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Une cinquantaine d’entrepreneurs et futurs entrepreneurs ont assisté, le 28 février, à une conférence sur le thème de la succession au sein des entreprises familiales. À l’instar de la Banque de Luxembourg qui organisait l’événement, les acteurs du secteur financier, avocats et autres sociétés de conseil, sont de plus en plus nombreux à se pencher sur cette question prometteuse. Les entreprises familiales représenteraient en effet quelque 70% des entreprises au Grand-Duché et emploieraient 40% des salariés, et le fait est qu’en ces temps de crise économique, avec une gestion réaliste et une vision à long terme, elles ont de quoi rassurer…
Les conclusions d’une étude réalisée entre 2010 et 2012 par l’école de management bruxelloise Ichec auprès de 277 jeunes issus de la génération montante ont été présentés par Valérie Denis, directrice de la chaire ‘familles en entreprises’. Ils confirment que les entreprises familiales constituent une valeur sûre.
Sept thèmes y ont été abordés, à commencer par la perception de l’entreprise familiale par la génération montante. Il en ressort que la majorité des interrogés a une vision optimiste de l’avenir économique de leur affaire et la voient toujours dans le giron familial d’ici cinq ans, même s’ils déclarent qu’ils apporteront quelques réformes à la gestion paternelle quand ils reprendront le flambeau. Qualité et satisfaction du client sont des valeurs qu’ils défendent de façon unanime, tout comme une bonne connaissance du métier, le suivi fidèle des clients, le respect des collaborateurs et la bonne gestion financière. Près de la moitié des futurs dirigeants estiment que les membres de la famille travaillant dans l’entreprise ont un bon équilibre de vie.
L’étude cherchait également à cerner leurs motivations à devenir entrepreneur. C’est l’autonomie qui est citée en premier lieu, suivie du souhait de réaliser une passion et de la poursuite de l’oeuvre familiale. Quant aux raisons qui les poussent à travailler dans l’entreprise familiale en particulier, il s’agit de la possibilité de gérer une entreprise, de la volonté de perpétuer l’entreprise familiale et de l’intérêt développé pour le secteur en le côtoyant au sein de la famille. Le fait de bien connaître les forces et faiblesses de la société, bref de savoir dans quelle aventure ils se lancent, est également mis en avant. Il est à noter que les 18-35 ans tirent en général une certaine fierté de leur appartenance à l’entreprise familiale.
L’équilibre entre vie familiale et vie professionnelle revient comme un fil conducteur tout au long de l’étude, particulièrement chez les filles. Il constitue à la fois une des plus grandes craintes des futurs dirigeants s’il n’est pas respecté et, dans le cas contraire, un des principaux avantages de la situation. La direction d’une entreprise familiale demande, en effet, souvent un investissement important en termes de temps, ce dont les personnes interrogées sont bien conscientes: 4 sur 10 seraient prêtes à travailler minimum 60 heures hebdomadaires. La même proportion a suivi des études dans l’objectif de cette reprise, mais trouverait utile de suivre une formation qui prépare à la gestion des entreprises familiales à proprement parler.
L’implication des parents a une influence sur l’envie de poursuivre l’œuvre familiale. Quand les parents sont actifs dans l’entreprise, les enfants se sentent plus encouragés à le faire.
Quand ce n’est pas le cas, la connaissance du métier et le sentiment de fierté sont moindres et la transmission est un thème qui n’est pas souvent abordé.
Il en va de même pour la taille de l’entreprise. Plus elle est grande et/ou ancienne, plus l’intérêt d’y jouer un rôle augmente et plus la notion de cohésion familiale est forte. Conséquence logique: la passation de témoin est mieux organisée dans les entreprises de plus de 50 salariés et à partir de la deuxième génération.
En conclusion, cette étude révèle les nombreuses convergences qui existent entre la génération sur le départ et celle qui est dans les starting blocks. Les mêmes valeurs et les mêmes facteurs de succès sont mises en avant: qualité, confiance, travail, respect et satisfaction du client, mais aussi croissance, rentabilité et vision à long terme. Le deuxième élément qui ressort est qu’une mauvaise communication intergénérationnelle concernant l’avenir est le principal frein principal à la transmission. La santé de l’entreprise tout comme la transmission sont des sujets qui sont abordés de manière plutôt informelle en famille. Plus d’un répondant sur quatre ne connaît pas la valeur du chiffre d’affaire de l’entreprise familiale et ne se renseigne pas à ce sujet. Cette indifférence s’explique par le fait que les fils et filles d’entrepreneurs familiaux ont d’abord un prénom à se faire tant dans l’entreprise qu’à l’extérieur et à déterminer leur chemin de vie hors de l’influence consciente ou inconsciente de leurs parents. Autrement dit, la mise, c’est l’entreprise, et l’enjeu, c’est devenir qui on est vraiment, et non l’inverse.