1.136 panneaux pour de l’asphalte plus vert

À quelque 5 km du centre de Luxembourg, dans la zone industrielle de Leudelange, le soleil éclaire de ses rayons une nouvelle installation photovoltaïque de 2.220 m2. L’énergie qu’elle produit permettra de couvrir un tiers de la consommation électrique nécessaire au fonctionnement des centrales de l’entreprise Julien Cajot, spécialisée dans la production et l’application de bétons asphaltiques. Axel Burkel, directeur technique de la société, et Marko Pavkovic, responsable matériel, nous présentent cette infrastructure d’envergure, nichée à 18 m de haut, qui vient tout juste d’être branchée.

 

Une industrie circulaire

Entreprise familiale fondée en 1967 et désormais membre du groupe Félix Giorgetti, Julien Cajot est spécialisée dans la production et l’application de bétons asphaltiques – des revêtements bitumeux servant à recouvrir routes, trottoirs, parkings, pistes cyclables, cours d’école ou encore allées privées. Dans sa centrale de Leudelange, pierres, sable et bitume sont stockés, transformés et maintenus à haute température pour ensuite être transportés et mis en œuvre sur des chantiers de petite comme de grande envergure.

« À l’heure où le combat contre le changement climatique nous pousse à revoir nos modes de production et nos habitudes de consommation, il nous tient à cœur de souligner qu’une partie de nos produits sont issus de matériaux recyclés et recyclables à 100%. Chaque tonne d’asphalte que nous récupérons à l’issue du rabotage d’une route est ramenée à la centrale, chauffée et réinjectée dans nos nouveaux produits », indique Axel Burkel.

Si la filière peut donc prétendre aisément s’inscrire dans un système économique circulaire, le processus de fabrication des enrobés n’en demeure pas moins très énergivore. C’est pourquoi l’entreprise Julien Cajot vient tout juste de mettre en service une grande installation photovoltaïque pour verdir ses activités.

 

Une installation d’envergure

Fin mai, les premiers watts verts et produits localement sont venus alimenter les machines d’une entreprise qui avait anticipé leur arrivée il y a déjà quelques années. « À l’hiver 2017-2018, nous avons installé une toiture au-dessus de nos box de stockage afin de conserver tous nos matériaux au sec. Celle-ci avait été dimensionnée pour accueillir un jour une installation photovoltaïque. Transformateur, gaines, tout était prévu… En fin d’année dernière, nous n’avons eu qu’à apporter des modifications mineures pour préparer la pose des panneaux, comme ajouter un garde-corps », déclare le directeur technique.

Posées en novembre 2024, les cellules photovoltaïques ont été mises en service le 30 mai, à la faveur d’un long week-end. « Les branchements nécessitaient l’arrêt de l’ensemble de nos machines. Sachant que la remise à température des enrobés demande du temps, nous avons profité d’un jour férié pour procéder à la mise en service afin de perturber nos activités le moins possible en cette saison où nous tournons à plein régime », confie Marko Pavkovic.

 

Un tiers des besoins couvert

Avec ses 1.136 panneaux recouvrant une surface de 2.220 m2, l’installation devrait produire 500 kWc, soit entre 30 et 50% de la consommation électrique de l’entreprise. Cette énergie servira principalement à alimenter les quelque 230 moteurs électriques répartis sur l’ensemble du site. Rien que les deux centrales où sont préparés les enrobés en renferment 160 ; le tapis roulant qui parcourt le tunnel situé sous les silos de stockage pour y acheminer les matières premières est lui aussi équipé de plusieurs dizaines de moteurs tournant principalement en journée, aux heures où l’électricité verte peut être autoconsommée. « C’est principalement sur ce volet que nous avons pour l’instant la possibilité de réduire notre empreinte carbone. Le chauffage des enrobés, très énergivore lui aussi, se fait avec une flamme. Il existe actuellement peu d’alternatives au gaz ou au charbon », explique Axel Burkel.

« Quelques aménagements nous ont néanmoins permis d’optimiser le processus de chauffage au cours des dernières années. En 2018, nous avons équipé nos box de stockage d’une toiture – celle sur laquelle nous avons justement déposé nos panneaux photovoltaïques – pour maintenir au sec le sable et les pierres qui entrent dans la composition de nos produits. Une grande partie de l’énergie consommée précédemment servait à sécher ces matériaux. Aujourd’hui, grâce à cet abri et au tapis roulant qui les achemine à la centrale via un souterrain, plus une goutte de pluie ne vient les humidifier, ce qui engendre une économie d’énergie considérable. Cette machinerie, dont peu d’autres entreprises disposent, nous a également permis de nous passer de deux chargeurs d’une vingtaine de tonnes qui transportaient auparavant les matériaux sur site, à ciel ouvert, et ainsi d’économiser du carburant. Nous avons aussi équipé nos machines de production de capteurs qui mesurent la température du tambour, permettant d’éviter de chauffer plus que nécessaire », ajoute Marko Pavkovic.

 

Un secteur en transition

Désormais, au-delà de l’augmentation de la part de matériaux recyclés dans ses produits finis, seule la mobilisation de tout le secteur permettrait à l’entreprise d’aller plus loin dans la démarche. « Pour réduire davantage nos émissions, nous devrons nous équiper de nouvelles machines de mise en œuvre. Mi-avril, lors du salon Bauma de Munich, deux fournisseurs ont dévoilé des finisseurs de route électriques promettant une autonomie équivalente à 4h de pose, dans des conditions optimales. Si les performances annoncées ne nous convainquent pas encore, nul doute que les technologies évolueront et que nous pourrons prochainement nous équiper de machines électriques », estime le directeur technique.

Bien que les produits issus de cette industrie n’aient pas encore à faire la transparence sur leur empreinte carbone au Grand-Duché, cette préoccupation fait déjà partie des critères d’attribution de certains marchés publics à l’étranger. Julien Cajot a donc mandaté le bureau d’ingénieurs-conseils LSC360 pour calculer son empreinte carbone. D’ici quelques mois, l’entreprise sera donc à même de communiquer sur l’impact climatique d’une dizaine de ses produits. Une autre manière de montrer qu’elle prend les devants !

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