Stëftung Hëllef Doheem : le futur du soin
Depuis un quart de siècle, la Stëftung Hëllef Doheem ne cesse de se réinventer pour répondre aux besoins de celles et ceux qui nécessitent des aides et soins à domicile. Mais cette fondation, pionnière dans ce secteur, ne se contente pas de suivre les évolutions : elle les devance. Benoît Holzem, son directeur général, nous invite à découvrir un modèle unique où innovation et tradition s’entrelacent pour offrir une assistance toujours plus adaptée, à la fois humaine et technologique.
Vous avez récemment célébré les 25 ans de la fondation. Pouvez-vous nous en dire plus sur son histoire ?
Quand on évoque notre histoire, il faut en réalité remonter bien plus loin que nos 25 ans d’existence en tant que fondation. Nos origines prennent racine dans les œuvres caritatives des congrégations de frères et de sœurs actives au Luxembourg dès les 18e et 19e siècles. À une époque où l’État social n’existait pas encore, ce sont ces communautés religieuses qui allaient soigner les gens à domicile, en particulier les plus démunis. Elles apportaient de la nourriture, dispensaient des aides et des soins – jouant ainsi un rôle fondamental dans la prise en charge de leurs besoins. Et cela, déjà à l’époque, en collaboration avec les communes.
Cette longue tradition d’engagement a naturellement évolué au fil du temps, mais certaines valeurs sont restées intactes, notamment notre lien fort avec les communes. L’année dernière, à l’occasion de notre anniversaire, nous avons tenu à mettre en lumière cette collaboration historique, qui reste aujourd’hui encore primordiale pour nous. Elle se concrétise à travers des accords pour accompagner les résidents dans leurs sorties de proximité (comme le « Mëttesdësch »), ou encore par le financement de certains services essentiels tels que le téléalarme, ce fameux bouton rouge qui permet, en cas de chute ou d’urgence à domicile, de déclencher l’intervention rapide de nos équipes.
La célébration de nos 25 ans a aussi été l’occasion d’un geste fort : la plantation d’une centaine de rosiers dans les jardins de nos centres de jour à travers le pays. Il s’agit de la rose #yeswecare, créée par l’asbl « Lëtzebuerger Rousefrënn », en hommage à l’engagement de tous les soignants. Plusieurs communes nous ont déjà emboité le pas et nous serions heureux d’en voir d’autres se joindre à cette initiative en plantant ces rosiers dans leurs parcs et parterres – un hommage durable à toutes celles et ceux qui prennent soin des autres au quotidien (voir encadré « Rose #yeswecare »).
Quelles innovations majeures ont marqué ces dernières années et comment ont-elles amélioré l’accompagnement des bénéficiaires ?
L’innovation est depuis toujours au cœur de notre mission. Plutôt que de suivre les tendances, nous cherchons à les devancer, en imaginant des solutions concrètes pour améliorer le quotidien des personnes que nous accompagnons. Nous avons ainsi été les premiers à lancer, à l’échelle nationale, le service de téléalarme. De même, nous avons initié les soins palliatifs à domicile, de jour comme de nuit, en les finançant sur nos fonds propres pendant plus de 15 ans, avec le soutien du ministère de la Famille, avant qu’ils ne soient pris en charge par la CNS. Nous sommes d’ailleurs membre fondateur d’Omega90, qui pratique les soins palliatifs en milieu stationnaire. Par ailleurs, nous avons introduit le concept d’infirmière de liaison dans les hôpitaux du pays et avons été les premiers à proposer, dans les communes, des formations destinées aux aidants – ces proches qui prennent soin d’un membre de leur famille à domicile. Ces cours existent toujours et sont désormais financés par l’État.
