Viabilisation exemplaire en matière d’économie circulaire pour le futur quartier «An der Schmëtt»

Soucieux de limiter la consommation des matières premières et la production de déchets, le Fonds du Logement intègre de plus en plus l’économie circulaire dans l’élaboration de ses projets. L’approche, particulièrement pertinente sur des chantiers d’une certaine envergure, a été explorée dans la conception du futur quartier An der Schmëtt, à Wecker. Études, traitement des matériaux in situ, réutilisation sur site… Amélie Vill et Steve Majerus, respectivement chef de projet et chargé d’opérations au Fonds du Logement, Isabel Rohr, adjointe à la direction chez RUK Gruppe Luxemburg, Frederik Hohl, directeur de projet chez Géoconseils, et Michel Kramp, coordinateur de service IVRD chez Luxplan, nous éclairent sur les différentes phases de planification et de réalisation du projet.

 

Élaboré en 2005 puis révisé à partir de 2017, le PAP An der Schmëtt a finalement été approuvé en 2020. Porté par le Fonds du Logement, ce nouveau quartier d’une surface brute de 8 ha situé à Wecker, dans la commune de Biwer, comptera 164 nouveaux logements d’ici 2028. De par sa nature et son ampleur, le projet se prête tout particulièrement, aux yeux du Fonds, à une approche circulaire. «Le futur quartier An der Schmëtt devra voir le jour sur le site de l’ancienne cité Syrdall, répertorié dans le cadastre des sites potentiellement pollués. Après avoir effectué les premiers diagnostics et quelques recherches sur les matériaux présents en masse sur place, nous nous sommes demandé comment les réutiliser ou les recycler pour éviter leur élimination en décharge», révèle Amélie Vill.

 

Dépolluer et assainir le site…

Les investigations sur le terrain, confiées à RUK Gruppe Luxemburg, ont révélé que les infrastructures existantes étaient effectivement polluées à différents degrés. «Nous avons dû nous débarrasser de l’asphalte que nous avons classé comme déchet dangereux en raison de la concentration de polluants qu’il contenait. La couche de matériaux directement inférieure ayant été légèrement contaminée par l’asphalte, nous l’avons confiée à une société de traitement de sol afin qu’elle puisse être utilisée ou revendue comme matière première après nettoyage. Enfin, une partie de la substructure non contaminée a pu être réutilisée sur le site. Pour ce faire, nous avons établi une zone de stockage temporaire où nous l’avons conservée puis concassée. Nous pouvons désormais l’utiliser pour construire les nouvelles infrastructures. Au total, 4.400 tonnes de matériaux ont été acheminées vers une société de traitement et 6.300 autres ont été réutilisées sur site directement», explique Isabel Rohr.

 

… pour accueillir les nouvelles infrastructures

En janvier 2022, les équipes chargées des travaux d’infrastructure se sont donc vues confier un terrain vierge et assaini, prêt à être remodelé. «Les réseaux, la voirie, plus rien ne suivra le tracé des anciennes infrastructures. De nombreux mouvements de terre ont donc été programmés dans l’étude, avec une idée fixe: mettre en œuvre aussi peu de matériaux neufs que possible. Premièrement, nous avons réutilisé les 6.300 tonnes de déblais issues des anciennes infrastructures pour réaliser le coffre de la chaussée et, deuxièmement, nous avons réemployé d’importants volumes de terre résultant des terrassements nécessaires à la réalisation des infrastructures mais aussi à la préparation des terrains des parcelles privées. 1.200 m3 ont été réutilisés dans les couches de forme de la voirie et 13.500 autres ont été traités avec un mélange chaux-ciment pour préparer les fondations de toutes les parcelles privées», indique Michel Kramp.

Les réflexions sur le réemploi des matériaux doivent avoir lieu très en amont

Pour ce faire, le bureau d’ingénieurs-conseils Luxplan, chargé du projet d’infrastructure, s’est adjoint les services de géotechniciens du bureau d’études Géoconseils qui ont rendu un avis technique sur le sol existant et ses possibilités de réutilisation. Alors que l’empierrement représente une solution classique pour stabiliser les sols, les porteurs du projet ont opté pour un autre procédé permettant de réemployer les terres préalablement excavées: le traitement du sol à la chaux. «Étant donné le niveau d’exigence du projet en matière de durabilité des matériaux et de portance du compactage, nous avons décidé de stabiliser les sols avec un mélange de chaux et de ciment. Après les premières estimations, nous avons recueilli des échantillons de sol et réalisé des essais en laboratoire avec différents pourcentages de chaux et de ciment. Ensuite, nous avons mené des tests sur chantier pour nous assurer d’avoir atteint la portance exigée», détaille Frederik Hohl.

 

Une solution écologique et économique…

Au-delà des calculs techniques, le Fonds du Logement s’est prêté à des calculs économiques. En minimisant la quantité de matériaux neufs apportée sur le chantier et en traitant les sols plutôt qu’en les envoyant à la décharge, il est parvenu à réduire les coûts de construction. Pour la réalisation de la voirie, environ 100.000 euros ont été épargnés grâce au réemploi des ressources existantes. En ce qui concerne la préparation des parcelles privées, l’économie s’élève à presqu’un demi-million d’euros.

Bien entendu, faire du neuf avec de l’ancien permet également de réduire l’impact environnemental du projet. Le Fonds a ainsi fait l’économie de matières premières, dont la production est très énergivore, mais a aussi considérablement diminué le transport des matériaux entrant et sortant.

«Pour bénéficier de tous ces avantages, les réflexions sur le réemploi des matériaux doivent avoir lieu très en amont. Bien qu’il soit possible d’envisager une approche circulaire pour tout type de projet, il faut que le processus demeure rationnel: créer des aires de stockage, traiter les matériaux in situ, tout cela n’est économiquement intéressant que lorsqu’on dispose d’un certain volume», souligne Steve Majerus.

 

… pour renforcer l’offre de logements abordables

Les économies réalisées servent évidemment la mission du Fonds: mettre sur le marché des logements abordables. Bientôt, le nouveau quartier An der Schmëtt accueillera 164 nouvelles habitations dont 97 maisons unifamiliales avec 18 logements intégrés, 23 appartements et 13 maisons bi-familiales. «Trois quarts de ces biens seront réservés à la location subventionnée, le quart restant sera destiné à la vente subventionnée. Les travaux d’infrastructure devraient prendre fin cet été et la construction de la première phase démarrera en début d’année prochaine afin que les premiers habitants puissent emménager en 2026», conclut Steve Majerus.

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