Embaucher ou proposer une expérience?

Bientôt centenaire, la banque BGL BNP Paribas n’a eu de cesse de muter afin de s’adapter aux exigences des évolutions économiques, jusqu’aux modes agiles prônés d’aujourd’hui. Patrick Gregorius, directeur des ressources humaines pour l’ensemble des entités du Groupe BNP Paribas au Luxembourg, aborde dans cette interview l’impact de ces changements en matière de recrutement, fidélisation de talents, burnouts et fin de carrière.
 
Au 1er mars, vous avez reçu la certification « Top Employer Luxembourg 2016 ». Selon vous, pourquoi BGL BNP Paribas mérite-t-elle cette récompense?
BNP Paribas avait déjà été certifié « Top Employer » dans d’autres pays dans lesquels le Groupe est présent. Vu notre environnement de travail et notre politique RH qui font de nous un excellent employeur, il n’y avait aucune raison que le Luxembourg n’y prétende pas. Je parle notamment de notre flexibilité d’horaire de travail, de la possibilité d’acheter des jours de congés ou de prendre des congés sans solde,  de notre salle de fitness, de notre crèche, de notre conciergerie ou encore de nos divers espaces de restauration.
L’objectif principal de cette certification est de faire prendre conscience à chacun que nous offrons ce qui est nécessaire en matière de confort et de bien-être. Nous cherchons à offrir un cadre qui permette au collaborateur de se sentir bien sur son lieu de travail. L’un des résultats d’une telle approche est que nous avons un turn-over très faible. Nous le constatons par ailleurs annuellement via notre Global People Survey: un nombre infime de nos collaborateurs répondent positivement à la question «Envisagez-vous de quitter le Groupe BNP Paribas?».
 
Quels sont les grands défis que vous rencontrez en matière de recrutement?
Le recrutement a subi des bouleversements importants ces dernières années. Nous recrutons moins aujourd’hui, mais les profils recherchés sont plus spécifiques.
Le premier défi est de trouver des personnes qui disposent des compétences dont nous avons besoin aujourd’hui… Mais surtout dont nous aurons besoin dans le futur, et ce, alors que certains jobs de demain n’existent pas encore.
Le second défi est d’attirer les jeunes vers un secteur qui peut parfois avoir mauvaise presse; perçu comme trop compliqué et peu créatif. Pourtant, les attentes de nos clients nous poussent à nous dépasser, en matière d’ouverture et d’idées novatrices, dans un monde de plus en plus digital.
Mais malgré cela, le secteur financier a tendance à souffrir d’un défaut de représentation auprès des jeunes. Pour y pallier, nous sommes notamment en train de revoir la façon dont nous rédigeons nos offres d’emploi. Autant hier encore vous y trouviez «Voilà ce que nous attendons de vous»; autant aujourd’hui vous y voyez «Voilà ce que nous vous proposons»
Votre recette pour fidéliser les talents?
Notre objectif est qu’à chaque étape, l’expérience soit la meilleure possible pour celui qui nous rejoint. Dès le premier jour, il doit avoir le sentiment d’avoir fait le bon choix. Nous revoyons par exemple notre processus d’ “On Boarding” car veiller à ce qu’un nouveau collaborateur se sente bien dès le début est impératif pour créer un sentiment d’inclusion. Pour un accueil réussi, il faut au collaborateur connaître l’employeur, ses valeurs et ses méthodes afin de s’intégrer rapidement dans une position d’efficacité effective. Il faut qu’il se sente bienvenu et surtout utile.
Epuisement professionnel: comment l’éviter?
Mon principe est simple: personne ne se rend au travail pour en tomber malade. Nous devons donc nous assurer que la stratégie en place ne mette pas inutilement le collaborateur sous pression. Aucun modèle économique n’amène à des résultats productifs par le stress. Bien entendu, une pression positive peut être bénéfique, si seulement elle est encadrée par un management responsable, des “feedbacks” réguliers et une mise en lumière des atouts de chacun.
En tant que département des ressources humaines, notre responsabilité est de concevoir un cadre grâce auquel ce risque d’épuisement professionnel est le moins important possible. Une atmosphère de confiance qui permet d’œuvrer dans le respect de tous diminue certainement la perception de pression que peuvent subir les collaborateurs. Le burnout ne dépend cependant sans doute pas exclusivement de facteurs professionnels et ses causes peuvent être multiples.
Et les fins de carrières?
Le malheur, c’est lorsque les gens y aspirent et ont le sentiment que leur vie ne commence qu’à la retraite! Selon nous, la fin de carrière est le synonyme d’un projet achevé. Le départ doit être marqué par de la fierté du travail accompli et le sentiment d’avoir transmis ses connaissances, dans une impression de continuité avec ceux qui restent. Nous souhaitons insister sur les notions de coaching par des personnes en fin de carrière, qui n’assument pas forcément leurs responsabilités opérationnelles jusqu’au dernier jour, et peuvent accompagner ceux moins expérimentés, pour les faire évoluer.
 
Un mot sur votre département?
Notre équipe de 60 personnes s’occupe non seulement des 2.300 personnes employées par BGL BNP Paribas, mais au total des 3.800 qui travaillent pour le Groupe BNP Paribas sur le territoire. Recrutement, paiement des salaires, définition des avantages, nous n’externalisons aucune activité. Nous avons également un service HR Information Management qui se concentre sur les procédés traitant d’informations concernant nos collaborateurs. C’est un angle très important car si nous voulons bien les servir, il nous faut bien les connaître. Dans un monde de plus en plus agile, rassembler ces données souvent éparpillées afin de les utiliser au jour le jour est essentiel. Ainsi, nous étudions le parcours de nos collaborateurs – du recrutement à la retraite en passant par les promotions ou la mobilité, en local ou à l’étranger. Cela nous permet de redéfinir la façon dont nous gérons les ressources humaines, au service du collaborateur. Nous créons de la valeur ajoutée grâce à la connaissance de l’humain dans l’entreprise.
La tendance du métier RH est moins d’être un chasseur de talents, mais plutôt un créateur d’expérience client via la satisfaction du collaborateur. Notre métier évolue, conséquence naturelle des modes plus agiles des organisations, moins figées que par le passé. Nous raisonnons plutôt par missions dans notre définition de l’emploi, ce qui exige une certaine souplesse du collaborateur, et une plus grande réactivité de l’employeur.

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