L’immobilier social face aux crises

Créée en 2009, l’Agence Immobilière Sociale (AIS) œuvre à l’inclusion sociale par le logement. En lançant Abitatio, un promoteur social créé au sein de la Fondation pour l’Accès au Logement (FAL) en 2019, la structure entend étendre son influence en faveur des plus démunis. Gilles Hempel, directeur de la FAL, revient sur les différentes missions de l’agence, mais aussi sur l’impact de la conjoncture actuelle sur ses activités.

 

L’Agence Immobilière Sociale peut-elle être considérée comme pionnière de la gestion locative sociale (GLS) au Luxembourg?

Nous en sommes pionniers mais également l’acteur majeur au Grand-Duché. Nous sommes fiers du chemin parcouru. En tant que fondation, notre objectif n’était pas d’avoir un maximum de parts de marché, mais de promouvoir une idée et de la développer.

Face au succès de l’AIS, l’État a généralisé le principe de gestion locative sociale pour mobiliser les logements inoccupés et les mettre à disposition des ménages temporairement en difficulté financière. Quelque 1.000 habitations sont ainsi concernées par le marché de la GLS, dont environ 40% sont aujourd’hui régies par l’AIS. De plus, nous assurons la gouvernance de 200 logements étatiques qui n’entrent pas dans le champ d’application de la GLS.

Au fil des années, 37 autres acteurs ont rejoint l’AIS, aujourd’hui tous conventionnés par le ministère du Logement. Ceux-ci travaillent à petite ou grande échelle mais notre agence a une influence au niveau national et ne laisse personne de côté. Certaines communes s’occupent de la gestion locative sociale elles-mêmes, mais la moitié d’entre elles travaillent avec nous, cela dépend de la politique communale.

 

Vous misez fortement sur l’inclusion sociale par le logement…

Le projet d’inclusion sociale par le logement est véritablement le cœur de notre métier. La demande est toujours introduite par un service social externe. Nos demandeurs, qui rencontrent la plupart du temps des problèmes divers, au-delà de leur détresse sur le marché de l’immobilier, sont donc déjà accompagnés. À l’AIS, nous nous occupons principalement de l’encadrement lié au projet de logement. Quant à l’accompagnement social, il est assuré par un organisme externe. Nous avons tout de même une équipe interne capable de prendre en charge ce dernier volet lorsqu’aucune autre structure ne peut réaliser cet accompagnement pour certains bénéficiaires. Cette même équipe assure la veille sociale pour Abitatio.

 

L’AIS s’est effectivement lancée dans la promotion immobilière sociale avec Abitatio…

En dix ans d’activité, nous avons constaté que l’envolée des prix de l’immobilier ne laissait aucune chance de se loger aux plus démunis. De ce fait, il fallait agir en tant que promoteur afin de devenir propriétaire et d’offrir des baux à durée indéterminée et à des prix abordables. Nous avons donc lancé Abitatio en 2019, un promoteur social créé au sein de la FAL.

Les prix des matériaux et des matières premières ne font qu’exploser et sont trop volatiles

Construire et gérer des logements sont deux métiers totalement différents, mais notre expérience en matière de gestion, en plus de la promotion immobilière sociale, nous permet aujourd’hui de proposer des services de qualité.

À ce jour, Abitatio a créé 29 logements abordables, une vingtaine d’autres est en cours de réalisation et 33 supplémentaires sont déjà planifiés. Nous visons, à moyen terme, une livraison d’une cinquantaine de logements par année.

Nous avons inauguré deux immeubles de douze appartements à Heidersheid en mars dernier en présence du ministre du Logement Henri Kox. Ces habitations sont exclusivement destinés à la location abordable. Le ministère a d’ailleurs cofinancé le projet à hauteur de 75%.

 

La guerre en Ukraine et la hausse des prix de l’énergie et des matériaux doivent forcément impacter vos activités et notamment celles d’Abitatio?

Nous sommes ravis du fonctionnement d’Abitatio car nous avons déjà de nombreux projets en cours et à venir. Malheureusement, en raison de la crise sanitaire, de la crise énergétique et de la guerre en Ukraine, les prix des matériaux et des matières premières ne font qu’exploser et sont trop volatiles, tout comme les taux d’intérêt. Construire sera plus difficile et plus onéreux, tant pour nous que pour les promoteurs privés. Cela complique la planification des projets et leur financement. Nous ne respectons plus les plafonds imposés par le ministère du Logement pour le cofinancement. C’est un sujet qui nous préoccupe, néanmoins nous sommes convaincus que le ministère trouvera des solutions adéquates.

 

Un mot sur l’une de vos dernières actualités?

Nous avons procédé à quelques changements en interne. Nous avons effectivement opéré une transformation digitale au niveau opérationnel. En nous orientant vers cette transition, nous serons beaucoup plus performants et gérerons les dossiers et projets de façon optimale.

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