Un besoin d'alternatives
«Le Luxembourg est un pays vert, l’élevage et la production de lait constituent donc les formes d’agriculture les plus aptes face à cette situation», dit Fernand Etgen, ministre de l’Agriculture, de la Viticulture et de la Protection des consommateurs. La production de denrées grâce à ce type d’agriculture est un pilier important du Luxembourg. Nous avons abordé avec le ministre Etgen des questions liées aux productions grand-ducales mais également aux normes mises en place par le gouvernement et l’Europe afin de garantir à la population une alimentation de qualité.
L’agriculture ne se résume pas à ses plantations
«L’agriculture au Luxembourg représente seulement 0,3% du PIB. Ce n’est pas beaucoup», déclare Fernand Etgen, ancien bourgmestre d’une commune rurale. Cependant, elle reste un pilier important du pays: elle est vectrice de produits de qualité pour les Luxembourgeois, et de façon directe et indirecte, elle crée de l’emploi. Comme le confirme le ministre, «pour une exploitation agricole, il y a cinq types d’emploi, c’est-à-dire que sur les 2.000 exploitants, ce sont plus de 10.000 emplois qui sont générés par l’agriculture». C’est en effet dans l’agroalimentaire, le secteur des transformations, l’entretien des machines et également dans des industries comme la production laitière ou animale que le Luxembourg a établi sa richesse de fabrication de denrées.
Des contrôles «de l’étable à la table»
Une richesse de production également parce qu’en tant que pays européen, le Grand-Duché est soumis à des règles très strictes. «Les producteurs doivent avant la mise sur le marché respecter une multitude de règlements qui établissent et définissent les normes en matière de sécurité alimentaire et de commercialisation», confirme le ministre. Il ajoute que la sécurité alimentaire au niveau des exploitations est notamment contrôlée par l’Administration des Services Techniques de l’Agriculture (ASTA), l’Administration des Services Vétérinaires (ASV) et l’Institut Viti-Vinicole (IVV) qui appliquent des standards de qualité, de santé, environnementaux et liés au bien-être animal.
La règlementation européenne exige également de connaître l’origine des viandes issues des différents élevages. «Chaque établissement du secteur alimentaire est responsable de l’application d’un système d’identification et d’enregistrement permettant la transmission des informations relatives à l’origine de la viande, aux exploitants intervenant aux stades ultérieurs de la production et de la distribution jusqu’au consommateur final», explique-t-il. De même que l’ensemble de la chaîne de production est contrôlée. «C’est un des aspects fondamentaux de l’agriculture européenne. Des normes de production et de contrôle sont établies de l’étable à la table, c’est-à-dire sur tout le chemin de commercialisation», ajoute Fernand Etgen.
Des importations nécessaires
Habitué à rencontrer le milieu rural en tant qu’ancien fils de cultivateur, il confirme: «L’agriculture assure un rôle-clé en matière d’approvisionnent du pays en denrées alimentaires». Néanmoins, cette production est bien sûr à l’échelle du pays, ce qui le contraint à importer le reste de l’alimentation, tout comme certaines céréales ou plantes destinées à alimenter nos élevages. C’est notamment le cas du soja. «A ce jour, le soja reste une source inégalée de protéine. Cependant, avec l’installation de mesures agro-environnementales, nous essayons de réduire au maximum la dépendance vis-à-vis de l’importation de soja», explique le ministre.
Le soja et d’autres céréales sont notamment à l’actualité pour le moment parce que des pesticides comme le glyphosate, potentiellement cancérigènes, sont utilisés lors de leur culture. Selon Fernand Etgen, « le manger bio » représente pour le moment une garantie pour éviter les pesticides. Il explique: «Le nombre de matières actives pouvant être utilisées pour les traitements phytopharmaceutiques en agriculture biologique est très faible par rapport au nombre total de substances autorisées en agriculture générale». En agriculture biologique, aucun produit herbicide n’est admis, malgré cela le bio est à la même enseigne que les autres cultures: cette alternative n’est en rien protégée contre la pollution atmosphérique ambiante.
Cependant à côté de ces cultures biologiques, des actions sont mises en place pour contrer les pesticides dans l’agriculture traditionnelle. Le Luxembourg s’est notamment abstenu de voter pour ou contre le renouvellement de la licence du glyphosate le 19 mai dernier. En faisant cela, il veut promouvoir l’interdiction du pesticide pour l’usage privé et veut également signaler à la Commission européenne le manque de transparence relatif aux études consacrées à ce problème. Le ministre Etgen a également introduit en avril dernier un « Plan d’action pesticides » visant à en réduire l’utilisation.
Des alternatives?
A ce stade, le glyphosate est fortement décrié mais d’autres pesticides sont potentiellement tout autant dangereux. Pour le ministre, il est temps de trouver des alternatives et pour cela, tout le monde est concerné. Les associations, par exemple, devraient davantage bousculer le politique en mettant au jour d’autres substances nocives, de même pour la dénonciation des OGM dont aucune loi n’interdit la commercialisation en Europe. Le citoyen, de son côté, à également sa part de responsabilité. «Chaque consommateur de par ses habitudes d’achats et de consommation influence largement les modes de production. Je lance un appel au consommateur pour soutenir l’agriculture luxembourgeoise en achetant des produits de qualité, de proximité et à être prêt à payer un prix équitable à nos agriculteurs», déclare-t-il.
Une part importante de ce travail reste aux mains des décideurs européens. Il ajoute qu’il est important que l’Europe se profile en tant que guide pour la sécurité alimentaire. «Il est nécessaire d’appliquer les standards les plus élevés possibles. Plus nous seront exigeants à cet égard, plus il sera difficile d’importer dans nos pays de la marchandise de moindre qualité», conclut-il. JuP