Schifflange, entre continuité et renouveau

Les élections communales ont rebattu les cartes dans la petite commune de Schifflange qui sera dirigée, entre 2023 et 2029, non pas par un, mais par deux bourgmestres successifs. C’est Paul Weimerskirch, qui retrouve temporairement ses fonctions, qui sera à la barre pour les deux prochaines années. Il nous présente dès lors les intentions du nouveau collège échevinal.

 

Le nouvel accord de coalition 2023-2029 contient une particularité puisqu’il prévoit la division du mandat de bourgmestre. D’ici deux ans, Carlo Feiereisen prendra votre succession. Pourquoi ce choix? Dans quel état d’esprit entamez-vous ce nouveau mandat?

Je suis très heureux de reprendre mes fonctions. J’aurais dû céder ma place au vu des résultats des élections, mais nos partenaires du LSAP m’ont proposé de conserver le poste de bourgmestre pour deux ans; j’en ai bien sûr été honoré. Le collège échevinal précédent a entrepris de nombreux projets lors du dernier mandat et j’aurai donc la chance d’aider à la finalisation des travaux qui ont été commencés. J’ai déjà beaucoup donné, mais j’ai encore des choses à apporter à mes concitoyens. Ma philosophie est de continuer à les soutenir. Cela se fera désormais avec une nouvelle équipe. Rizo Agovic et Carlo Feiereisen, les deux membres du LSAP qui en font désormais partie, ont chacun des qualités et compétences qui nous seront très utiles dans la réalisation des projets à venir. Nous bénéficierons également encore de l’expérience de député de mon collègue de parti Marc Spautz. Bien que je prenne la direction de la commune pour les deux prochaines années, le CSV respectera les idées de ses partenaires. Nous avons perdu un siège et il nous faudra donc travailler différemment.

 

Que pouvez-vous nous dire de votre programme de coalition?

Notre grand défi, comme pour bon nombre de communes, sera de maintenir des finances stables et résistantes aux crises

Je crois qu’il est dans la continuité de ce que nous avons réalisé ou du moins commencé au cours des six dernières années. Notre grand défi, comme pour bon nombre de communes, sera de maintenir des finances stables et résistantes aux crises. Ce mois-ci, nous procédons à des modifications budgétaires en vue de la préparation du nouveau budget. Nous devons engager quasiment 1,3 million d’euros de plus pour l’énergie et l’électricité. Tout étant devenu plus cher, nous nous devrons d’établir des priorités. C’est ce que nous affirmons dans notre programme de coalition et dans la déclaration du collège échevinal. Nos priorités devraient être la transformation du Moulin de Bestgen et de la maison A Kassen, la construction d’une école supplémentaire, d’un nouveau bâtiment pour la police, d’un parking sous-terrain (qui ne coûte pas les 11 millions d’euros prévus mais 15 millions), d’une nouvelle maison pour notre office social (dont le budget est passé de 2,3 millions à 4) et d’un immeuble mixte logements/commerces (la commune devra débourser plus de 15,6 millions quand le devis initial était de 11 millions). Tout cela avait été projeté par l’ancien collège échevinal. Nous devrons être attentifs à ce que l’on doit faire et à ce que l’on peut faire…

 

Avant les élections, vous affirmiez que les deux grands défis de votre commune étaient le logement et la mobilité. Que prévoit la nouvelle coalition pour remédier aux problématiques que vous rencontrez en la matière?

Notre marge de manœuvre est plutôt limitée au niveau du logement. C’est un dossier difficile car la commune, en principe, ne possède pas de terrains. 90% de ceux-ci sont dans les mains de propriétaires privés. C’est pourquoi confier une telle responsabilité aux communes me semble compliqué. Heureusement, le Pacte Logement 2.0 nous donne la possibilité de nous adjoindre à tout promoteur privé qui projetterait de construire des logements à Schifflange. Nous avons tout de même un grand projet en cours de réalisation: celui du quartier Metzeschmelz. Ce sont pas moins de 3.000 habitations qui seront construites sur un terrain qui s’étend sur les communes d’Esch-sur-Alzette et de Schifflange et qui permettront d’accueillir quelque 10.000 personnes. Les 10% du terrain nichés sur notre territoire accueilleront une cinquantaine de logements dont 30% seront à coût abordable. Nous disposons également de cinq autres parcelles où réaliser des habitations à coût modéré, mais cela s’avère difficile: en respectant les obligations contenues dans le règlement des bâtisses et les exigences environnementales, nous pouvons espérer construire une maison pour 700.000 euros, pas moins. Mais peut-on considérer ce montant comme étant abordable? Qui peut emprunter une telle somme aujourd’hui? C’est le grand problème! La commune a bien quelque 100 logements sociaux, mais la demande est nettement plus importante. Nous sommes conscients du problème et envisageons d’ailleurs de créer un nouveau service logement. Celui-ci assurera la gestion des immeubles de la commune et aidera à mieux coordonner la gestion administrative des dossiers et les demandes des citoyens pour des logements communaux. Enfin, nous entendons rénover et louer les trois maisons du Fonds du Logement depuis trop longtemps inhabitées. Les discussions sont en cours.

