Museler «la complainte à l'heure de pointe»

Le ronronnement du moteur au démarrage, les pneus qui crissent dans les virages, la sensation de liberté dans le voyage… Non, décidemment, les luxembourgeois ne sont pas prêts à se passer de leur voiture. L’enquête Movilux dévoilée en décembre dernier le confirme: l’automobile est maîtresse au Grand-Duché. Avec 97% des ménages qui en possèdent au moins une, elle est le 1er moyen de transport pour se rendre sur son lieu de travail. Un constat encore renforcé par les 69% d’actifs qui disposent d’une place de parking à leur boulot, ce qui n’encourage pas à la réflexion sur les alternatives possibles. Cette prédominance incontestée de la voiture est renforcée par le témoignage du Statec: en 2012, avec près de 660 automobiles pour 1.000 habitants, le Luxembourg était proportionnellement le 2e pays le plus motorisé au monde. La suprématie des bagnoles sur nos routes est sans appel, mais pas sans conséquences.
Au cours de décembre, plusieurs grandes villes européennes étaient touchées par des pics de pollution hivernale, dus aux particules. Paris en proportions jamais vues depuis dix ans mais aussi Lyon, Bruxelles, Madrid, Milan et Londres ont subi cette désagréable purée de pois qui, si elle ne s’applique pas encore à Luxembourg-Ville, risque de ne pas tarder à y pointer le bout de son nuage gris. Côté pollution, rappelons que les transports sont champions en matière d’émission de gaz à effet de serre, les probables responsables du changement climatique. En 2004, le ministère de l’Environnement estimait que, dans notre pays, 53% de ces émissions provenait du secteur des transports. Signalons aussi que le Grand-Duché est le paradis du diesel, un carburant dont les gaz d’échappement sont classés cancérogènes pour l’homme par l’OMS depuis 2012.
Au regard du confort, le Grand-Duché marque là aussi un triste score avec 32 heures par année perdues dans les embouteillages par résident. Nous nous plaçons ainsi au 5e rang des pays les plus embouteillés d’Europe. Saturé, le réseau routier doit supporter bien trop de voitures individuelles par rapport à son potentiel. Face à cette problématique, de plus en plus de conducteurs optent pour des formules de mobilité innovantes: location longue durée, voiture en libre-service ou encore partage entre particuliers. Ces alternatives séduisent! D’autant plus qu’en moyenne une voiture reste inutilisée 95% du temps: une aberration du point de vue de l’efficience. La notion de propriété troquée contre le concept d’usage nous pose une question percutante: demain, la voiture personnelle existera-t-elle encore?
Du reste, seulement 4% des déplacements dans la capitale se font à bicyclette. «Dans Paris à vélo on dépasse les autos», chantait déjà, en 1972, un Joe Dassin guilleret dans une chanson exaspérante dont nous n’aurions peut-être pas dû baisser le volume. Quitte à évincer le monarque automobile, pourquoi ne pas placer la petite reine sur le trône?   SoM

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