sommes en devoir de produire pour notre société.

Lire sur le même sujet: