À Esch, la mobilité de demain est déjà en route
Si elles veulent faire participer les citoyens à la transition, que ce soit dans le domaine de la mobilité ou de l’énergie, les autorités locales doivent non seulement montrer l’exemple, mais aussi créer une offre alternative confortable et efficace. C’est là l’avis des responsables d’Esch-sur-Alzette. Christian Weis, bourgmestre, et Meris Šehović, député-échevin de la deuxième ville du pays, nous présentent les projets exemplaires entrepris par la commune pour inspirer ses citoyens et homologues politiques.
Administrer avec confiance et bon sens
Depuis sa nomination au poste de bourgmestre fin novembre dernier, Christian Weis a les rênes de la Ville d’Esch entre les mains et la volonté de l’administrer en bon père de famille à l’esprit. « Nous vivons une période où nous devons nous concentrer sur l’essentiel. Toutes les communes – quels que soient les partis à la manœuvre – doivent bien réfléchir à leurs investissements pour l’avenir, de manière à accélérer la transition énergétique et à accroître leur résilience. Il en va de notre bien-être, mais aussi de celui des générations futures. C’est pourquoi nous devons envisager l’avenir avec confiance – dans les opportunités qui s’offrent progressivement à nous – et, surtout, avec bon sens », estime-t-il.
Une mobilité durable et active
Celui qui est désormais à la tête d’une « grande entreprise de 1.450 employés et fonctionnaires qui œuvre pour que tout un chacun se sente bien à Esch » souhaite que sa ville se montre exemplaire pour ses citoyens et agisse en pionnière vis-à-vis des autres communes luxembourgeoises. En matière de mobilité, l’administration montre indéniablement l’exemple en encourageant ses collaborateurs à privilégier la mobilité douce pour leurs déplacements professionnels. Chacun, grâce à son badge, a la possibilité d’emprunter un Vël’OK, des bicyclettes en libre-service mises à disposition par le CIGL Esch et disponibles dans toute sa région. Et si le deux-roues n’est pas adapté, tous les employés communaux peuvent recourir à un service de carsharing mis en place par l’administration. ZAD, pour Zesummen Auto Deelen, est un système d’autopartage qui leur est strictement réservé. Mis en place en 2015 et récemment étendu, il a permis de réduire le nombre de véhicules utilisés par la commune et de promouvoir la mobilité électrique. « L’utilisation du service est très simple : l’employé réserve la voiture, la déverrouille avec son badge et y trouve la clé pour la démarrer. La flotte est composée de Renault Kangoo et Zoe. À mesure que nos véhicules doivent être remplacés, nous troquons les moteurs thermiques contre des modèles électriques. Les voitures sont utilisées de façon très régulière et donnent le goût de l’électrique à nos collaborateurs, moi le premier ! J’estime qu’on ne peut pas encourager la population à aller dans le sens de la transition sans le faire nous-mêmes », explique Christian Weis. La stratégie fonctionne puisque les citoyens recourent eux aussi de plus en plus à l’autopartage pour leurs déplacements privés. À tel point que quatre nouvelles stations de deux véhicules ont été inaugurées en juillet dans les quartiers Brill, Uecht, Bruch et Lalleng. De quoi proposer une réelle alternative à la voiture individuelle.
Le plan local de mobilité, qui devra être mis en œuvre pour 2035, mise sur la mobilité durable et active
Mais les efforts entrepris par l’administration s’inscrivent dans une politique de mobilité bien plus large, comme en témoignent les nouveaux projets de développement urbain qui y éclosent. Sur l’ancienne friche industrielle qui verra émerger le nouveau quartier Rout Lëns, par exemple, hors de question de laisser l’automobile régner en maître. La commune et ses partenaires d’IKO Real Estate entendent y créer un quartier innovant, durable et exemplaire, incluant les meilleures pratiques et technologies repérées à l’étranger. Le site, qui a la particularité d’être enclavé dans la ville plutôt que d’en agrandir le périmètre en périphérie comme c’est souvent le cas, dispose par exemple de tous les atouts pour se muer en quartier « du quart d’heure ». « Idéalement situé entre le quartier Brill et celui de la Grenz, Rout Lëns reliera n’importe quel point d’intérêt de la ville dans les quinze minutes à pied ou à vélo. Démarches administratives à l’Hôtel de Ville, shopping dans le centre, balade dans la nature : tout se fera en quelques minutes de marche. Pour ceux qui pédalent, Belval ne sera qu’à un quart d’heure à bicyclette. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé, lors de la planification du quartier, de faire la part belle à la mobilité douce. Les voitures seront concentrées dans des parkings mutualisés aux abords du site ou en souterrain pour laisser place aux piétons. C’est une question de bien-être : le trafic est un facteur de stress, en le mettant de côté, les habitants gagneront en tranquillité », souligne le bourgmestre.
