La réglementation bancaire, toujours plus coûteuse
La réglementation est un sujet majeur d’intérêt et d’investissement pour le secteur financier. Le succès rencontré par l’étude menée conjointement par l’ABBL et EY Luxembourg en est la preuve. 46 banques sur les 150 que compte la place de Luxembourg ont pris la peine de remplir un questionnaire détaillé portant sur les coûts et investissements occasionnés par quatorze mesures réglementaires affectant le secteur bancaire.
La représentativité de l’échantillon est particulièrement bonne. Quelle que soit la dimension retenue: type d’activité, taille, total bilan, PNB (Produit Net Bancaire) ou nombre d’employés, le taux de couverture va de 37% à 50%. Cette forte participation est déjà un message en soi. Les banques sont clairement préoccupées par l’ampleur du poids de la réglementation sur leur activité et ont à cœur de le faire savoir. En extrapolant les chiffres reçus à l’ensemble de la place sur base des totaux bilantaires, ce sont 382 millions d’euros qui ont été dépensés par les banques en 2013 pour faire face aux différentes réglementations. Pour mettre en perspective ce chiffre, il représente un peu moins de 1% du PIB (Produit Intérieur Brut) du Luxembourg et 3,6% du PNB total de la place. En moyenne, la réglementation représente 41% des investissements effectués par les banques. La proportion atteint même 67% des investissements pour les établissements de plus petite taille, ce qui laisse peu de place pour investir dans le développement des affaires et l’amélioration des services. En tendance, les coûts réglementaires ont progressé de 20% par an sur les 4 dernières années. Il est à noter que ces chiffres ne prennent pas en compte les besoins en fonds propres occasionnés par certaines réglementations (EMIR (European Market Infrastructure Regulation)), CRD IV (Capital Requirements Directive). Sur un plan prospectif, les établissements participants ne voient pas une décrue des coûts réglementaires avant 2017. AML IV (Anti Money Laundering) et MiFID II (Markets in Financial Instruments Directive), notamment, concentreront les efforts du secteur dans les prochaines années. La part du réglementaire dans les effectifs est également considérable. Ce sont 9% des ressources humaines du secteur bancaire qui sont dédiées totalement au respect de la réglementation. Pour le segment des banques de petite taille, la proportion monte à 20% du personnel.
On voit ici que le coût requis pour opérer une banque de plein exercice a significativement augmenté. On peut légitimement se poser la question de la taille critique minimale requise pour fonctionner en tant que banque. Les plus petites structures sont également celles qui supportent le plus en local les coûts des différentes mesures réglementaires. Les six réglementations les plus coûteuses pour les banques sont, dans l’ordre décroissant : FATCA (Foreign Account Tax Compliance Act), EMIR, CRD IV, AIFMD (Alternative Investment Fund Managers’ Directive), SEPA (Single Euro Payments Area) et la Circulaire CSSF 12/552. Il est frappant de constater que l’initiative la plus coûteuse pour la place est le résultat d’une mesure fiscale américaine sans impact positif pour le secteur financier européen, ni pour ses clients. Enfin, cette étude nous a permis de recueillir l’opinion des banques sur les bénéfices retirés de la réglementation. Réglementation ne signifie pas uniquement coûts et contraintes. C’est finalement la Circulaire CSSF 12/552 qui recense le plus d’opinions favorables. Les banques saluent l’effort de synthèse et de simplification mené par la CSSF (Commission de Surveillance du Secteur Financier). A l’autre extrême, FATCA et EMIR arrivent en queue de classement. Le positionnement d’EMIR est surprenant, car son objectif premier est de renforcer la sécurité des transactions. Cette mesure paye sans doute le prix d’un net manque de clarté ressenti sur certaines dimensions.
Source : ABBL et EY Luxembourg // Photo © Copyright: eu2005.lu/Marcel Schmitz