Le succès de nos clients est notre vocation
La création ou la reprise d’une entreprise est une véritable épopée dans laquelle il convient de ne pas se lancer à l’aveuglette. Des bases solides et un accompagnement éclairé sont des conditions sine qua non à la réussite.
Interview de Florence Bastin et Marc Meyers, Partners à la Fiduciaire du Grand-Duché de Luxembourg.
Comment est née la Fiduciaire du Grand-Duché de Luxembourg?
FB: La Fiduciaire du Grand-Duché de Luxembourg -FLUX en abrégé-, que j’ai fondée en 2008, s’est bien développée ces dernières années. Ce développement était possible grâce à toute l’équipe talentueuse, qui compte désormais huit personnes, et à l’arrivée de Marc Meyers en tant que deuxième associé. Marc est bien connu dans le tissu économique luxembourgeois, ainsi que dans la profession. En effet, il est l’ancien président de l’Ordre des Experts-comptables et était associé de 2008 à 2011 au sein d’un Big Four responsable de la ligne de services dédiés aux PME. Nous avons débuté notre carrière ensemble au sein de Deloitte, il y a plus de quinze ans. Partageant les mêmes valeurs de travail assidu, nous avons appris à nous apprécier sur le plan professionnel et privé. Après quatre ans au service de JPMorgan Asset Management en tant que risk manager des fonds d’investissement, j’ai décidé en 2008, appuyée par l’enthousiasme de Marc, de fonder la Fiduciaire du Grand-Duché de Luxembourg. Pour moi, ceci avait un double objectif: développer mes ambitions professionnelles et pouvoir mener de front une vie professionnelle et une vie privée intense.
Quelles sont vos activités et comment vous répartissez-vous les tâches?
FB: Nos activités s’articulent autour de deux pôles: l’expertise comptable et fiscale, réalisée par FLUX, qui regroupe toutes les étapes de la vie d’une entreprise, de la création à la liquidation, en passant par la domiciliation et la révision d’entreprises, réalisée par l’entité ‘Luxembourgeoise d’Audit et de révision’ ou FLUX-AUDIT, qui est agréée auprès de la CSSF et s’occupe des activités réservées aux réviseurs agréés.
La palette de clients étant relativement large et bien diversifiée, la répartition des mandats est faite en fonction des affinités et compétences requises pour chaque client. Je m’occupe souvent des clients internationaux, dont des entreprises familiales et private equity, Marc conseille et assiste les PME, entrepreneurs et familles luxembourgeoises et étrangères. Les compétences complémentaires et la disponibilité de l’équipe de FLUX sont nos forces et permettent d’élaborer un ensemble de solutions adaptées et efficaces pour nos clients.
Quelles sont les problématiques de la création et de la reprise d’entreprise?
MM: La création d’entreprise est bien plus que la naissance d’une personne morale. C’est une aventure palpitante, un périple qui peut durer toute une vie et même se poursuivre au-delà, par le biais des générations suivantes. C’est un projet, un rêve, parfois une folie qui prend vie doucement ou très vite. C’est un bateau sur lequel on monte, on prend le vent et on part à la recherche d’horizons lointains. Il faut le manœuvrer le mieux possible avec une panoplie d’outils qu’il faut maîtriser pour éviter les écueils et arriver à bon port. Pour se lancer dans une aventure, il faut aimer prendre des risques, mais savoir les maîtriser le plus possible. Etre curieux dans le bon sens du terme, rester très flexible et vigilant pour saisir les opportunités qui passent. Etre capable de se projeter dans l’avenir et être patient: on ne peut pas toujours avoir tout immédiatement. Ne pas compter ses heures et gérer son stress et celui des autres, parfois. Se positionner en capitaine pour voir loin et pour aider chaque collaborateur à apprendre toujours et à créer une ambiance saine et motivante pour que chacun puisse s’épanouir et accepter que tout n’est pas toujours comme on l’anticipait. Il faut s’entourer de personnes compétentes et motivées. Il faut savoir retomber vite sur ses pieds. Bref, il faut une bonne dose de courage et une attitude positive sur ce que l’on fait.
