Le SIGI fait le point
Véritable partenaire informatique des communes luxembourgeoises, le SIGI s’inscrit aujourd’hui dans une dynamique différente. Une nouvelle équipe de direction a été mise en place en 2024 et nous avons rencontré son président : Philippe Meyers. Il nous a parlé des grands piliers stratégiques et des projets en cours pour 2025, entre autres.
Qu’est-ce que le SIGI ? Parlez-nous de ses missions et son fonctionnement…
Le SIGI est le Syndicat Intercommunal de Gestion Informatique dont la création remonte à une quarantaine d’années. À l’époque, sa mission était de mettre en place les premiers systèmes et réseaux informatiques dans le pays. Aujourd’hui, elle consiste à guider les communes luxembourgeoises sur la voie de la digitalisation. À cette fin, nous avons développé GESCOM, un outil de gestion communale, qui s’est évidemment élargi avec le temps et en fonction des besoins desdites communes.
Le SIGI est donc une structure intercommunale, soutenue et administrée par un comité regroupant 55 délégués représentant les 99 communes membres. En tant que président, je suis élu par ces représentants et ma mission consiste à définir les orientations stratégiques de l’organisation.
L’année 2024 a été marquée par des avancées stratégiques pour le SIGI. Quel bilan dressez-vous de cette année écoulée ?
En 2024, l’une des étapes clés a été la constitution et la mise en place d’une nouvelle équipe de direction. Ce changement a nécessité un temps d’adaptation pour définir une dynamique de travail commune, renforcer la cohésion interne et établir une relation de collaboration constructive avec le bureau. L’objectif était de poser les bases d’un fonctionnement efficace et pérenne. Nous avons également initié une discussion soutenue avec les ministères afin de solliciter une aide via l’attribution de subsides. Je retiens la qualité des échanges avec les communes et les administrations. Leurs retours d’expériences et leurs informations sont une matière précieuse qui ne manque pas de nous nourrir et cette collaboration porte déjà ses fruits. En effet, c’est ainsi que l’on développe des solutions pertinentes et qui répondent aux besoins.
Quelles sont les priorités du SIGI pour 2025 et jusqu’à la fin de votre mandat ?
Notre stratégie contient plusieurs grands piliers. Le premier est la réécriture de GESCOM dont l’architecture repose sur une plateforme Oracle maintenue depuis bientôt 20 ans. Le système fonctionne très bien mais doit être modernisé, c’est notre priorité absolue. Ce projet pluriannuel vient d’être lancé et nous mettons tout en œuvre pour atteindre une avancée significative d’ici la fin de mon mandat. Cette réécriture est essentielle pour assurer la modernisation et l’adaptation de GESCOM aux nouveaux enjeux communaux.
Nous voulons consolider la confiance et raviver un dialogue de proximité avec l’ensemble de nos partenaires institutionnels
Le second grand pilier c’est la mise à disposition de l’application Workflow, établie avec la commune d’Esch, à d’autres communes. Si GESCOM est un outil dédié à la gestion financière ou démographique, Workflow est quant à lui tourné vers la gestion et le partage documentaire à travers la création de dossiers et le suivi des séances et réunions. C’est une étape importante dans notre plan d’action en faveur de nos clients.
Enfin, le dernier pilier sera le rétablissement de la confiance avec les communes et les administrations membres. Par le passé, certaines de nos promesses n’ont pas abouti, mais nous sommes aujourd’hui dans une nouvelle dynamique. En démontrant des résultats concrets, réguliers et continus, nous voulons consolider la confiance et raviver un dialogue de proximité avec l’ensemble de nos partenaires institutionnels. La transparence et la constance dans l’action sont au cœur de cette démarche.
Voilà les grandes lignes de ma présidence qui s’achèvera en 2029. Cela peut sembler encore loin, mais je sais que cela passera très vite.
Comment percevez-vous la transformation numérique engagée par le SIGI ?
La transformation numérique que nous avons engagée est un projet d’envergure, structurant pour l’avenir du SIGI. Pour qu’elle soit pleinement réussie, plusieurs éléments essentiels doivent être réunis. Il nous faut tout d’abord disposer des bonnes compétences aux postes stratégiques, autrement dit poster les bonnes personnes aux endroits clés de l’organisation, pour impulser et piloter cette transformation. Deuxièmement, il faut renforcer nos effectifs, des recrutements sont en cours et se poursuivront encore à l’avenir. Enfin, une transformation de cette ampleur exige une planification minutieuse. Établir et respecter un retroplanning rigoureux est indispensable pour coordonner les différentes étapes et assurer une progression régulière et maîtrisée. Pour le SIGI, le challenge a toujours été de pouvoir répondre à des besoins très différents. Les attentes et les exigences des communes sont en effet très hétérogènes. Il y a autant d’impératifs que de communes et c’est à nous de pouvoir les satisfaire.