En ce qui concerne la mobilité, il nous reste peu de possibilités d’amélioration. Nous pouvons certes envisager de réaliser de nouvelles pistes cyclables, mais la commune est déjà bien desservie par les bus et le train. Les embouteillages qui se forment aux heures de pointe sont le seul véritable problème, mais je ne suis pas sûr que le ministère soutiendra le projet de contournement pour améliorer la situation quelques heures par jour uniquement. C’est pourquoi nous tentons de revoir le système de la mobilité au niveau de la région toute entière. Nous prévoirons par exemple des connexions au tram qui reliera prochainement Esch-sur-Alzette à Luxembourg-Ville, via des lignes de bus ou des pistes cyclables. Nous repenserons également la mobilité sur les autoroutes avec la liaison vers la France et celle vers le nouveau quartier Metzeschmelz. Ce sont des idées que nous avons déjà couchées sur papier, mais qui ne sont pas encore réellement abouties.

 

L’éducation et la culture font partie de vos attributions. Que prévoyez-vous à cet égard?

Je serais très heureux si nous pouvions finaliser les travaux de réorganisation des infrastructures scolaires et périscolaires. Commencé en 2018, ce projet de longue haleine devrait s’étendre sur dix ans. À l’époque, la commune comptait trois écoles et une maison relais. Sur les 1.100 élèves qui fréquentaient les établissements scolaires, seuls 250 à 300 enfants pouvaient bénéficier des services de cette dernière. Nous avons bien ouvert une centaine de places supplémentaires en érigeant un bâtiment modulaire, mais notre objectif, à terme, sera de décentraliser les services de la maison relais dans de nouveaux locaux rattachés aux écoles existantes. L’analyse de chacune des infrastructures a également révélé qu’une 4e école devrait voir le jour pour accueillir les 300 ou 400 enfants supplémentaires qui devraient habiter la commune dans les prochaines années. Ce nouvel établissement sera construit à côté de la maison relais actuelle. Dans le même temps, tous les bâtiments seront rénovés et réaménagés. Pour l’instant, l’école Lydie Schmit est en chantier et inaccessible aux élèves qui suivent momentanément leurs cours dans une infrastructure temporaire près de l’école Albert Wingert. Au terme de ce projet d’envergure, 90% des enfants devraient avoir la chance de bénéficier des services de la maison relais.

Nous voulons donner une vraie chance à la participation citoyenne

En ce qui concerne la culture, je dois dire que notre participation à Esch2022 nous a donné l’occasion de repenser complètement ce que nous faisions en la matière. Nous avions une galerie d’art dont la fréquentation était satisfaisante, mais nous l’avons déménagée et dotée d’une nouvelle philosophie en décidant d’y inviter uniquement des artistes vivant de leur travail. Bien qu’encore jeune, cette nouvelle galerie, dite «Schëfflenger Konschthaus», commence à se faire une place dans le milieu au Luxembourg.

En dehors du succès d’Esch2022 et des projets associés, la commune ne dispose pas de centre culturel à proprement parler, lacune à laquelle nous prévoyons de remédier. Un tel espace nous permettrait d’établir un programme culturel annuel comprenant des événements et manifestations diversifiés promouvant la culture au sens large et constituerait un point de rassemblement pour toutes les nationalités qui cohabitent à Schifflange.

 

 

Schifflange est connue pour son engagement en faveur de l’environnement. Que prévoyez-vous à ce sujet?

Bien que les verts aient quitté le collège échevinal, nous conservons la volonté d’être une commune de la durabilité. Schifflange était la première commune luxembourgeoise à se voir décerner le prix «Climate Star» et la première municipalité urbaine à recevoir l’European Energy Award «Gold». Nous réalisons d’ailleurs notre troisième audit dans ce cadre, ce qui nous laisse la chance de faire le point sur les dossiers liés à la protection de l’environnement et éventuellement de repenser ce qui doit l’être.

 

 

En août, vous avez invité la population à participer activement aux commissions consultatives et groupes de travail communaux. Comment a-t-elle réagi à cet appel? Qu’attendez-vous des volontaires?

Les habitants se sont montrés enthousiastes. Nous avons reçu plus de candidatures que de places disponibles, nous allons donc devoir procéder à un tirage au sort. Nous attendons des citoyens choisis qu’ils s’impliquent dans la vie de la commune. Nous voulons donner une vraie chance à la participation citoyenne, c’est pourquoi nous avons offert à ceux qui ne sont pas engagés en politique une opportunité de prendre part à des commissions consultatives consacrées à diverses matières: la culture, le sport, la jeunesse, l’initiative Design4All, etc. En outre, nous avons mis sur pied une «commission des citoyens» au sein de laquelle siègent un délégué de chaque parti politique et huit membres de la société civile (qui sont donc majoritaires). Cet organe discute de toute question qu’il juge nécessaire, qu’il s’agisse des services communaux, des infrastructures, etc. La participation citoyenne nous tient à cœur. Que nous travaillions sur de petits ou de grands projets, nous invitons presque systématiquement les habitants à des réunions d’information et des discussions. Tout cela a déjà été expérimenté lors du mandat précédent. L’expérience s’étant révélée positive, nous poursuivrons sur cette lancée.

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