Développer le biogaz au Luxembourg

Face aux défis climatiques et énergétiques et aux différentes crises géopolitiques, le biogaz a tendance à s’imposer comme l’une des solutions d’avenir au Luxembourg. L’association Biogasvereenegung joue un rôle central dans cette transition en mettant en avant des objectifs clairs pour développer le secteur. Pol Wagner, président, Claude Berscheid et Fabienne Thommes, membres de l’asbl, et Dr. Khadidja Chaib Draa, conseillère, partagent leur vision stratégique. Ils reviennent également sur les objectifs de l’association et les défis à surmonter pour consolider et maximiser l’impact d’une production de biogaz durable et intégrée dans l’économie locale et circulaire.

 

Promouvoir l’indépendance énergétique locale

L’un des objectifs majeurs de l’asbl Biogasvereenegung est de renforcer l’indépendance énergétique du Luxembourg. En encourageant la production de biogaz à partir de ressources locales, et notamment à travers le processus de la biométhanisation, l’association souhaite réduire la dépendance du pays aux énergies importées et à l’envolée des prix à la suite du conflit entre la Russie et l’Ukraine, par exemple. « Le biogaz est une énergie stable, produite localement, qui permet de diversifier nos sources énergétiques tout en valorisant les déchets agricoles », explique Pol Wagner, le président de l’asbl. À l’heure actuelle, cette énergie permet de chauffer environ 3.000 ménages au Luxembourg et produit 186 GWh d’énergie renouvelable « et nous n’en sommes encore qu’aux prémices de son plein potentiel à l’échelle nationale », poursuit-il.

Pour atteindre cet objectif, l’association travaille en étroite collaboration avec les agriculteurs afin de mettre en place des installations adaptées à leurs exploitations. Ces unités de production transforment les effluents agricoles et autres matières organiques en énergie qui contribue, in fine, à la création d’un cercle vertueux. « En somme, c’est la suite logique et l’étape finale de l’activité de l’agriculteur », indique Fabienne Thommes, membre de l’association.

 

Valoriser les effluents agricoles

En effet, transformer les déchets organiques en biogaz permet non seulement de produire de l’énergie renouvelable, mais aussi de réduire les émissions de gaz à effet de serre en évitant le recours aux engrais chimiques très énergivores et leur transport gourmand en CO2 jusqu’aux exploitations agricoles.

L’association participe à la Stratégie nationale pour le développement de la production de biogaz au Luxembourg que le gouvernement a mise en place récemment. « Les incitations financières jouent un rôle clé dans cette démarche grâce à la prime de lisier. Pour l’obtenir, il est nécessaire que 70% de la ration d’intrants dans l’installation soit constituée d’effluents d’élevage. Cependant, les exploitants qui valorisent jusqu’à 90% de ces effluents peuvent bénéficier de primes significatives », précise Dr. Khadidja Chaib Draa, conseillère référente. « Nous voulons montrer que le biogaz n’est pas seulement une solution énergétique, mais aussi un outil de développement rural qui contribue à la vie économique locale », poursuit-elle.

 

Communiquer avec les communes

Les communes, justement, ont un rôle à jouer dans le déploiement du biogaz. Elles peuvent fournir les producteurs avec leurs déchets liés à l’entretien des espaces verts par exemple. Les administrations locales mettent également à disposition des conteneurs spécialement conçus pour recevoir les résidus organiques de leurs citoyens. « Les installations de biogaz sont en mesure de valoriser ces déchets afin qu’ils ne soient pas brûlés ou compostés sans utiliser leur plein potentiel », indique Claude Berscheid.

Montrer que le biogaz n’est pas seulement une solution énergétique, mais aussi un outil de développement rural qui contribue à la vie économique locale

En outre, les communes peuvent aussi contribuer au développement des infrastructures nécessaires, qu’il s’agisse de renforcer le réseau de chaleur pour faciliter la distribution locale ou d’améliorer la disponibilité du réseau électrique pour accompagner les projets de biogaz.

« L’intérêt des communes pour notre ressource s’accroît d’année en année. Nous le constatons depuis le conflit russo-
ukrainien qui a renforcé l’envie d’acheter de la chaleur locale et renouvelable à prix moins onéreux. De plus, le biogaz permet de chauffer les bâtiments publics, tels que les écoles et les piscines, ou privés, comme les grandes surfaces ou tout simplement les maisons d’habitation. Il suffit d’être relié à un réseau de chaleur », explique Dr. Khadidja Chaib Draa. En plus, actuellement, trois installations sont en mesure d’injecter du biométhane sur l’ensemble du réseau public grand-ducal.

 

Accompagner les porteurs de projet

L’un des autres objectifs de l’asbl est de multiplier ces projets, petits ou grands, afin de renforcer la part du biogaz dans l’approvisionnement énergétique national. « Une fois purifié, le biométhane possède les mêmes propriétés que le gaz naturel, ce qui facilite son injection dans le réseau », explique Pol Wagner. L’association milite aussi pour la création d’infrastructures adaptées et pour une meilleure reconnaissance du biogaz comme ressource énergétique de premier plan. Cela passe notamment par des discussions régulières avec les autorités locales, les administrations publiques et les gestionnaires de réseaux.

Le président déplore néanmoins que la mise en place d’une installation, qui nécessite l’approbation de trois ministères, soit parfois complexe. « La surcharge administrative représente l’un des principaux freins au développement du biogaz au Luxembourg, mais nous proposons un accompagnement personnalisé pour aider les porteurs de projet à respecter les normes en vigueur et à sécuriser leurs installations ».

 

Assurer la formation et la sensibilisation

Parmi ses nombreuses activités, l’asbl Biogasvereenegung accorde une grande importance à la formation des acteurs du secteur. « Nous organisons des séminaires et des formations pour les agriculteurs qui désirent se lancer dans un tel projet. Ces sessions abordent des thématiques variées, allant de la biologie pour optimiser la production à la conformité réglementaire. La formation est essentielle pour garantir la pérennité des installations. Elle assure également la sécurité des opérations », souligne Fabienne Thommes.

Par ailleurs, les responsables de l’asbl mènent des actions de sensibilisation auprès du grand public et des décideurs politiques pour faire connaître les avantages du biogaz. « En somme, nous souhaitons créer un environnement favorable au développement de cette énergie renouvelable sur le territoire national », conclut Pol Wagner.

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