100 millions de brevets

IPIL

Dr Serge Quazzotti est le directeur de l’Institut de la Propriété Intellectuelle Luxembourg qui a été créé en 2014. Cela fait 22 ans qu’il travaille dans une structure dédiée à la protection de la créativité du pays. Rencontre avec un institut qui s’inscrit pleinement dans l’économie de l’immatériel.

Comment la propriété intellectuelle (P.I.) est organisée au Luxembourg?
Il y a essentiellement deux acteurs publics complémentaires que sont l’IPIL et l’Office de la Propriété Intellectuelle. L’OPI qui est intégré au ministère de l’Economie, est un outil législatif et procédural qui s’occupe, entre autres, des dossiers d’enregistrements. L’OPI compte huit collaborateurs alors que les bureaux de la P.I. en Europe ont généralement plus de 150 employés; il n’a pas les effectifs nécessaires pour exploiter par exemple les informations des bases de données brevets. Il fallait dès lors créer un acteur de terrain, plus flexible, dont la tâche est de sensibiliser et former les acteurs concernés. L’IPIL est un GIE dans lequel l’OPI du ministère de l’Economie, le ministère de la Recherche, le ministère des Finances (dont dépendent les douanes en charge des contrefaçons) mais aussi avec la Chambre de Commerce et la Chambre des Métiers, sont partenaires.

Quels peuvent-être les risques?
Cela fait une quinzaine d’années que la P.I. est d’une importance croissante. Les enjeux sont à la fois micro et macroéconomiques; les entreprises, les chercheurs et les artistes ont tout intérêt à protéger leur capital immatériel qui constitue de plus en plus le capital de l’économie européenne. Nous nous éloignons des grandes usines et des productions de masse; la créativité, nos recherches et nos inventions sont sur la scène internationale, nos capitaux immatériels. Cependant faut-il encore pouvoir protéger ces richesses de plus en plus de nature immatérielle.
L’enjeu au niveau européen est donc de préserver son savoir et connaissances, notamment face aux acteurs des autres régions du monde. Même si toutes les créations n’ont pas forcément vocation à être protégées, l’investissement européen alloué à la recherche et au développement ne doit pas permettre à d’autres continents de s’en approprier les fruits.
La P.I. concerne un grand nombre d’acteurs à Luxembourg, ministères, administrations publiques, agences, entreprises, industries, le monde de la recherche, l’éducation, les artistes et le grand public. Notre rôle n’est pas de dicter une conduite mais de coordonner des synergies, de fédérer les échanges d’informations et de développer des supports et services.
 
Justement, quel est votre rôle?
Nous avons quatre missions principales. La première est la coordination et la mise en œuvre de la politique publique de P.I. à Luxembourg qui est l’un des rôles les plus importants.
Deuxièmement, nous sensibilisons et formons les différents acteurs. Nous leurs expliquons ce qu’est la P.I., pourquoi elle est importante pour leurs activités, quels sont les premiers réflexes à développer et quelles sont les erreurs à éviter. Notre activité est donc en amont de celle des professionnels de la propriété intellectuelle. Le développement de synergies et la coopération avec les professionnels sont extrêmement importants et essentiels pour la réussite de notre mission.
Nôtre troisième mission est de mettre des services de support spécialisés à leurs disposition afin d’intégrer la P.I. dans leur stratégie d’entreprise. Cela fait surtout appel à notre compétence à exploiter les bases de données brevets et registres de la propriété industrielle.
Enfin, nous pouvons en cas de besoin mener des études pour le gouvernement, les ministères, les administrations publiques. Nous pouvons par exemple analyser les dépôts brevet réalisés par les acteurs luxembourgeois, afin de les comparer à d’autres pays ou régions et ainsi comprendre certaines spécificités luxembourgeoises.

Vous avez besoin pour cela de coopération…
Nous ne pourrions pas toucher autant de cibles en travaillant de manière isolée. C’est pourquoi nous entretenons des partenariats avec tous les acteurs. Cette année nous avons fait une grande conférence avec la contribution des acteurs de la recherche au Luxembourg, l’Uni.lu, le LIST, le LIH et le Fond National de la Recherche par exemple.
De plus, nous organisons ce mois-ci (octobre 2016), un cycle de quatre séminaires, à savoir « Les Afterworks de la Propriété Intellectuelle ». Le premier sera tenu à la Chambre de Commerce, le deuxième à l’Uni.lu et en coopération avec Luxinnovation, le troisième à la Chambre des Métiers et le dernier au Creative hub 1535°.
Ce n’est pas un hasard si nous sommes entourés de tous ces intervenants; c’est eux qui nous permettent de toucher les chercheurs, les entreprises, les artisans, les designers, et d’autres. La création de synergies est une pierre angulaire de notre stratégie.

Le grand public s’intéresse d’abord à la dimension littéraire et artistique de la P.I. …
C’est pour cela, que nous ne nous intéressons pas uniquement à la Propriété Industrielle, mais également à la partie littéraire et artistique, donc entre autre aux droits d’auteurs. Nous avons notamment prévu dans le futur, de développer ensemble avec tous les acteurs concernés, des campagnes d’information et de sensibilisation dans ce domaine. Ce sera important de travailler dans le futur aussi avec les écoles afin de pouvoir toucher les jeunes. C’est en assimilant le concept au plus jeune âge, qu’ils seront plus à même de l’appliquer dans leur future vie professionnelle.

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