«Nous pensons avoir touché le fond»
Le Commissariat aux Assurances vient de communiquer les chiffres de l’année 2011, dressant ainsi le bilan d’une année plus difficile pour le secteur assurantiel tout en évoquant l’espoir d’un rebond. Paul Hammelmann, administrateur délégué de l’Association des Compagnies d’Assurances du Grand-Duché complète et explique ce bilan après une brève redéfinition du rôle de l’association.
Pouvez-vous présenter et définir quels sont, au juste, les différents rôles de l’Association des Compagnies d’Assurances du Grand-Duché du Luxembourg (ACA)?
Créée en 1956, l’ACA est aujourd’hui présidée par Paul De Cooman. Les missions de l’association sont, bien entendu, à destination des assureurs, mais pas que. Travaillant à la défense des assureurs et constituant une véritable plateforme de discussions, l’ACA est également un médiateur. Nous intervenons, avec l’Union Luxembourgeoise des Consommateurs, dans les dossiers de particuliers sinistrés non satisfaits. Nous mettons à disposition des consommateurs une commission paritaire de médiation -moitié assureurs, moitié consommateurs-. Cette dernière est présidée, depuis peu, par l’ancien président du tribunal qui joue le rôle de tiers arbitre pour garantir toute neutralité.
Le Commissariat aux Assurances vient de publier les chiffres de l’année 2011. Ce bilan démontre une fois de plus que la crise blesse aussi le secteur de l’assurance. Plus concrètement, de quelles manières le secteur est-il touché?
D’une manière générale, nous devons quand même admettre que le secteur des assurances au Luxembourg à tout de même beaucoup moins souffert de la crise que d’autres. Cela pour la simple et bonne raison qu’aucune d’entre elles n’avait de titres grecs. Certaines avaient des titres italiens, mais elle les ont très rapidement revendus.
En début de crise, et ce, jusqu’à récemment, nous avons pu constater que l’assurance était devenue, en quelque sorte, une valeur de refuge. La confiance des investisseurs ou des clients envers la banque était moindre. Les gens ont eu davantage confiance dans les placements assureurs que bancaires, car ils étaient moins risqués. Depuis lors, le placement, en assurance-vie, auprès de l’assureur est devenue tout aussi, sinon plus rentable qu’auprès d’autres établissements financiers. Certains clients ont tout retiré de leurs banques pour tout confier à leurs assureurs qui leur promet un rendement fixe sur une durée plus longue. Ce qui est, au final, plus sûr, moins risqué, mais également plus profitable.
Pour autant, il ne faut pas dire que les assurances se sont substituées aux banques, c’est juste qu’elles ont su jouer leur rôle qui constitue à faire du social.
Cependant, nous constatons tout de même un certain recul, depuis peu. C’est le début de ce que nous appellerons le phénomène post-crise même si nous ne sommes pas encore dans une post-crise a proprement parlé. Le fait est qu’il y a moins d’argent disponible, tout simplement. Les gens dépensent, investissent moins parce qu’ils ont moins! C’est surtout le cas des particuliers, mais nous le constatons aussi auprès des entreprises: l’économie marche moins, donc le chiffre d’affaires est en baisse. Du coup, il n’y a plus besoin d’assurance.
Les chiffres du Commissariat aux Assurances nous montrent une régression en activité ‘vie’ en internationale, même au Luxembourg. Par contre, même au niveau local, l’activité ‘non-vie’ a quand même maintenue une légère croissance, nous sommes au total à 8% de progression. Mais il faut rappeler que le marché de ‘non-vie’ au Luxembourg concerne surtout le marché maritime. Or, ce marché ne clôture l’année qu’au mois de mars, donc nous n’avons pas tous les chiffres.
Malgré ce bilan un peu pessimiste, le Commissariat aux Assurances parle néanmoins d’un «retournement de tendance» pour 2012. Pouvez-vous nous éclairer sur les perspectives de l’année à venir?
Avant tout, nous espérons une reprise même si nous ne doutons pas que 2012 restera une année d’austérité car nous tenons à maintenir une gestion très rigoureuse et prudente en matière de frais et de prise de risques.
En ce qui concerne l’international vie, nous pensons avoir touché le fond, les chiffres devraient donc maintenant remonter, mais nul n’est prophète en son pays. Nous sommes tributaires des bourses, donc tant qu’elles iront mal, l’assurance ira mal.
Au niveau des grands dossiers 2012, il y a, bien sûr, Solvabilité 2, le nouveau système de comptabilisation et développement. Mais je ne m’étendrais pas davantage sur ce sujet qui est extrêmement technique.
Sinon, nous avons plusieurs gros dossiers en cours en ce qui concerne l’automobile, donc l’assurance non-vie: un meilleur respect du règlement grand-ducal en ce qui concerne les bonus/malus; une loi identique à la loi Badinter en France, visant à protéger les usagers dits «faibles» de la route: piétons, cyclistes, passagers de voiture.
Nous travaillons déjà de concert avec l’Institut de la Formation Bancaire pour notre formation d’insertion, où chaque nouvel employé du secteur reçoit une formation spécifique. Cette année, nous allons diversifier cette collaboration en créant des formations pour les 8 000 intermédiaires d’assurance qui devront passer un examen.
Enfin, bien évidemment, nous restons très attentifs au dossier des retraites sur lequel travaille le ministre de la Santé et de la Sécurité Sociale, Mars Di Bartolomeo.
En effet, nous savons que le système étatique actuel, avec la pyramide des âges, ne pourra pas fonctionner éternellement. C’est pourquoi, nous tenons à ce qu’il reste possible, au-delà du système étatique, de s’assurer auprès du privé, c’est-à-dire, de pouvoir rajouter à la retraite étatique, l’assurance complémentaire de l’employeur et enfin, l’achat d’une assurance privée. Les deux étant fiscalement déductible. Nous souhaiterions d’ailleurs que les taux de déductibilité soient un peu révisés. De plus, nous voulons aussi étendre le second moyen de s’assurer aux professions libérales et indépendantes.