Le repreneur, quant à lui, doit avoir d’excellentes capacités d’analyse, d’évaluation de la société (qualitatif, quantitatif et potentiel de croissance) et de synthèse, comprendre la société, son fonctionnement, les personnes clés et ses valeurs. Il va devoir agir sur de l’existant, ce qui est encore bien plus compliqué que de partir d’une page blanche. C’est comme rénover ou agrandir une maison, il faut être capable de voir ce qu’on peut faire avec ce qu’on a, le magnifier sans avoir peur de chambouler les acquis avec des conséquences à mesurer avant de se lancer. Les qualités du repreneur sont sensiblement les mêmes que celle du créateur avec sans doute encore plus de psychologie et d’intelligence émotionnelle à mobiliser en permanence.
Pouvez- vous citer quelques exemples de bonnes pratiques?
FB: Il n’y a pas de recette miracle mais il y a des pièges classiques à éviter. Certains éléments sont, à mon sens, fondamentaux mais ne sont certainement pas exhaustifs. Il faut avoir une idée clairement définie de ce qu’on veut mettre en place, se connaître et savoir ce qu’on veut, ce qu’on ne veut pas, les concessions qu’on est prêt à faire ou pas et pourquoi. Le projet doit se baser sur un concept innovant, différent, pour lequel on a des compétences hors pair et qui soit susceptible d’intéresser un grand nombre de gens ou bien sur un concept de niche avec une politique de prix élevée et capable de générer suffisamment de résultats sur un petit nombre de clients. Il y a des idées géniales mais pour lesquelles les sociétés ou le grand public ne sont pas prêts à payer. Il faut connaître le marché ou être en mesure de créer une demande qui finit par développer un marché. Le business sur Internet se développe grâce aux volumes qu’on peut en tirer. Une boutique vendant des produits exceptionnels située au mauvais endroit et pratiquant des tarifs mal étudiés est à coup sûr un échec avant d’avoir pu se rentabiliser. On doit avoir un plan de développement chiffré sur au minimum trois ans et qui s’utilise comme des balises de référence. Plus le plan est détaillé, réfléchi et précis, meilleure sera la prévision et l’analyse de rentabilité. Si ce n’est pas rentable, pas la peine de se lancer, ce sera une perte sèche. Je suis toujours choquée par les personnes qui croient que l’argent qui rentre dans une société (son chiffre d’affaires) est ce qu’elles ont gagné! Beaucoup oublient les impacts des TVA, CCSS et impôts en tout genre, ainsi que les innombrables charges qui viennent grever les résultats de l’entreprise. Les indicateurs de ratios que fournit la comptabilité sont autant de signes à utiliser, comprendre et interpréter avec sagesse et pertinence. Ils sont une aide précieuse à utiliser avec d’autres facteurs externes et internes à l’entreprise. Ils aident à rester vigilant. Un écart observé qui sort des zones de prévision doit être compris le plus rapidement possible afin de corriger le tir et de prendre des décisions de réalignement si nécessaire. Ce qui nous amène aussi à marteler l’importance d’une comptabilité régulièrement tenue dès la mise en route de la société. Des comptes annuels 2012 sortis en 2014 ne seront plus d’aucune utilité prévisionnelle et mettent la société en péril d’un point de vue légal. Il faut aussi avoir de la chance et croire en ses rêves. Je ne crois pas trop au hasard, mais on peut dire que celui qui ose et saisit les occasions va réussir plus que celui qui ne tente rien. Et, enfin, se prémunir avec un conseiller légal solide. Lorsque le créateur est seul, c’est sur lui que tout repose et que toutes les décisions sont actées. Lorsqu’il y a plusieurs actionnaires, il convient de se mettre d’accord et de l’écrire dans des statuts et contrats complémentaires. Au début, c’est comme une lune de miel, tout feu tout flamme et on ne se doute pas qu’un jour cela peut virer au vinaigre. Les Romains disaient: «Si tu veux la paix, prépare la guerre». Sans aller aussi loin, il faut être conscient qu’une divergence de vue entre actionnaires peut rendre la vie des parties et de la société impossible. Beaucoup de temps peut être gâché à des querelles qu’il vaut mieux évincer en cadenassant les statuts, clauses de reprise, pacte d’actionnaires dès le début.