Un choix pertinent sachant que le quartier a été pensé comme un lieu de vie (grâce auquel la Ville d’Esch doublera le nombre de logements de son parc locatif) et de loisir ; commerces et bureaux étant plutôt concentrés à Belval et, bientôt, à Metzeschmelz, autre projet de reconversion de friches industrielles en développement. L’émergence de ces nouveaux quartiers – et d’autres encore comme Nonnewisen ou le Crassier Terres Rouges – et les réflexions sur les connexions qui devraient les relier entre eux et au centre ont donné lieu à un plan local de mobilité. « Ce plan, qui devra être mis en œuvre pour 2035, mise sur la mobilité durable et active. Il repose notamment sur l’axe piétonnier « Rue de l’Alzette », des itinéraires cyclables express connectés au réseau local, deux nouvelles gares, une connexion au tram rapide vers Luxembourg-Ville, une extension du réseau de bus et l’optimisation du réseau routier étatique et urbain. Le but : pouvoir circuler aisément dans la ville et sa périphérie, et même au-delà grâce aux transports en commun », détaille Christian Weis.
Un moteur de la transition énergétique
« Cela fait des années que la Ville d’Esch mène une politique climatique à l’avant-garde pour le Grand-Duché. Il n’y a pas qu’en matière de mobilité que nous nous considérons comme des pionniers. La réduction du CO2 nous préoccupe de manière générale et nous œuvrons pour accroître l’usage des énergies vertes à tous les niveaux, notamment en développant fortement le parc photovoltaïque de la ville », poursuit le bourgmestre.
Affirmer qu’Esch est active en la matière est le moins qu’on puisse dire. Seule grande ville du pays certifiée « or » au Pacte Climat, elle est en passe de tripler sa production d’énergie solaire. « Toutes les toitures des bâtiments publics de la commune équipées de panneaux photovoltaïques génèrent aujourd’hui 1 MWc. Dans les deux ou trois années à venir, nous passerons à presque 3 MWc rien qu’avec les projets qui sont déjà en phase de réalisation ou d’étude. Nous continuerons sur cette lancée tout en envisageant des installations plus innovantes, avec la pose de panneaux photovoltaïques en façade par exemple. C’est grâce à ce genre de projets pilotes que nous espérons guider le reste du pays. En ce sens, nous comptons véritablement parmi les acteurs clés de la transition énergétique », indique Meris Šehović.
Cela fait des années que la Ville d’Esch mène une politique climatique à l’avant-garde pour le Grand-Duché
Cela est rendu possible par la situation unique dans laquelle se trouve la Ville d’Esch en tant que seul actionnaire d’un fournisseur d’électricité, Sudstroum. « La plupart des Eschois bénéficient de l’électricité 100% renouvelable de Sudstroum. Chaque Eschois client de la société contribue ainsi à la transition énergétique de la commune. C’est cette situation unique au Luxembourg qui nous a permis de tellement développer notre parc photovoltaïque », ajoute le député-échevin.
En plus de viser la production d’électricité verte, la commune mène une politique proactive en matière de chauffage. Tous ses bâtiments neufs ou rénovés recourent désormais à de la chaleur décarbonée. « Se défaire des énergies fossiles est un vrai défi pour une ville comme Esch qui est très dépendante du gaz. Dans les nouveaux quartiers en développement, par contre, nous misons plus facilement sur le renouvelable. À Nonnewisen, le réseau de chaleur urbain sera alimenté par la chaleur fatale issue du processus de production d’ArcelorMittal. Un déchet de l’industrie peut ainsi se transformer en opportunité pour la Ville », conclut Meris Šehović.