«La terre est bleue comme une orange»

L’orange est bleuie quand elle moisit, cette comparaison de Paul Eluard est l’allégorie d’une nature polluée, produit des sociétés modernes.

De l’Antiquité à la fin du Moyen Age, l’«urbs» (la ville) est construite autour de lieux sacrés, les cités sont éminemment religieuses. Aux Temps Modernes, Louis XIV n’a de cesse de faire des villes des lieux militarisés. Ce n’est qu’au 19e que l’industrialisation entraîne une pollution à grande échelle; le béton prend le pas sur les verdures et les quartiers se construisent alors autour d’usines polluantes. Enfin, la deuxième moitié du 20e se caractérise par un mode de consommation débridé et peu soucieux des impacts environnementaux, adopté par les sociétés occidentales.

 

Alors que dire au Sénégalais qui ayant vu la mer engloutir des quartiers de Dakar, se présente à nos portes en tant que réfugié climatique? Car les chiffres ne trompent pas; avec un budget annuel de 942 euros dédié à sa consommation, un Africain ne saurait porter la responsabilité du réchauffement climatique. Il ne rejette qu’une tonne d’émission de CO2 annuelle lorsqu’un Européen en rejette 6,8. Le vieux continent a cependant misé sur des énergies renouvelables et le nucléaire (3/4 de l’énergie française) qui ne rejettent pas de CO2. Mais l’Europe a délocalisé son industrie en Chine, véritable usine du monde qui utilise le même charbon que nous avons utilisé un siècle durant et le citoyen chinois accuse 7,2 tonnes d’émissions CO2 par an. Mais le record revient au citoyen américain qui avec un budget de 51.502 euros consacré à de l’électro-ménager très gourmand en énergie et à de grosses voitures, elles aussi très gourmandes en pétrole (le parc automobile américain représente 40% des émissions CO2 des Etats-Unis) émet 16 tonnes de CO2. «Le mode de vie américain n’est pas négociable» disait Georges Bush, le 21 septembre 2005 à Kyoto. Si, il l’est!

 

Puisque 10 ans plus tard, c’est dans une ville meurtrie par la barbarie que 195 nations s’unissent autour d’un accord historique pour l’avenir de l’humanité. Il pose l’objectif de rester en deçà des 2°C, de limiter le réchauffement climatique à 1,5°C pour espérer une fin de siècle à zéro. Pour cela, un minimum de 100 milliards (qui seront revus à la hausse en 2025) sont sur la table afin d’aider les pays en voie de développement à se doter de productions énergétiques durables. Les investissements mondiaux dans les énergies renouvelables et les techniques vertes ont augmenté de 16% en 2014, cela représente 300 milliards qui seront doublés d’ici 2020. Mais cela n’est rien, comparé aux 4.700 milliards qui sont chaque année, encore investis dans les énergies fossiles.   JuB

Lire sur le même sujet: