Les matières ingénieuses

Schroeder & Associés

Les activités d’ingénieurs-conseils en génie civil se traduisent dans les quatre domaines fondamentaux que sont l’ingénierie, les  structures,  les infrastructures et les services. Fondé en 1961 et membre de l’OAI, le bureau d’études Schroeder & Associés compte près de 300 collaborateurs, dont plus de la moitié est composée d’ingénieurs. Rencontre avec Robert Jeworowski, Marc Feider et Antoine Pesch, responsables  des départements Structures.

Quelles sont les dernières grandes évolutions de votre métier?

MF: Contrairement aux années d’après-guerre durant lesquelles les bâtiments sortaient de terre avec une vision de démantèlement sur à peu près 30 ans, les constructions d’aujourd’hui doivent  désormais être pensées dans une dimension durable, avec des cycles d’utilisation beaucoup plus longs.
Par conséquent, les ingénieurs ne doivent plus uniquement se pencher sur les problématiques intrinsèques à la structure  des bâtiments mais doivent aussi prendre en compte leur rénovation et leur démantèlement. Je prends pour exemple nos bâtiments publics, qui pour la grande majorité tendent aujourd’hui vers des rénovations voire même de nouvelle affectations. Il faut pour ce faire, comprendre les logiques dans lesquelles ces immeubles ont été conçus afin de minimiser la production des déchets et promouvoir l’utilisation de matériaux durables.

RJ: Il fut un temps où l’entrepreneur se référait uniquement à l’architecte afin d’élaborer son projet… Ce temps est révolu et l’ingénieur doit y apporter des réponses ingénieuses et adéquates. Dans notre métier, le développement durable est l’une, si ce n’est la grande révolution de ces dernières années. Elle emporte dans son sillage, son lot de législations et de domaines annexes qu’il faut pouvoir maîtriser. De fait, la stabilité du bâtiment n’est plus notre unique obsession et nous devons nous soucier de sa physique, trouver des solutions ingénieuses pour économiser de la matière et penser à l’empreinte environnementale des ouvrages. Ceci nous ramène à une planification intégrale des projets.

Est-ce que le BIM (Building Information Modeling) peut être un outil de simplification?
 
RJ : Le BIM est une maquette numérique qui représente un bâtiment en 3D où viennent se greffer différentes informations qui peuvent être graphiques, informatives et documentaires. Cette élaboration numérique d’un projet se fait de manière collaborative avec des équipes externes. Le BIM permet d’optimiser les méthodes de planification d’un projet et facilite la gestion des ressources matérielles et humaines.
C’est une révolution dans nos méthodes de travail qui en effet peut être un outil efficace pour gérer la complexité, toujours plus grande, des projets. Son utilité va au-delà de l’élaboration du projet, le BIM est utile lors de la construction du bâtiment, durant son exploitation, pour les phases de rénovations, d’entretiens et pour son démantèlement.
 
AP: Le BIM peut aussi représenter un gain de temps précieux. Jusqu’à maintenant, les avants-métrés, nécessaires à l’élaboration des cahiers de charge et bordereaux des masses, devaient être calculés à la main sur base d’une multitude de plans, ce qui était relativement fastidieux. Désormais, il est possible d’extraire toutes ces informations directement de la maquette numérique, sous condition que celle-ci soit judicieusement réalisée. Le nouveau métier de modeleur BIM nécessite donc bien évidemment des connaissances plus accrues en technique de construction, une expérience confirmée du chantier et bien évidemment une excellente perception de l’environnement 3D.
 
MF: Nous nous sommes dotés d’un BIM manageur en interne et plusieurs coordinateurs sont chargés de l’implanter dans nos différents services. Nous travaillons en ce moment même sur plusieurs projets qui l’intègrent. Je prends pour exemple la rénovation et modernisation du Lycée Michel-Rodange qui se fait entièrement en BIM et où de nombreux acteurs nationaux, dont Schroeder & Associés travaillent en synergies. Autre exemple, le projet «Südspidol» du CHEM qui nous amène à travailler via le BIM avec des équipes internationales dont entre autres un bureau d’architecte autrichien et un paysagiste londonien.

La Maison du Savoir de l’Uni.lu, le Crystal Park du bâtiment de PwC, le bâtiment administratif de Lalux, et plus récemment le stade Sport Campus Arena de Riyad en Arabie-Saoudite: il semblerait que vous soyez habitués aux grands projets architecturaux…
 
RJ: De par notre savoir-faire historique dans le domaine des structures métalliques, nous avons toujours été sollicités via des clients internationaux comme ArcelorMittal, Paul Wurth et BESIX afin de travailler partout dans le monde. Pour le stade de Riyad par exemple nous avons élaboré une variante qui correspondait mieux au catalogue de produits d’Arcelor.

AP: Nos travaux allient l’esthétique et le fonctionnel. La verrière du toit du bâtiment de PwC Luxembourg et le château d’eau du Ban de Gasperich en sont de bons exemples. Le coût des travaux de construction ne doit bien évidemment pas rester en retrait et nous nous efforçons de livrer des solutions optimisées à nos clients. Ceci est d’autant plus facile lorsque nous sommes impliqués dans un projet dès les premières esquisses et réflexions.

Vous l’avez mentionné, le choix des matériaux fait l’objet de plus en plus d’attention…
 
AP: Acier, béton, bois, chaque matériau a ses forces et faiblesses et il s’agit de les connaître afin de les utiliser à bon escient. Cela s’inscrit dans la volonté des promoteurs de faire certifier leur bien immobilier via des labels comme BREEAM, LEED ou DGNB par exemple. Cette course à l’image responsable est une compétition saine dans la mesure où elle participe à la moralisation des pratiques.
MF: Notre travail consiste également à proposer des innovations qui économisent la matière. Via des simulations et nos méthodes d’ingénierie avancées, nous pouvons par exemple réduire les matériaux de protection contre le feu. Dans le cadre du projet de l’Athénée, nous avons épargné plus de 120 tonnes de CO2 par rapport à une solution plus traditionnelle.
 
 
Quels sont vos liens avec les communes?

RJ: Les communes sont soumises à une forte pression face à la croissance démographique, les maisons de retraites et les écoles doivent alors augmenter leurs capacités d’accueils et les infrastructures pour l’eau ou la mobilité, gagner en efficacités. Les communes se modernisent dans une perspective de développement responsable et durable, d’où leurs adhésion au Pacte Climat.
Nous aidons onze communes de par nos quatre conseillers climatiques et nos compétences leur apportent une plus-value quant à la réduction de leur impact environnemental.