Le secteur public à l’épreuve du 21e siècle

Que ce soit à l’échelle nationale ou locale, le secteur public devra participer à l’éclosion d’une stratégie de développement en adéquation avec les scénarios d’avenir plausibles et apprendre à cultiver le changement avec agilité et motivation. Pierre-Jean Forrer, Partner, Public Sector Leader, et Sophie Jakobs, Manager chez EY, nous livrent leur regard sur les perspectives du Luxembourg à l’horizon 2050 et sur les transformations nécessaires au maintien de son attractivité.

 

Des défis clairement identifiés, des priorités à fixer

Particulièrement fécond en cette année électorale, le débat politique fait émerger, depuis plusieurs années déjà, diverses problématiques qui mettent le secteur public au défi. «Toutes les sensibilités politiques s’accordent à dire qu’il est nécessaire de mobiliser d’importants moyens pour anticiper les challenges démographiques qui se profilent et répondre aux enjeux climatiques (réduction des émissions selon les objectifs fixés pour 2030 et 2050, organisation d’une économie circulaire…) et sociaux relatifs au logement ou à l’immigration. L’idée selon laquelle le Luxembourg doit trouver de nouveaux relais de croissance – non pas que le secteur financier s’essouffle, mais pour ne pas demeurer trop dépendant de celui-ci – est elle aussi largement admise. En parallèle, le secteur public est confronté à des problématiques plus politisées, comme celle de la fiscalité, qu’elle soit individuelle, des entreprises, foncière ou écologique. Tous les partis sont conscients de ces différents enjeux; les résultats des élections récentes et à venir n’influenceront donc que leur hiérarchisation. Le cap, lui, est assez clair», introduit Pierre-Jean Forrer.

 

De l’importance de la prospective stratégique

Pour relever ces défis d’avenir, la future coalition pourra se reposer sur les conclusions du projet ECO2050 mené par Luxembourg Stratégie qui devrait présenter sa vision de l’économie grand-ducale à l’horizon 2050 juste avant les législatives. En attendant de mettre un point final à son exercice de prospective stratégique, le ministère de l’Économie a récemment dévoilé une ébauche de ses résultats au grand public. «Les travaux qui ont été menés ont mis en évidence dix briques stratégiques majeures qui permettront d’orienter avantageusement l’économie nationale quel que soit le scénario d’avenir qui se dégagera. Reste aux acteurs politiques, administratifs et de la société civile à assembler ces briques de manière à construire les différents composants dont le Luxembourg a besoin pour maintenir ses équilibres, satisfaire les citoyens et les entreprises et demeurer attractif à l’échelle internationale. Les pistes identifiées sont plutôt intéressantes et nous saluons le fait que la recherche de la sobriété en fasse partie. L’autre élément qui nous semble important concerne l’équilibre des finances publiques. Le maintenir permettra de continuer à investir et de sauvegarder le modèle social, bien que des challenges se dessinent déjà, notamment par rapport à la question des retraites. La direction de prospective stratégique a également identifié, à juste titre, l’adaptation de la santé aux nouveaux défis comme opportunité économique. Le Luxembourg est aujourd’hui à la recherche de nouveaux pôles de développement et la santé est un des secteurs dans lesquels les décideurs fondent beaucoup d’espoirs, au même titre que celui des fintechs, des technologies vertes ou de l’industrie spatiale. Tous ces segments devraient animer de nouvelles motivations et offrir de nouvelles perspectives au Grand-Duché. De quoi améliorer l’autonomie stratégique du pays et renouveler la production nationale, ce qu’encourage aussi Luxembourg Stratégie», relève Pierre-Jean Forrer.

Tous les partis sont conscients des différents enjeux; les résultats des élections n’influenceront donc que leur hiérarchisation. Le cap, lui, est assez clair

«Parmi toutes les briques identifiées, celle qui me semble véritablement primordiale concerne la simplification des procédures, le raccourcissement des chemins et la facilitation des transmissions. Garantir l’accès aux informations à chacun participe à l’inclusion de toute la société et permet de faire grandir le pays tous ensemble et pas seulement à quelques-uns. Luxembourg Stratégie suggère également avec raison de placer les jeunes et les savoirs au cœur de l’économie. Le sujet de l’éducation est fondamental. Aujourd’hui, le Grand-Duché est confronté à une pénurie de talents dans certains domaines, notamment l’informatique. Or, la digitalisation du pays et du secteur public est une priorité nationale. Il faut donc que les jeunes se voient offrir les cursus adéquats afin de développer les compétences nécessaires au monde du travail de demain», ajoute Sophie Jakobs.

Le Luxembourg a toutefois intérêt à renouveler les modèles sur lesquels se basent ses simulations afin de représenter ses perspectives économiques avec davantage de justesse. «Les modèles existants doivent évoluer sur énormément de nouveaux sujets pour appréhender la croissance démographique, le coût du vieillissement, l’utilisation de la terre, de l’eau potable ou encore l’impact des investissements qui devront être consacrés à l’atteinte de nos objectifs climatiques si nous voulons qu’ils demeurent cohérents à long terme», souligne Pierre-Jean Forrer.

 

Du macro au micro

Si la plus grande part des décisions est prise au niveau des ministères et des administrations étatiques, les élus et fonctionnaires locaux sont des relais cruciaux dans la transformation du pays. «De nombreux sujets sont en gestation au niveau du ministère de l’Intérieur, dont dépendent les communes, notamment avec la mise en œuvre des mesures associées aux pactes Climat, Nature et Logement. Or, toutes ces communes sont plus ou moins isolées, malgré quelques tentatives de fédérer certaines ressources. Des regroupements comme on en observe dans d’autres pays seraient peut-être souhaitables, mais je pense que le niveau communal reste la courroie de transmission qui doit permettre de déployer de façon efficace toutes les politiques nationales», indique Pierre-Jean Forrer.

Le secteur public luxembourgeois devra se préparer et anticiper de nombreux changements à venir

Ainsi, à tous les niveaux, le secteur public luxembourgeois devra se préparer et anticiper de nombreux changements à venir, le tout avec agilité et motivation. De grands travaux législatifs seront nécessaires, ainsi que les études d’impacts associées, et d’importants projets pragmatiques devront être lancés pour que le pays conserve son attractivité. «S’il veut continuer de séduire et d’attirer les talents, le Grand-Duché devra se diversifier et offrir un environnement de travail innovant et ouvert aux nouvelles idées. C’est en se nourrissant de la créativité de talents locaux et internationaux que ce petit pays s’est taillé une place relativement importante en Europe et, selon moi, il doit poursuivre cette stratégie», affirme Sophie Jakobs.

Plutôt que de naviguer à vue face à ces vagues de changement, les administrations du secteur public peuvent bénéficier de diverses formes d’accompagnement de la part du cabinet de conseil. «Au sein d’EY, nous accompagnons le secteur public dans la recherche de financements publics/privés, la réalisation d’études d’impact et assistons les administrations dans leurs projets de transformation technologique. Nous prodiguons également des conseils en matière d’IT Strategy et offrons des services de Business Process Management qui permettent aux organisations d’optimiser leurs processus pour les rendre plus fluides, transparents et éliminer les redondances afin que leurs collaborateurs puissent se consacrer davantage à leur cœur de métier», conclut Sophie Jakobs.

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