Licenciement: privilégier la piste de l’arrangement

Maître Giabbani

Bien que peu agréable, le licenciement fait partie de la vie en entreprise et peut parfois entraîner des situations de tension. Dans le cas d’un renvoi conflictuel, il est parfois plus sage de se tourner vers la transaction, plutôt que d’aller en justice. David Giabbani, avocat à la Cour et spécialiste des matières de droit du travail nous dresse un panorama de cette solution, composée de concessions réciproques des deux parties.

Il existe de nombreuses activités réservées à l’avocat. Selon le règlement intérieur de l’ordre des avocats, ce dernier conseille, rédige et plaide. Surtout, l’avocat assiste ses clients dans les négociations qu’il mène dans la défense de leurs intérêts.
Un procès peut être long et couteux et bien souvent, il y a un intérêt à s’adresser à un avocat spécialisé aux fins de transiger avec la partie adverse plutôt que d’aller en justice. L’avantage est double: gain de temps et sécurité juridique.
Face à un licenciement mal digéré ou effectivement abusif, il peut être conseillé de privilégier la piste de l’arrangement avant toute autre mesure.
Définition de la transaction
La transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Il faut donc qu’il y ait une situation contentieuse ou précontentieuse pour que puisse être conclue une transaction. Cette existence ou cette possibilité de situation litigieuse est la cause de la transaction, c’est-à-dire, la considération d’un but qui explique et justifie la création d’une obligation par la volonté des parties (cf : jurisclasseur travail verbo Transaction Fasc. 32-20).
Par contestation née, il faut entendre un litige existant, réel et dont les parties sont censées connaître l’importance. En revanche, la contestation à naître sous-entend un pari tenu par l’employeur et le salarié qui ne peuvent apprécier avec exactitude l’étendue et les conséquences du différend.
En cas de litige, et encore davantage en cas de litige à naître, l’aléa peut être à l’origine de la transaction. Les parties vont se faire des concessions réciproques sur des prétentions dont elles ne sont pas certaines que les tribunaux en admettront le bien-fondé. Elle est prévue expressément à l’article 2044 du code civil.
Forme de la transaction
Aux termes de l’article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être rédigé par écrit. Elle a, entre parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort. La question se pose cependant de savoir si l’écrit est exigé ad probationem (en vue d’une preuve) ou ad validitatem (en vue de sa validité).
Il ne s’agit pas selon une jurisprudence d’un contrat solennel. L’écrit n’est en effet pas exigé pour la validité du contrat de transaction dont l’existence peut être établie selon les modes de preuve prévus en matière de contrats par les articles 1341 et suivants du code civil (C.S.J., 04/12/2008, 32895).
Un arrêt plus récent retient lui que la renonciation à intenter une action (obligation souvent contenue à titre de concession dans la transaction dès lors qu’il s’agit de prévenir un conflit à naître) doit faire l’objet d’une transaction écrite et ne peut être faite oralement (C.S.J., 26/01/2012, 36905).

Notion de concessions réciproques
La transaction exige pour sa validité que des concessions réciproques aient été accordées.
Il doit donc non-seulement y avoir un écrit, l’existence d’une situation contentieuse ou précontentieuse, l’existence d’un consentement non-vicié et des concessions réciproques. S’il est vrai que la notion de transaction implique le consentement de concessions réciproques, l’importance des concessions requises est cependant laissée à l’appréciation des juridictions saisies. S’il importe peu que les concessions soient d’importance inégale, elles ne doivent pas être dérisoires, sauf à entacher la transaction de nullité (C.S.J., 26/05/2011, 360887). Il n’y a pas de transaction lorsqu’une partie abandonne ses droits pour une contrepartie si faible qu’elle est pratiquement inexistante.
Par exemple, ne constitue pas de concessions réciproques le fait pour un salarié de renoncer à agir en justice contre le paiement de ses indemnités légales qui sont de toute façon dues indépendamment de l’existence et de la conclusion de toute transaction. Pareillement ne constitue pas de concessions réciproques le fait pour un employeur de dispenser son salarié de prester le préavis en cas de licenciement contre renonciation au paiement des indemnités de départ et autres dommages intérêts à réclamer en justice.
Transaction et vice du consentement
La transaction se voit annulée en cas de vice du consentement.
La transaction peut être annulée pour dol, c’est-à-dire en cas de comportement malhonnête par l’une des parties qui aura usé de manœuvres destinées à surprendre le consentement de l’autre partie: par exemple en l’absence de consentement éclairé du salarié (salarié convoqué à une réunion après un longue maladie et lors de laquelle on lui présente une transaction toute faite). Cela peut également être le fait du salarié qui aura omis de révéler au moment des négociations une information capitale (C.S.J., 20/03/2008, 28840, droit du travail, PUTZ- WIRTZ, proc. en droit du travail, p. 1797: salariée qui avait omis de révéler au moment des négociations qu’elle avait soustrait frauduleusement un véhicule appartenant à l’employeur)
David Giabbani

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