Vers une production et une consommation responsable

Ecotrel a pour vocation d’intégrer le concept de responsabilité élargie des producteurs dans celui d’économie circulaire. Possédant un fort ancrage national et collaborant avec 663 entreprises implantées sur le territoire luxembourgeois, l’asbl endosse les obligations légales à charge des producteurs d’équipements électriques et électroniques. Bernard Mottet, directeur, revient avec nous sur le rôle clé que joue l’asbl sur le marché luxembourgeois.
 
De quelle initiative est née Ecotrel?
Jusque dans les années 90, les poubelles étaient déposées devant les habitations et étaient aussitôt emportées par un camion-poubelle. Dans les années 90, des directives mettant en cause la responsabilité élargie des producteurs sont apparues et ont visé d’abord les emballages, puis les véhicules hors d’usage, les déchets d’équipements électriques et électroniques, les piles et accumulateurs,…
La commission européenne a alors rendu toute entité mettant des produits sur le marché (importateur ou producteur), responsable des déchets issus de ceux-ci. Elle les a alors responsabilisés par le biais d’obligations diverses, notamment en termes de collecte, de quota de recyclage ou de réutilisation, d’informations transmises au public,…
Dans ce cadre, Ecotrel a été créée en 2004 par 43 sociétés importatrices et productrices d’équipements électriques et électroniques. L’asbl endosse les obligations légales à charge des producteurs à savoir la collecte de ces équipements sur l’ensemble du territoire et la prise en charge de la communication au consommateur sur les questions liées au tri de ce type de déchets. Notre but n’est pas de gagner de l’argent, mais d’organiser le traitement des déchets sans accabler les consommateurs de cotisations élevées, tout en augmentant le taux et la qualité du recyclage des déchets.
En 2006, une nouvelle directive est apparue, visant cette fois les piles et accumulateurs. Ecotrel, déjà expérimentée dans ce domaine, s’est alors associée en 2009 avec la Fédération des Artisans, la FEDIL et la CLC pour créer Ecobatterien. Aujourd’hui, Ecotrel et Ecobatterien sont gérées par la même équipe.
 
Quelles sont les responsabilités endossées par Ecotrel et Ecobatterien?
Ecotrel a instauré avec un certain succès le principe de responsabilité élargie des producteurs au niveau national. Au niveau international, Ecotrel est dans le top trois européen concernant les taux de collecte. Notre but est maintenant d’intégrer cette notion de responsabilité élargie des producteurs dans le concept d’économie circulaire. Ainsi, nous traitons des appareils en fin d’utilisation qui remplaceront les déchets et nous tentons de ralentir le cycle de vie d’un produit en réutilisant et réparant… mais il y aura toujours des déchets que nous devrons traiter.
L’objectif final est de parvenir à récupérer et recycler l’ensemble des appareils mis sur le marché luxembourgeois. Dans ce contexte, nous avons opté pour un démontage manuel des appareils afin de favoriser la réutilisation de certains composants, d’en enlever toutes les piles et de garantir le principe de proximité qui consiste à ne pas aller trop loin pour faire recycler les déchets. Nous essayons donc d’offrir une réponse économique à un cadre légal écologique.
Au terme du recyclage, le produit fini que nous récupérons c’est la matière première. En procédant à un démontage manuel, nous augmentons la qualité et la pureté de la matière première. Le démontage manuel est plus cher, mais il nous permet d’engager du personnel en réinsertion sociale, et d’augmenter la charge des camions partant vers les usines de traitement se situant dans un rayon de 300km maximum. D’autres usines s’occupent par ailleurs du traitement des produits plus dangereux comme le cadmium, le mercure, les piles au lithium,…
Pour respecter les normes européennes, nous devons atteindre un taux de collecte de 45% à l’heure actuelle; en 2019, nous devrons atteindre 65%. Les déchets que nous ne parvenons pas à récolter sont en général envoyés de manière plus ou moins légale en Afrique pour en extraire des matériaux précieux. Cette fuite est surtout identifiée au niveau des sociétés à caractère administratif qui, souvent de bonne foi, se débarrassent chaque année de plus de 500 tonnes de matériel informatique, alors que nous sommes loin d’en récolter autant à ce niveau. Pour que nous puissions mettre en application le concept d’économie circulaire, il est nécessaire que tous les acteurs concernés fassent partie de cette chaîne du recyclage.
 
D’où provient votre budget pour mener à bien ces activités?
Au travers d’une cotisation de recyclage (éco participation) à la mise sur le marché, nous arrivons à financer la collecte et le traitement d’équipements électriques et électroniques ainsi que des piles et accumulateurs. Ecotrel met par ailleurs un point d’honneur à ce que ces cotisations de recyclage soient moins chères que dans les pays limitrophes, pour assurer un avantage compétitif aux entreprises luxembourgeoises, ou du moins pour ne pas leur apporter un désavantage à ce niveau. Cela signifie que toute entreprise vendant en TVA luxembourgeoise, ce qui touche aussi les plateformes de vente en ligne, est concernée par cette cotisation.
Forts de ce financement, nous avons signé un accord environnemental avec l’ensemble des communes et syndicats intercommunaux afin d’assurer la collecte et le recyclage des appareils en fin d’utilisation qui leur sont remis. Ainsi nous mettons des containers à disposition des recycling centers et nous leur donnons certaines consignes de tri. Suite à un appel d’offres, nous sommes en partenariat avec deux sous-traitants pour y enlever le matériel et l’emmener dans un de nos deux centres de tri et de regroupement situés à Colmar-Berg et à Bettembourg; la SuperDrecksKëscht s’occupe ainsi des déchets problématiques et Lamesch traite les autres déchets électriques et électroniques.
Les distributeurs ont également l’obligation de reprendre certains appareils selon les directives européennes en vigueur. Ces derniers peuvent ramener gratuitement les déchets dans un de nos deux centres pour que nous les traitions.
 
Pouvez-vous nous donner des exemples de bonnes pratiques dans ce domaine?
Une partie de notre travail consiste à contrer les fausses bonnes idées telles qu’envoyer des ordinateurs et des smartphones d’occasion en Afrique, car il s’agit là d’envoyer des futurs déchets sur le continent, or le recyclage de ces appareils n’y est pas assuré!
Parmi nos bonnes pratiques, nous avons développé la plateforme e-collect.lu qui permet, en indiquant son code postal, de visualiser toutes les possibilités de reprise de ce type d’appareils à proximité de son domicile. De cette manière, le consommateur est responsabilisé.
Notre convention de partenariat avec la SuperDrecksKëscht vise notamment à envoyer un message commun, cohérent et clair concernant le traitement des piles, des accumulateurs et des équipements électriques et électroniques. L’essentiel du message transmis se résume en un symbole: la poubelle sur roues barrée qui incite les consommateurs à ne pas jeter ce type d’équipements ainsi que les piles et accumulateurs avec les déchets ménagers.
Nous voulons aussi montrer l’exemple en développant un projet pilote de centre de tri intégré à la résidence où nous avons récemment élu domicile en collaboration avec la SuperDrecksKëscht et la commune de Sanem.
Nous soutenons également des initiatives, comme Digital Inclusion qui collecte des laptops et des smartphones en entreprise pour les faire réparer par des migrants puis les mettre à leur disposition. Cela correspond tout à fait à notre principe de proximité et de circuit court et permet par ailleurs l’intégration sociale des migrants.
 
 
Ecotrel en chiffres
 
9 appareils électriques mis sur le marché par habitant en 2016
100 appareils électriques et électroniques par ménage
120 piles par ménage
663 membres Ecotrel
667 membres Ecobatterien
 

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