Les Fonds face au digital et aux changements démographiques
Denise Voss, présidente de l’ALFI a ouvert la Global Distribution Conference, rassemblant les acteurs principaux du pays en matière de fonds, le 15 septembre dernier. Ce forum fut l’occasion de discuter des développements juridiques, réglementaires, économiques, politiques et technologiques du milieu, dans le cadre prestigieux de la Philarmonie. Une belle occasion d’interviewer la nouvelle présidente de l’Alfi – l’Association Luxembourgeoise des Fonds d’Investissement – sur le pourquoi d’un tel événement, et les défis qui émergent dans le milieu.
Madame Voss, vous-êtes présidente de l’ALFI depuis juin, pouvez-vous me dresser un court bilan de ces quelques premiers mois à la tête de l’institution?
Cette élection – et le changement de présidence qui a suivi – a d’abord été l’occasion de jeter un œil critique sur notre structure. Actuellement, notre organisation est composée de 150 groupes de travail, regroupés en plusieurs thèmes, équivalant à 1.500 personnes qui s’investissent pour l’institution.
La première tâche pour mon équipe et moi-même était donc d’analyser notre situation, de voir comment l’améliorer tout en respectant une continuité avec les politiques mises en place par Marc Saluzzi, mon prédécesseur. Notre pays est le plus grand centre de fonds en Europe et le deuxième plus grand centre de fonds dans le monde. En conséquence, nous devons régulièrement nous remettre en question et analyser quels sont les grands défis auxquels nous devront faire face dans le futur.
Je suis globalement satisfaite de ce que nous avons accompli ces derniers mois, au niveau de l’analyse de notre structure, mais également dans la réponse adaptée aux défis qui surviennent sur notre route.
Quels sont ces défis?
L’un des enjeux qui me tient à cœur est le digital. Cela concerne tout d’abord l’accès aux fonds d’investissement par le biais de plateformes en ligne, et en second lieu le soi-disant Big Data. Depuis la révolution numérique, les données se créent, s’amassent et s’accumulent. Elles doivent être gérées et sécurisées. Finance et technologie sont plus que jamais liées. Heureusement, le jeune domaine FinTech est soutenu par le gouvernement luxembourgeois. Nous souhaitons participer à cette dynamique. Nous désirons que les acteurs du pays se regroupent et travaillent ensemble pour trouver des solutions aux défis technologiques qui vont se présenter à nous, puis les mettent en place.
Se pose actuellement également un autre challenge: les changements démographiques. La moyenne d’âge de la population est de plus en plus élevée. D’ici quelque temps il y aura de moins en moins d’actifs dans nos régions. La vieillesse et un taux de remplacement trop bas vont mettre de plus en plus de pression sur les pensions versées par l’État. Inévitablement, les individus seront davantage responsables du financement de leur retraite. Notre but est de sensibiliser le public à ce défi, car notre rôle contient une grande part d’éducationnel. La population doit comprendre les mécanismes et enjeux de ce phénomène pour réaliser qu’il faut investir plus et plus tôt pour ses vieux jours.
A côté de ces deux défis majeurs et grandissants existent d’autres enjeux, peut-être plus superficiels mais qui posent tout de même question, tels que la recherche de talents. Etre gestionnaire de fonds d’investissement est une grosse responsabilité. Pour ces rôles, nous avons besoin de personnes expérimentées, qui connaissent bien le marché. L’idéal serait de pouvoir trouver ces individus ici, au Luxembourg, mais le pays manque de formation. Nous discutons actuellement, en collaboration avec le gouvernement et l’industrie bancaire, avec l’Université de Luxembourg, afin de déterminer ce qui pourrait être mis en œuvre à ce niveau.
Certaines conférences touchent à des zones géographiques précises, l’Asie et le Brésil notamment. Pourquoi ces régions en particulier?
Le dialogue avec ces régions fonctionne bien; elles sont très intéressées par les fonds luxembourgeois, et surtout nous y avons déjà beaucoup d’investisseurs. En outre, en Asie et en Amérique latine, la classe moyenne est de plus en plus étendue. Par exemple, 300 millions de chinois pourront être considérées comme tels en 2016. Ils ont donc plus d’argent à épargner et à investir: nous ne devons pas les ignorer. Nous sommes donc présents sur le terrain, régulièrement, car ces régions entières vont continuer à se développer économiquement.
Par ailleurs, le Brésil en particulier présente une belle opportunité actuellement. L’autorité de contrôle a mis en place une réforme qui sera effective en octobre et permettra à de nombreux investisseurs de placer leur argent en dehors de ses frontières, alors que le pays avait depuis longtemps un point de vue assez interne sur l’investissement.
De nombreux partenaires seront là pour vous épauler lors de cet événement. Quel est leur rôle?
Ils sont auditeurs, réviseurs, avocats,… et tous membres de l’Alfi. A travers cet événement, ils ont l’occasion de mettre en avant leurs produits et expertise. Ils nous soutiennent également financièrement, et nous leur en sommes très reconnaissants. Ils participent via des stands et une vingtaine nous sponsorise directement. N’oubliez pas que nous sommes une association. Nous sommes capables de faire ce que nous accomplissons aujourd’hui grâce à ce soutien. Durant ces deux journées, une trentaine d’exposants et une douzaine de spécialistes FinTech sont venus présenter leur savoir-faire. En ce qui concerne le public, les 700 personnes que nous avons enregistrées proviennent de 27 pays différents.
Pourquoi est-ce important d’organiser ce type d’événement? Quel sera le prochain?
L’ALFI Global Distribution Conference de mi-septembre permet aux acteurs du secteur de présenter leurs produits et solutions, au service de l’industrie de la gestion d’actifs. Ces deux jours de conférences ont divers buts. D’abord, nous débattons de ce qui se passe dans notre industrie, des défis, des règlementations, des nouveautés,… Ensuite, c’est également une occasion pour se recentrer sur nous-même. Entre nous, nous évoquons les grands enjeux qui nous concernent, tels que l’aspect digital et démographique. Par rapport au grand public, nous communiquons plus via la presse. Et pour les personnes venant de l’étranger, à peu près un tiers du public, nous expliquons ce que nous sommes et quelles sont nos activités. Troisièmement, pour les acteurs du milieu, nous offrons également la possibilité de faire du networking, de rencontrer des alter égos ou de potentiels partenaires.
Notre prochain événement, ALFI Leading Edge Conference: Product & Investors Taxation, aura lieu le 24 novembre. Outre cette conférence, nous organisons également la promotion de notre Road Show du début octobre. L’ALFI se rendra au Brésil, au Chili, au Pérou et en Colombie, afin de présenter l’étendue de l’offre en fonds de pension grand-ducaux. Nous souhaitons y véhiculer un message de sécurité, de crédibilité et de stabilité du pays et de ses fonds. Ensuite, en novembre, nous nous rendrons aux Etats-Unis, à San-Francisco, Chicago et New-York précisément. Enfin, en décembre, nous irons en Asie: à Tokyo, Taipei et Hong-Kong. Vous le constatez, le programme de cette fin 2015 est chargé. SoM