Notre volonté d’innover s’exprime également à travers la promotion des nouvelles technologies. Nous avons, par exemple, lancé plusieurs projets pour opérationnaliser l’utilisation des « HoloLens », ces lunettes connectées permettant à une infirmière de notre centre de compétences national d’assister à distance une soignante sur le terrain. Si celle-ci n’a pas l’expertise nécessaire pour un soin spécifique, elle peut être guidée en temps réel par l’infirmière, qui n’a plus besoin de se déplacer. Autre avancée majeure : la « télésurveillance ». Cette technologie consiste en la prise de paramètres vitaux à distance – fréquence cardiaque, tension artérielle, etc. – et nous permet un monitoring 24/24h de nos clients, un encadrement renforcé et une réactivité comparable à celle d’un hôpital, mais à domicile. Si une alerte est déclenchée, nous pouvons réagir immédiatement à travers le pays, en nous concertant, si besoin, avec le médecin traitant.
Depuis longtemps, nous menons aussi des projets pilotes avec des hôpitaux, notamment pour les patients atteints de cancer. Les prises de sang ou le suivi de certains paramètres peuvent ainsi être réalisés directement à domicile, évitant aux patients des allers-retours inutiles vers l’hôpital. À terme, certains traitements oncologiques pourraient eux aussi être directement administrés à domicile. Si le cadre financier reste encore à définir par l’État, nous sommes prêts – tant sur le plan technologique qu’humain. C’est un tournant majeur vers une hospitalisation à domicile que nous souhaitons concrétiser en partenariat avec les médecins traitants et des spécialistes hospitaliers.
Enfin, grâce à notre collaboration privilégiée avec des partenaires du secteur des maisons de repos, nous proposons également à nos clients des solutions d’hébergement temporaire ou de plus longue durée. Cela répond notamment à des besoins de « lits de vacances » pour offrir un répit aux aidants ou permettre d’accélérer une sortie d’hôpital quand le retour à domicile immédiat n’est pas envisageable. Afin de renforcer le maintien à domicile et d’éviter des hospitalisations prolongées ou inutiles, nous plaidons auprès des ministres en faveur du financement de « tours de nuit ». Cette présence nocturne permet de prévenir certaines pathologies et de réduire le risque de chutes. Et lorsque le maintien à domicile n’est plus possible, nous assurons une transition en douceur vers un établissement partenaire, pour les clients qui le souhaitent.
Vous mentionnez l’utilisation de technologies avancées dans vos soins. Comment ces outils numériques changent-ils concrètement la manière dont les soins sont dispensés au quotidien ?
La digitalisation et l’intelligence artificielle occupent une place centrale dans l’évolution de nos services. Dans le domaine des soins, nous avons très tôt intégré des outils numériques tels que les PDA (assistants personnels digitaux) et des plateformes en ligne permettant la mise à jour en temps réel des dossiers de soins. Ces outils assurent en même temps le suivi par nos soignants de parcours thérapeutiques intégrant les avancées de la recherche en science infirmière. Ainsi, chaque soignant, même en l’absence de son prédécesseur, peut accéder à toutes les informations nécessaires pour garantir une prise en charge optimale. L’objectif est de rendre nos interventions à la fois plus efficaces et plus sûres, tout en maintenant une approche centrée sur le bien-être du bénéficiaire, où le rôle du soignant et le contact humain demeurent essentiels.
Mais cette transformation numérique ne concerne pas uniquement les professionnels : elle profite aussi directement aux bénéficiaires, notamment les personnes âgées. Nombre d’entre elles n’ont pas grandi avec les nouvelles technologies – et c’est là que nous intervenons. Nous proposons des formations pratiques, souvent animées par des bénévoles qui se déplacent chez les clients pour les aider à utiliser un téléphone portable ou à naviguer sur Internet. Ce soutien leur permet de s’ouvrir au monde numérique et de rompre l’isolement social. Notre engagement en faveur de cette inclusion vient d’ailleurs d’être reconnu : nous comptons parmi les quatre lauréats du « Prix Inclusion Numérique 2025 » décerné par le ministère de la Digitalisation pour notre projet « Digital Doheem ».
Nous restons à la disposition des communes pour présenter l’ensemble de nos services à leurs habitants.