A quelle étape du processus de création l’intervention d’un expert-comptable est-elle nécessaire?
MM: Le plus tôt possible, avant même de se lancer. Nous avons vu des chefs d’entreprises cherchant à se diversifier sur d’autres secteurs que nous avons découragés car l’aventure mènerait à coup sûr à la déconfiture. Nous avons un regard analytique, critique et détaché, ce qui nous permet de conseiller de manière objective ou, du moins, de susciter le débat et de mettre en balance certains éléments que le créateur n’aura peut-être pas identifiés comme importants.
La création d’une entreprise, bien que facilitée ces dernières années par les initiatives de la Chambre de Commerce, reste néanmoins un parcours du combattant semé d’embûches, d’obligations légales, fiscales et comptables qui peuvent en laisser plus d’un tétanisé et incapable de réfléchir sur l’évolution de son propre de business.
A chacun son métier. On peut faire sa comptabilité soi-même dans son coin, mais c’est risqué. Il faut rester continuellement attentif aux nouveautés et développements fiscaux, juridiques, économiques et comptables. La mauvaise maîtrise des lois et règlements peut avoir des conséquences catastrophiques. Nous voulons comprendre, lors du processus de création, les tenants et les aboutissants et nous suivons le développement de nos clients. Nous voulons entretenir un dialogue constant, être à leur disposition et les guider vers les choix les plus adaptés à leur situation.
Par quels moyens les instances publiques, en particulier les communes, peuvent-elles soutenir la création d’entreprises?
FB: En tant que femme, chef d’entreprise, mère de trois enfants, je constate que la création d’entreprises reste malheureusement l’apanage des hommes dans la plupart des cas. Vouloir être mère et chef d’entreprise peut offrir dans certains cas une plus grande flexibilité qu’un emploi salarié. C’est le cas si on travaille seul, mais devient totalement prenant lorsqu’on a plusieurs collaborateurs.
Le système d’éducation luxembourgeois doit évoluer dans les prochaines années. Devoir gérer le temps des enfants deux après-midi complètes par semaine est un challenge pour les femmes qui veulent travailler à temps plein ou comme pour les chefs d’entreprise. Car même si de plus en plus d’hommes accompagnent leurs enfants, ce sont dans la majorité des cas les femmes qui sacrifient leur carrière. Il est difficile d’expliquer à des clients qu’on est indisponible le mardi et le jeudi après-midi. Il y a bien sûr les maisons-relais et l’école qui aident déjà en partie.
Les communes, en étant proches des habitants doivent prendre en compte la mosaïque culturelle qui existe au Luxembourg et s’en servir comme d’un facteur d’intégration et de réduction des clivages sociaux. Pourquoi ne pas travailler dans le sens d’une cohésion sociale réelle orchestrée par le ministère de l’Education nationale, le ministère des Classes moyennes et du Tourisme et les communes à travers le sport, les activités créatives et musicales délivrées dans différentes langues le mardi et/ou le jeudi après-midi comme un prolongement de l’école mais qui ferait appel à des entreprises privées? A mon sens, cela remplirait trois objectifs fondamentaux: premièrement, une meilleure gestion du temps des parents, en grande partie otages des trajets à faire dans tous les sens. Ce qui, il faut le dire, n’a aucun intérêt et ne leur permet pas de passer du temps de qualité avec leurs enfants. Ils pourraient se consacrer à leur travail sans remords ou choisir de s’occuper de leurs enfants réellement ; deuxièmement, un certain nombre d’enfants seraient moins livrés à eux-mêmes devant la télévision ou s’adonneraient à des activités tout aussi abrutissantes. Les enfants pourraient choisir des activités culturelles et musicales, s’intégrer dans une équipe de sport, construire leur confiance en eux grâce à des matières différentes de l’école et bouger plus; troisièmement, le besoin de personnes compétentes dans ces matières (musiciens, artistes, sportifs, etc) peut aussi créer des vocations et des entreprises en partenariat avec les communes.