L’accélération des processus de digitalisation

Pour la deuxième année consécutive, KPMG Luxembourg a participé à l’enquête mondiale «CEO Outlook» dont l’objectif est de dégager les tendances de fond qui mobilisent l’attention des dirigeants d’entreprise à travers une cinquantaine de pays, dont le Luxembourg. Cette année, les sujets liés à la transformation digitale et à ses nombreux aspects semblent particulièrement les préoccuper. Pascal Denis, Head of Advisory chez KPMG, nous aide à interpréter les réponses données par les dirigeants luxembourgeois.

Parlez-nous de votre enquête CEO Outlook…

Cette année, 1.300 CEO ont été interrogés à travers le monde, dont un échantillon représentatif de 25 dirigeants pour le Luxembourg qui couvre onze secteurs différents et tous les types d’entreprises présents au Luxembourg. En tentant de comprendre ce qui mobilise l’attention des CEO, il est ressorti des réponses données cette année, une importance particulière des sujets liés à la transformation digitale et à ses aspects technologiques, humains, clients et managériaux, entre autres.

Les dirigeants semblent à la fois optimistes et réalistes quant aux défis que représente la transformation digitale. 96% d’entre eux considèrent en effet plutôt ces changements technologiques comme une opportunité qu’une menace, dans un contexte de croissance attendue relativement faible de 2 à 3% pour ces trois prochaines années.

Quelles sont les difficultés rencontrées par les CEO pour mettre en place cette transformation?

Ils évoquent notamment celle d’opérer une gestion intégrée et combinée des processus classiques et digitaux. Par rapport à tous les autres pays, le Luxembourg se situe au même niveau en termes d’intérêt, de prise de conscience et d’optimisme par rapport à la digitalisation, toutefois le pays a entamé cette démarche plus tardivement que les autres, nous n’avons donc pas encore la maturité pour exécuter cette transformation dans nos structures, nos compétences, nos façons de travailler et de collaborer.

En sous-estimant jusqu’ici le degré d’importance de la digitalisation, les dirigeants du Luxembourg ont accumulé un retard au niveau de sa mise en œuvre concrète dans les différents sous-domaines qu’elle implique, notamment en ce qui concerne la cybersécurité. Les CEO luxembourgeois sont d’ailleurs en dessous de l’échantillon global en ce qui concerne leur propre estimation de leur niveau de préparation à des cyberattaques.

Une autre difficulté rencontrée au niveau local et mondial est l’acquisition des compétences et le recrutement de profils qualifiés comme les profils cyber, les Data Scientists ou encore les spécialistes en technologies émergentes comme l’intelligence artificielle, par ordre décroissant d’importance.

Ces difficultés mettent en évidence les sujets sur lesquels les CEO luxembourgeois doivent se concentrer et accentuer leurs efforts.

Au Luxembourg, les dirigeants voient-ils des opportunités dans cette transformation?

L’étude montre que la majorité des CEO luxembourgeois veulent utiliser les évolutions technologiques comme un levier de disruption dans leur secteur. Au niveau national un grand travail de conscientisation et de communication a déjà été effectué. Aujourd’hui, ce travail se déplace sur les autres fonctions de l’entreprise comme les CIO qui doivent se concentrer sur la recherche et le recrutement de nouvelles ressources ou les CFO qui doivent dégager de la capacité à investir dans ces technologies, par exemple.

Les dirigeants luxembourgeois veulent mettre en œuvre des stratégies d’alliance pour parvenir à mettre en place ces changements, notamment avec des startups et des fournisseurs de solutions cloud. Ils recherchent clairement des synergies qui peuvent être créées avec les autres acteurs du marché.

Comment transformer ces opportunités en réalités?

L’appel à l’action a été effectué au cours des dernières années. Aujourd’hui, c’est un appel à l’accélération de la transformation digitale que formulent les CEO, pour finalement opérer cette transition au niveau de l’ensemble de l’écosystème.

Il ressort de l’enquête que six CEO sur dix se sentent capables de mener leur entreprise à travers ces changements. Cette majorité certes fragile montre que les CEO ont encore des doutes quant à leur capacité à mener seuls cette transformation, ils auront besoin de leurs équipes et de collaborations externes pour y parvenir.

Nos équipes dédiées à chacun des aspects de la transformation digitale sont prêtes à les épauler à tous les niveaux pour les préparer et les aider à accélérer le mouvement. Toutefois les CEO sont encore frileux quand il s’agit d’externaliser certaines tâches de leur business. Une des raisons évoquées par ceux-ci est la difficulté à aligner le comportement des ressources externes avec la philosophie, les valeurs et la direction de l’entreprise. La digitalisation implique un changement en profondeur de la culture de l’entreprise, or les dirigeants semblent encore avoir des difficultés à amorcer ce changement, notamment par le biais de collaborateurs externes.

Quelles sont les prochaines étapes du changement?

68% des CEO au niveau global estiment ne pas avoir donné suffisamment de poids aux informations qui ressortent de leurs données. Toutefois, la recherche croissante de Data Scientists au niveau du recrutement pourrait être synonyme d’une prise de conscience quant à l’importance de ces données dans le futur.

Il ressort également de l’étude que peu d’entre eux seraient prêts à augmenter l’utilisation des modèles prédictifs ou analytiques. Cela démontre qu’il n’y a pas vraiment de réflexion stratégique de fond sur la nécessité des changements à venir. Ces chiffres contradictoires sont le reflet d’un changement en cours et encore mal cerné et montrent également un retard rapport à l’échantillon mondial, nous devons donc accélérer la démarche d’utilisation systématique des données au sein des entreprises luxembourgeoises.

En tant que consultants, nous devons les aider à passer à l’exécution, à cerner quelles sont les prochaines étapes concrètes du changement à tous les niveaux d’une entreprise et les aider à développer un plan d’action cohérent dans le cadre de ces évolutions.