Avec le recul, quels enseignements tirez-vous des expériences passées et comment ces apprentissages orientent-ils vos décisions actuelles ?
En matière de gouvernance, il s’agit de faire preuve d’une écoute active des communes et de tous nos partenaires d’une part et d’autre part de gagner l’adhésion de chacun d’entre eux. C’est la condition sine qua non de la réussite. En outre, c’est une conséquence de cette bonne collaboration, nous veillerons à rester flexibles et réactifs. La capacité à nous remettre en question, à ajuster notre trajectoire rapidement, à expérimenter et à apprendre en continu est au cœur de notre démarche. Nous privilégions une approche agile qui nous permet d’adapter nos actions en fonction des réalités du terrain et de mieux anticiper les évolutions à venir. Et puis, je crois que c’est dans la mutualisation des expertises, dans la collaboration étroite avec tous les acteurs du marché, à l’instar de ce que nous avons initié avec la ville de Luxembourg, que naîtront les solutions les plus solides. J’en profite également pour remercier nos équipes, dont les compétences et la résilience nous permettent de traverser les défis, toujours dans la bonne humeur.
Comment le SIGI s’inscrit-il aujourd’hui dans l’écosystème technologique national, notamment en matière de partenariats et de collaboration avec les institutionnels ?
Le SIGI a permis de faire face à la digitalisation massive du pays qui a eu lieu ces 25 dernières années. Notre syndicat agit comme une interface entre toutes les communes et les ministères, afin de simplifier la mise en œuvre et l’application des décisions gouvernementales. Parmi ces institutions, citons le ministère des Affaires intérieures avec lequel nous menons des projets conjoints et assurons une coordination régulière pour aligner nos actions sur les besoins des communes et les orientations nationales.
Assurer la modernisation et l’adaptation de GESCOM aux nouveaux enjeux communaux
J’aimerais aussi évoquer notre collaboration avec le Centre des Technologies de l’Information de l’État (CTIE) qui vise à renforcer l’interopérabilité et l’harmonisation des services numériques destinés aux administrations publiques. Enfin, nous avons des échanges réguliers avec le Syvicol, afin de garder une vue globale sur toutes les communes et d’assurer un alignement avec les grands thèmes de la législature comme NIS2 par exemple.
Quel message souhaitez-vous adresser aux communes que vous accompagnez ?
Tout d’abord, je tiens à exprimer ma profonde gratitude aux communes pour leur fidélité, leur engagement et leur résilience face aux nombreux défis rencontrés ces dernières années. Leur confiance est essentielle pour nous, et nous leur en sommes pleinement reconnaissants. Nous restons constamment à l’écoute de leurs besoins et de leurs retours. Chaque suggestion, chaque remarque est précieuse pour nous permettre d’améliorer nos services et de mieux les accompagner dans leurs missions. Par ailleurs, j’encourage vivement les communes à participer activement à nos trois commissions consultatives, dont la plus importante est la commission micro-informatique. Leur implication est précieuse : qu’elles n’hésitent pas à s’inscrire ou à nous contacter pour contribuer directement aux réflexions et aux projets en cours.
Quel rôle le SIGI joue-t-il en matière de cybersécurité ?
Sur cette question, il faut bien distinguer deux dimensions. En ce qui concerne nos outils, comme GESCOM pour ne citer que le plus important, les communes s’y connectent via un VPN et, avec l’aide de nos experts, nous pouvons assurer une sécurisation complète du système et des échanges. Les communes, en revanche, disposent de leur propre équipement sur lequel nous n’avons aucun moyen d’accès et encore moins de contrôle ; et nous ne souhaitons d’ailleurs pas l’avoir. Nous les conseillons, sommes à leur disposition pour les aider, mais elles restent responsables de la sécurisation de leurs équipements et leurs réseaux informatiques.
À long terme, quelles perspectives se dessinent pour le SIGI ?
La stabilité économique et politique du Luxembourg sera un atout à l’avenir et le pays jouera sans doute un rôle important sur la question du numérique. On le voit avec l’intérêt croissant d’acteurs majeurs de la tech pour l’implantation de data centers au Luxembourg. Il reste cependant des défis à surmonter, je pense notamment à la pénurie des talents. Il faudra être attractif, faire venir les experts les plus compétents dans le pays, et ce depuis un périmètre géographique qui excède largement celui de la Grande Région. Le SIGI jouera évidemment un rôle important de ce point de vue. L’intelligence artificielle va bien évidemment changer la donne elle aussi. Elle sera un outil pertinent pour la mission qui est la nôtre, à condition de la considérer toujours comme une extension de notre propre intelligence et non comme un substitut à celle-ci.