Les communes en phase de transition
La plupart des communes luxembourgeoises ont adhéré au Pacte Climat lancé par Marco Schank sous l’ancien gouvernement en septembre 2012. Quatre ans plus tard, il est temps d’en faire le point. Interview avec Paul Polfer, membre du conseil d’administration du Mouvement Ecologique et coordinateur de l’Alliance pour le climat au Luxembourg.
Que pouvez-vous nous dire à propos du Pacte Climat?
Il est d’abord important de différencier le Pacte Climat de l’Alliance pour le climat Luxembourg. Le Pacte Climat est une initiative du gouvernement précédent. Marco Schank, alors ministre délégué au Développement durable et aux Infrastructures, a décidé de créer ce pacte et d’y inclure une majorité de communes dans le but d’une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Bien auparavant, depuis 1995, le Mouvement Ecologique avec l’ASTM (Action Solidarité Tiers Monde) avaient formé l’Alliance pour le climat – Klima-Bündnis Luxembourg, dont 37 communes en sont maintenant membres.
Bien que les objectifs menés par ces deux initiatives ne soient pas opposés, il est important d’en faire la différence. L’Alliance pour le climat est un engagement volontaire des communes et il porte à la fois sur la protection du climat chez nous, mais également dans les pays du Sud pour soutenir les autochtones dans leur développement. Tandis que le Pacte Climat, en étant une initiative gouvernementale, permet aux communes participantes répondant aux objectifs d’engagement de recevoir des subsides et de l’aide logistique. C’était en effet une bonne idée de la part du gouvernement luxembourgeois. Cela permet d’élargir la base des communes qui travaillent pour la protection du climat et de libérer de l’argent pour des projets communaux, ce que le Mouvement Ecologique n’avait pas les moyens de faire. Néanmoins en perdant cette dimension plus globale qui apparait dans l’Alliance pour le climat. Comme disait Marco Schank lorsqu’il parlait du Pacte, «L’Alliance a mis la protection du climat dans la tête des gens et des communes, maintenant il faut passer à un stade plus large. Il faut aussi que le gouvernement aide ces communes».
Que pensez-vous du travail des communes?
Après ces premières années de fonctionnement, j’ai l’impression que les communes sont dans une phase charnière. Jusqu’ici elles ont pu rassembler toutes les actions et les décisions politiques passées qui vont dans le sens du Pacte Climat. Elles ont effectué un travail de collection de données, d’élaboration de stratégies et travaillé sur des concepts – énergétiques, de mobilité, etc. Pour de nombreuses localités vient maintenant une phase de réalisation. Je pense également que le Pacte Climat va commencer à devenir plus concret pour les citoyens.
Effectivement, pour les communes qui étaient déjà membres de l’Alliance pour le climat, le premier pas a toujours été de regarder ce qu’elles pouvaient faire en tant que commune, dans leurs infrastructures communales (assainissement énergétique de bâtiments, changement de l’éclairage public, création de voies cyclables, etc.). Ensuite, seulement la commune peut dire aux citoyens: «Nous, on a fait nos devoirs, on va vous montrer ce qu’on a fait et on veut vous inciter à aller dans cette direction». Par après, le secteur – mobilité, énergie, green building, etc. – dans lequel une commune veut agir en premier dépend de ses spécificités régionales.
Cependant, cette mise en action va également se heurter à des problèmes. Le travail des communes est maintenant de convaincre les habitants et les entreprises situées sur son territoire de l’importance d’utiliser, par exemple, des énergies renouvelables ou une mobilité douce. C’est un travail de longue haleine. Comme à chaque fois qu’un projet devient concret, c’est excitant mais on se confronte à la réalité du terrain et il y a pour cela des risques de frustration.
Que pensez-vous des Plans d’Aménagement Généraux (PAG) des communes?
Je pense que les aspects énergétiques et climatiques jusqu’ici, notamment dans le PAG, n’ont peut-être pas joué le rôle qu’il fallait, mais maintenant les choses sont en train de changer. Avec le processus de révision des PAG communaux, ces aspects sont beaucoup plus considérés qu’auparavant. Il y a cependant des questionnements intéressants, notamment avec les réseaux d’infrastructures. On peut se poser des questions telles que: «Est-ce économiquement viable d’investir dans des infrastructures (par exemple, le gaz) qui ne seront pas utilisées dans des quartiers de nouveaux bâtiments (maisons basse énergie)?» Le plus difficile c’est que dans chaque commune, on a de la mixité: de nouveaux quartiers comportant des maisons à basse consommation d’énergie et d’autres plus énergivores. Les localités vont donc dans la bonne direction même s’il leur reste beaucoup de travail à effectuer.
Comment le gouvernement pourrait-il continuer à soutenir les localités dans leurs démarches pour une diminution du CO2?
Je pense que le Pacte Climat ne s’arrêtera pas en 2020. J’ai du mal à imaginer que cet instrument s’arrêtera d’un jour à l’autre. Cela veut aussi dire qu’il doit évoluer. Les outils proposés par le gouvernement devront devenir de plus en plus concrets pour assister les communes dans leurs évolutions et besoins. JuP