La formation : un levier pour un retour durable à l’emploi

Isabelle Schlesser

Entre besoins du marché et projets individuels, l’ADEM adapte son offre de formation pour répondre aux enjeux de l’emploi au Luxembourg. Entretien avec Isabelle Schlesser, directrice.

 

Quels types de formations propose l’ADEM aux demandeurs d’emploi ?

Nos formations sont organisées selon plusieurs objectifs. Certaines sont sectorielles : elles visent un métier spécifique, comme les métiers de la logistique ou du bâtiment. D’autres sont transversales, comme les parcours en gestion de projet ou en compétences numériques, utiles dans de nombreux domaines.

Nous proposons également des options linguistiques, très demandées. Et puis, il y a ce que nous appelons les formations d’activation ou d’orientation. Il s’agit de modules plus personnalisés, s’organisant souvent sous la forme d’un coaching, qui aident à mieux définir un projet professionnel.

Nous avons aussi des cours destinés à ceux qui souhaitent créer leur entreprise, ainsi que des formations plus pratiques sur la recherche d’emploi : rédiger un CV, une lettre de motivation, se préparer à un entretien…

 

Comment identifiez-vous les formations prioritaires en lien avec le marché du travail ?

C’est une de nos missions centrales. Nous ne sommes pas un institut de formation, notre objectif est de favoriser un retour rapide et durable à l’emploi. Pour cela, il faut que l’offre colle aux besoins du marché.

Nous analysons nos propres données, notamment les offres d’emploi que nous recevons, pour comprendre quels métiers et quelles compétences sont recherchés. Nous travaillons également en étroite collaboration avec la Chambre de Commerce, la Chambre des Métiers, l’UEL et les fédérations patronales.

Les formations évoluent rapidement, en lien avec les besoins du marché

Mais il faut aussi que les profils des demandeurs d’emploi correspondent à ces besoins. Par exemple, la cybersécurité est un secteur en forte demande, mais il faut un certain bagage technique pour suivre ces formations. Donc, tout est une question d’adéquation entre le marché et les profils disponibles.

 

Les formations sont-elles accessibles à tous les demandeurs ?

Presque toutes nos formations comportent des critères d’éligibilité, mais ils varient selon les cas. Certaines exigent des compétences spécifiques (par exemple en digital ou en langues), d’autres un permis de conduire, d’autres encore sont réservées aux jeunes ou aux personnes de plus de 45 ans.

Pour les formations linguistiques en e-learning, nous procédons différemment : chaque mois, nous envoyons un courriel à tous les demandeurs d’emploi inscrits, avec les licences disponibles. Là, le critère est « premier arrivé, premier servi ». Mais attention : si la personne ne suit pas assidûment les cours, la licence est réattribuée.

 

Quelles sont les démarches pour accéder à ces formations ?

La voie classique passe par le conseiller référent de l’ADEM, qui discute avec le demandeur d’emploi pour identifier les formations utiles à son projet, mais de plus en plus, nous encourageons l’autonomie. L’inscription à certains parcours, notamment celles du Digital Learning Hub (DLH), se font en ligne. Il existe également l’aide à la formation professionnelle, qui permet à un demandeur d’emploi de suivre une formation externe, au Luxembourg ou à l’étranger, même si elle n’est pas organisée par l’ADEM. Cette aide est soumise à l’approbation du conseiller, qui s’assure que la formation a du sens par rapport au projet professionnel.

 

Les formations proposées sont-elles certifiantes ?

Certaines le sont, d’autres non. Nous essayons de plus en plus d’aller vers des certifications reconnues, car elles constituent une vraie plus-value pour les candidats. Parmi les formations qui permettent d’obtenir un tel avantage, nous proposons par exemple des parcours Google pour le digital ou en compliance et anti-blanchiment pour le secteur financier. D’autres options, comme la gestion de projet, peuvent aboutir à des certifications selon les méthodologies enseignées (type PRINCE2). Pour certaines, il n’y a qu’un certificat de présence mentionnant les heures suivies. Mais nous essayons toujours de proposer un document valorisable.

 

Et pour les personnes qui ont déjà une formation effectuée à l’étranger ?

La reconnaissance des diplômes étrangers ne relève pas de l’ADEM, mais de l’Éducation nationale. En revanche, nos certifications bénéficient d’une reconnaissance au niveau européen ou international (par exemple les niveaux de langue CECRL ou certaines certifications numériques).

 

Quels sont aujourd’hui les secteurs de l’emploi les plus convoités ?

La cybersécurité, bien sûr, mais aussi tout ce qui touche aux compétences digitales. Ces dernières sont devenues indispensables. Même s’il y a une hausse du chômage chez les informaticiens, cela ne contredit pas l’importance du digital : les profils doivent évoluer avec les besoins. La gestion de projet reste également une compétence très demandée dans de nombreux secteurs. Par ailleurs, les domaines liés à la transition écologique (construction durable, matériaux innovants, énergies renouvelables) sont en forte croissance. Le secteur social, notamment les soins aux personnes âgées, est aussi très demandeur, mais souvent avec des qualifications spécifiques. Enfin, nous développons également des formations de base autour de l’IA, en partenariat avec le DLH, pour comprendre comment utiliser les possibilités de cette technologie dans différents métiers.

 

Et pour les indépendants ou les personnes en reconversion ?

Un indépendant peut s’inscrire comme demandeur d’emploi, s’il est réellement en recherche d’emploi. En revanche, s’il souhaite simplement développer son activité, ce n’est plus de notre ressort : d’autres ministères peuvent proposer des aides à la formation continue.

Cela dit, nous aidons régulièrement des indépendants en reconversion. Par exemple, des coiffeurs qui perdent leur emploi peuvent suivre une formation en manucure pour élargir leurs compétences. Ce sont des parcours courts qui peuvent vraiment faire la différence pour retrouver un emploi.

 

Y a-t-il une limite au nombre de formations qu’un demandeur d’emploi peut suivre ?

Non, mais notre objectif reste l’emploi. Il faut que la formation ait un objectif professionnel clair. Les aides à la formation externe sont plafonnées, généralement à l’équivalent d’un mois de salaire social minimum (environ 2.600 euros), mais il est possible d’en faire plusieurs si le projet est cohérent.

Je recommande de consulter notre rapport annuel, qui détaille les formations organisées, les secteurs couverts, et donne de nombreux exemples concrets. Les formations évoluent rapidement, en lien avec les besoins du marché. L’important, c’est d’être proactif : en tant que demandeur d’emploi, vous pouvez faire des propositions et construire votre projet avec votre conseiller.

 

Par Frédéric Braun

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