Changement de cap

Jean-Jacques Rommes s’apprête à tourner la page de trente années de carrière dans le monde de la finance pour rejoindre l’univers plus terre-à-terre des entreprises luxembourgeoises et défendre leur compétitivité économique. Un revirement qu’il vit plutôt comme une évolution logique.
 

Jean-Jacques Rommes n’a jamais eu d’idées préconçues quant au métier qu’il exercerait. Même si, depuis son enfance, il s’est toujours intéressé aux voitures, il n’imaginait pas en faire sa profession. C’est seulement au cours de ses études que lui est venue l’idée de faire son droit pour devenir avocat. Dans un premier temps par goût de la controverse qu’il croyait être intrinsèque au métier, plus tard pour la complexité de sa technique.

Cette profession d’avocat, il ne l’exercera finalement en tant que telle que pendant les six mois qui ont suivi son cursus universitaire à la faculté de droit de Nancy, lors du stage qu’il a effectué en vue de son assermentation au Luxembourg.

Avec une maîtrise en droit privé en poche, c’est à la BIL que Jean-Jacques Rommes fait ses armes. Dès sa première candidature, il décroche un emploi: « Mon expérience à cet égard est radicalement différente de celle que font les jeunes aujourd’hui et cela prouve bien à quel point le contexte économique a changé », commente-t-il. Il gravit un à un les échelons de la hiérarchie au sein du département juridique où il est successivement, entre 1983 et 1993, conseiller juridique, fondé de pouvoir, directeur du département juridique & fiscal puis sous-directeur de la banque.

Au cours de cette décennie passée à la BIL, Jean-Jacques Rommes travaille régulièrement pour l’ABBL et apprend à connaître les activités de l’association. La route est toute tracée: plus porté sur la théorie que sur le contact client et tenté par le fait d’intégrer une structure de taille plus modeste, il finit par rejoindre l’ABBL en tant que conseiller de direction d’abord, puis comme membre du comité de direction, et enfin comme directeur, poste qu’il occupe depuis 2004 et qu’il quittera en avril 2014.

Conduire l’exécutif de l’ABBL reste pour lui une tâche passionnante car, explique-t-il: «L’ABBL a de multiples facettes. Chacun la voit sous un angle différent: certains pensent que nous faisons du lobbying de techniques bancaires et financières, d’autres que nous représentons les intérêts des employeurs, d’autres encore que nous sommes une organisation quasi-politique. En réalité, l’ABBL est un peu touche-à-tout. D’autre part, la vision qu’en ont nos membres est différente de l’image publique qu’a l’association. C’est cette diversité qui constitue à la fois le défi et le grand intérêt de ce que je fais aujourd’hui». Il s’avoue, par ailleurs, fier d’être le chef d’une équipe dont les talents et compétences cumulés représentent une connaissance du terrain bancaire, financier, politique et des affaires sociales qu’il juge «impressionnante», voire «inégalée».

Pourtant, à 56 ans et après une belle carrière dans le secteur financier, Jean-Jacques Rommes quittera le navire au printemps prochain. Après quelques mois de transition, il rejoindra l’UEL, en tant qu’administrateur délégué. Il donne plusieurs raisons à cette évolution: «D’abord, le fait d’être à la tête de l’exécutif de l’ABBL est éprouvant. Et puis j’ai la conviction profonde qu’après dix ans au même poste, on a donné le meilleur. Je ne pense pas qu’on commence à innover et à réinventer le monde passé ce délai».
Par ailleurs, l’ABBL étant un des porteurs de l’UEL, Jean-Jacques Rommes y est déjà très engagé et ce, de longue date. C’est, selon ses dires, un travail qui lui est familier et qu’il aime beaucoup sans avoir eu le temps de s’y consacrer à suffisance; le fait qu’il brigue la tête du comité exécutif de l’UEL, au moment du départ de l’actuel directeur pour le maréchalat de la Cour et à l’heure de mettre en musique les idées nées de la réflexion sur la gouvernance interne entamée plusieurs mois auparavant, était donc tout naturel. Sa nomination au sein d’un triumvirat, composé également de Michel Wurth à la présidence et de Nicolas Henckes au secrétariat général, est publique depuis mi-juillet. «L’une de mes tâches, sinon la tâche essentielle que j’aurai à accomplir, sera de réussir l’intégration des travaux des deux chambres professionnelles et des fédérations qui forment ensemble l’UEL. L’UEL n’a cessé de progresser depuis sa création et nous voulons tous continuer à la rendre plus performante, dans l’intérêt des entreprises», précise-t-il quand on lui demande quel objectif il s’est fixé dans le cadre de ses nouvelles fonctions.

Outre l’UEL, Jean-Jacques Rommes est impliqué dans de nombreuses organisations professionnelles liées au secteur financier (Fondation de Luxembourg, Luxembourg School for Finance, LuxFlag, PROFIL, ASTF, Haut Comité de la Place financière, Conseil Economique et Social, fédération bancaire européenne), mais aussi dans quelques associations non-professionnelles (ensemble de la Chapelle St. Marc, institut Grand-Ducal, section des sciences morales et politiques, Rotary club), parmi lesquelles il devra sans doute faire un choix à l’avenir, même si toutes lui tiennent à cœur. Il a d’ores et déjà décidé de renoncer, pour des raisons de crédibilité, au séminaire de déontologie professionnelle européen dont il était en charge à l'Université du Luxembourg dans le cadre du Master Droit bancaire et financier. Mais il ne délaissera pas pour autant cette matière qui le fascine: «Je pourrais remplir une grande armoire avec la documentation dont je dispose. Je ne sais pas encore si je vais l’utiliser. J’aurais beaucoup à dire sur ce sujet, mais cela demanderait au moins une année sabbatique pour rassembler mes idées et je ne suis pas près de l’avoir», conclut cet homme très pris qui regrette de manquer de temps pour se plonger dans sa bibliothèque et d’avoir abandonné l’astronomie qui le passionnait naguère.  MT

 

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