Stop aux bombardements massifs de civils
Lutter pour la protection des civils, venir en aide aux victimes des nombreux conflits mondiaux et agir dans l’urgence: les objectifs de Handicap International ne laisseront personne insensible. Alors que l’association a récemment été mobilisée à la suite du violent séisme qui a touché le Népal, un nouveau combat se profile à l’horizon: celui des bombardements massifs de civils. Interview de Martin Lagneau, directeur de Handicap International Luxembourg.
Vous lancez une campagne de mobilisation “Stop aux bombardements massifs de civils” au mois d’octobre. Pouvez-vous nous en dire plus?
Ce nouveau combat est un prolongement de nos actions contre les mines antipersonnel et les bombes à sous-munitions. Malgré l’interdiction de ce type d’armement grâce à des traités internationaux, nos équipes continuent de constater des blessures provoquées par ces armes. Désormais, nous observons une autre forme de barbarie à travers l’utilisation intensive d’armes explosives. En Syrie, 60% des nouveaux blessés le sont par des armes explosives. Cette tendance est démontrée par les faits dans les conflits récents et elle n’est pas anodine en termes d’impact sur les populations. Grenade, mortier, bombe, roquette: ces armes ont un rayon d’action important. Depuis les dernières années, on constate une accélération de l’utilisation de ces engins explosifs. Parmi les 150.000 victimes d’armes explosives, 78% sont des civils. Dans les villes et villages, le taux dépasse les 90% de victimes civiles. Plus de 100 pays sont concernés par leur utilisation.
Pourquoi ces armes explosives ont-elles un impact si important sur les populations civiles?
À cause de la grandeur de leur impact, mais aussi de leur imprécision. La plupart du temps, ce sont plusieurs bombes qui sont larguées en même temps. Conjuguez toutes ces caractéristiques et vous obtenez des dégâts incontrôlables. Lorsque ces civils sont au milieu de ces conflits, il est impossible de ne pas avoir de dégâts collatéraux. Outre le fait que ces explosifs blessent les civils, ils ont aussi un impact conséquent sur les hôpitaux, les écoles, les habitations, etc. Ces infrastructures sont vitales pour l’avenir de la population en temps de guerre. L’usage répétitif de ces bombes viole les principes du droit international humanitaire. À Handicap International, nous refusons de rester inactifs par rapport à ce constat. Pour ça, nous avons besoin d’un soutien politique, qui passe par une prise de conscience et un appel des citoyens à l’action. Notre campagne de mobilisation qui débutera le 14 septembre va dans ce sens.
En quoi consiste cette campagne?
Cette campagne sera un appel au public à signer massivement une pétition. C’est évidemment une campagne sur laquelle les acteurs de Handicap International vont plaidoyer auprès des politiques. Elle se terminera par notre traditionnelle Pyramide de chaussures sur la Place d’Armes. Cet événement sera entièrement accès sur cette problématique. Nous avons trois revendications: reconnaître la menace de ces armes explosives sur les populations civiles, s’engager publiquement à la régularisation de ces armes et travailler sur cette problématique sur le plan mondial. Si nous n’avons pas ce soutien aujourd’hui, il sera peut-être trop tard.
Quels sont les territoires sur lesquels Handicap International souhaiterait intervenir dans le cadre de cette lutte?
Globalement, nous espérons résoudre ce problème dans son ensemble. Il faut savoir que les pays comme la Syrie, l’Irak, Gaza ou l’Ukraine sont emblématiques. Ce sont sur ces territoires que nous avons le plus de personnel, là où nous obtenons le plus de témoignages et de constats. Nous sommes confrontés à la violence de la guerre et son impact sur les populations civiles. Mais il y a d’autres territoires, comme le Mali, l’Afghanistan ou même la Colombie. On ne parle pas seulement de bombardements aériens, mais aussi d’actions qui ont lieu directement au sol.
Quelles sont les principales difficultés rencontrées sur ces territoires?
Le premier constat de nos équipes concerne les civils qui présentent des blessures particulières. Nous avons un taux d’amputation qui atteint 25% de ces blessés. Le taux de mort est aussi important. Les bombardements systématiques causent aussi de violents traumas psychologiques chez ces personnes, peu importe leur âge. Nous offrons donc des soins et de l’appui psychologique afin de permettre aux gens de surmonter ça. Il y a aussi ces personnes qui errent de ville en ville. On compte environ quatre millions de réfugiés externes.
Pour cette nouvelle campagne, comment comptez-vous sensibiliser le public à cette problématique?
Pour la première fois, nous faisons clairement appel à la signature de pétition. Cette mobilisation du public est nécessaire. Évidemment, cette campagne sera déclinée sur plusieurs médias, à travers un spot qui passera au cinéma, sur Internet, mais aussi à travers la presse. Nous solliciterons les gens directement dans la rue ou dans les entreprises, ainsi que les lycéens. Nous avons aussi édité un journal gratuit qui sera largement diffusé. Ce journal expliquera la situation et contiendra un formulaire de pétition que les gens pourront nous retourner. Et puis il y aura cette campagne de sensibilisation des politiques, qui se fera dans l’ombre et qui pourra peut-être permettre de faire évoluer la situation. Mais rien n’est gagné.
Handicap International / Développement durable