La recherche médicale intègre la pratique clinique au Luxembourg
La médecine personnalisée, c’est-à-dire des traitements adaptés aux besoins des patients, présente un espoir pour le traitement du cancer. C’est en ce sens que Dr. Guy Berchem examine l’utilité d’un diagnostic moléculaire dans le traitement du cancer du poumon au Luxembourg en collaboration avec IBBL (Integrated BioBank of Luxembourg).
Le cancer du poumon, cible prioritaire
Le cancer du poumon est la première cause mondiale de tous les décès associés à un cancer. Il est l’un des cancers les plus fréquents et malins au monde, et tue environ 170 personnes par an au Luxembourg. Parmi les malades diagnostiqués, seulement 15% ont une chance de survie supérieure à 10 ans. Tandis que le tabac reste un facteur de risque très important dans le développement de ce type de cancer, l’absence d’un test diagnostic adéquat et les faibles taux de réponse aux traitements traditionnels tels que la chimiothérapie ou la radiothérapie sont responsables de ce taux de décès élevé.
Dans un effort pour combattre ces statistiques effroyables, IBBL (Integrated BioBank of Luxembourg) soutient actuellement un projet de médecine personnalisée sur le cancer du poumon qui est supervisé par Dr Guy Berchem, oncologue au Centre Hospitalier de Luxembourg (CHL) et chef du laboratoire d’Hémato-Cancérologie au Centre de Recherche Public-Santé (CRP-Santé).
La biobanque IBBL, une organisation indépendante à but non-lucratif située à côté du CHL, a pour mission de faciliter le développement de ce type de recherche médicale de pointe et de contribuer à l'introduction de la future génération de soins de santé au Luxembourg.
La médecine personnalisée: des traitement adaptés aux patients
La médecine personnalisée représente une nouvelle vision des soins de santé où les patients reçoivent des traitements plus adaptés et plus efficaces.
L’avantage majeur de tels traitements ciblés est qu’on peut souvent éviter les effets secondaires dont souffrent habituellement les patients suivant les traitements classiques comme la chimiothérapie. Dr Berchem explique: «Il existe de nouveaux médicaments qui donnent des résultats très favorables, mais uniquement chez 5 à 10% des patients atteints d’un cancer du poumon. C’est pourquoi il est important de choisir le bon médicament pour chaque patient». Mais sur quelle base ce choix se fait-il?
Au cours de ces dernières années, les avancées de la recherche biomédicale ont permis d’identifier des modifications dans certaines molécules du cancer du poumon, qui résultent souvent de mutations ou amplifications de gènes. Ces molécules, également nommées “biomarqueurs“, peuvent non seulement servir de cibles thérapeutiques, mais également d’indicateurs de pronostic ou moniteurs de réponse aux traitements classiques. L’application de ces avancées dans la pratique clinique exige qu’une analyse moléculaire soit conduite sur les tissus tumoraux prélevés sur les patients, un diagnostic qui coûte environ 800 euros par patient et qui n’est actuellement pas effectué de façon routinière au Luxembourg.
Vers un meilleur traitement et dépistage du cancer du poumon
Le projet du diagnostic moléculaire représente la partie appliquée d’une étude internationale et de plus grande envergure sur le cancer du poumon, appelée “Luxembourg Lung Cancer Study“. Le but de cette étude est d’identifier des biomarqueurs qui pourraient servir de base pour le développement d’un test diagnostique permettant de mieux détecter et soigner la maladie.
Elle a été créée en 2009 dans le cadre d’une initiative gouvernementale visant à promouvoir une nouvelle ère de recherche médicale de qualité, à mettre à la disposition de la population la future génération de soins de santé et à diversifier l’économie à travers la création d’un secteur de biotechnologies au Grand-Duché.
IBBL est un élément important de cette initiative et soutient notamment la “Lung Cancer Study“, les études dérivées, et bien d’autres projets en collectant, stockant et mettant à la disposition des chercheurs des échantillons biologiques et les données cliniques associées.
Usage du diagnostic moléculaire en milieu clinique
En attendant les résultats de cette grande étude, Dr Berchem souhaite introduire une première mesure de médecine personnalisée dans la pratique clinique afin que certains patients volontaires puissent bénéficier immédiatement de traitements adaptés.
Ce projet de diagnostic moléculaire, initié en décembre 2011, comprend désormais 54 patients, Dr. Berchem est satisfait des progrès réalisés: «Des oncologues, pneumologues et chirurgiens thoraciques des cinq hôpitaux de Luxembourg travaillent ensemble sur ce projet».
Ces spécialistes identifient les patients susceptibles de bénéficier d’un diagnostic moléculaire et leur proposent alors de participer au projet. Il s’agit uniquement de patients volontaires atteints du cancer du poumon et devant subir une intervention chirurgicale ou une biopsie. Ces derniers signent un consentement éclairé qui les informe des modalités du projet et, une fois le consentement obtenu, IBBL organise la collecte et le stockage des échantillons de tissus prélevés sur ces patients lors de l’intervention chirurgicale.
Ces échantillons, prioritairement utilisés lors du diagnostic de pathologie, sont associés au rapport de pathologie qui en résulte ainsi qu’aux données cliniques lors de la collecte. Ces derniers sont alors anonymisés et envoyés à un laboratoire de diagnostic moléculaire certifié qui effectue une analyse de neuf biomarqueurs. Le résultat obtenu, comprenant une interprétation et une proposition thérapeutique, est enfin retourné aux médecins qui sélectionnent alors un traitement personnalisé et adapté à la tumeur du patient. Un suivi des patients permettra par la suite d’établir d’éventuelles corrélations entre l’analyse moléculaire, le choix du traitement et la réponse du patient.