Satisfaire une demande grandissante

Quelque 2.000 logements en location, plus de 1.500 baux actifs, plusieurs milliers de biens en construction ou en planification, et une demande croissante de logements subventionnés… Voilà ce qui occupe le Fonds du Logement actuellement. Jacques Vandivinit, directeur de l’établissement public, évoque la situation, reflet d’un marché sous pression. Il nous parle de la gestion du Fonds, revient sur ses projets en cours et dresse un bilan de l’année 2021.

 

Pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet de la gestion du Fonds du Logement?

En reprenant la direction du Fonds, une de mes ambitions était d’en améliorer le fonctionnement et la gouvernance. En premier lieu, nous avons décliné ses missions légales en objectifs clairs et stratégiques. Depuis, nous travaillons au développement de nouvelles procédures et à l’amélioration des processus dans le but d’améliorer nos services auprès de nos locataires, emphytéotes, partenaires et fournisseurs. Parallèlement, nous modernisons nos outils informatiques et espaces de travail afin de travailler plus efficacement que par le passé.

Au niveau de la gouvernance, nous avons quelque peu revu le fonctionnement des commissions et comités internes qui gravitent autour du Conseil d’administration et de la direction du Fonds et qui nous guident dans l’exercice de certaines de nos missions principales, comme l’attribution des logements. Ceci nous a notamment permis de réduire les délais entre le moment où un logement devient disponible et celui où nous pouvons le proposer à un candidat. L’attribution, quant à elle, est régie par un règlement grand-ducal qui veille à ce que les candidats confrontés à la plus grande précarité (estimée via un système de points qui évalue les revenus de la personne et sa situation de logement actuel par une enquête sociale) soient prioritaires. Nous aimerions encore améliorer les critères afin que soit considéré le lieu de travail ou de résidence existant du candidat. Nous travaillons, à cette fin, avec le ministère pour faire évoluer la situation.

Le critère géographique prend de plus en plus d’importance dans la gestion de notre patrimoine en interne. Le Fonds grandit – il gère ou planifie aujourd’hui des projets dans plus de 60 communes – et, de ce fait, nos collaborateurs doivent s’organiser par région. C’est pourquoi nous avons mis en place des bureaux de développement ou des centres de proximité à divers endroits du pays. Depuis ces antennes, nos collaborateurs des services Gestion du Patrimoine et Construction  sont rapidement joignables et déployables partout.

En parallèle, j’ai constitué une équipe chargée d’élaborer des projets de développement interne. Elle échafaude de nouveaux concepts relatifs à des problématiques comme l’orientation client, la gestion du télétravail, la commercialisation d’espaces professionnels et commerciaux veillant à la mixité fonctionnelle de nos quartiers, etc.

 

Pouvez-vous revenir sur l’état d’avancement de vos projets de grande envergure?

Lors de l’année écoulée, en collaboration avec le ministère du Logement, différentes lois de financement ont été établies et votées (prérequis pour mener à bien tout projet nécessitant une subvention étatique supérieure à 40 millions d’euros) comme celles pour les projets Neischmelz (Dudelange) et Wunne mat der Wooltz (Wiltz). Ces derniers, qui comprendront, à terme, environ 1.500 et 1.000 unités, sont véritablement des projets de grande envergure par la reconversion de friches industrielles pour lesquels le Fonds doit réaliser divers diagnostics et études concernant l’impact environnemental et la dépollution des sols pour partir sur de bonnes bases. S’agissant de quartiers entiers, nous devons également, avant de pouvoir commencer à construire, assainir puis réaliser les infrastructures nécessaires à leur bon fonctionnement (dépollution, création de réseaux, routes, trottoirs, aménagements paysagers, etc.), et apporter les modifications requises aux PAG et PAP communaux. En parallèle,  nous collaborons étroitement avec les communes concernées pour assurer une bonne intégration sociale entre les habitants actuels et futurs et afin qu’elles puissent se préparer à l’accroissement démographique concomitant à la réalisation de ces nouveaux quartiers avec, par exemple, la construction d’infrastructures scolaires ou de stations d’épuration. C’est pourquoi la planification est certes longue, mais une bonne planification – en concertation avec tous les acteurs concernés – est importante et un réel facteur de succès. Du point de vue du logement, nous ne mesurerons l’impact de ces projets que dans quelques années. Mais nous nous assurons, en attendant, que les bons jalons soient mis en place, permettant aux sites de se développer de manière continue et de s’intégrer parfaitement dans les lieux existants.

En tant qu’acteur public, nous essayons d’être innovants et de jouer un rôle de pionnier

Soulignons que, en tant qu’acteur public, nous essayons d’être innovants et de jouer un rôle de pionnier. Que ce soit à Wiltz ou à Dudelange, nous développerons des concepts énergétiques novateurs basés sur les énergies vertes et qui devraient permettre à ces nouveaux quartiers d’être énergétiquement autonomes et neutres en carbone. À Neischmelz, par exemple, nous développons un projet sur la géothermie profonde, un procédé encore rare au Luxembourg et complexe à mettre en œuvre. Nous tenons également à montrer l’exemple au niveau du choix des matériaux que nous utilisons en privilégiant ceux qui peuvent être déconstruits et réutilisés ultérieurement, avec des méthodes d’assemblage comme le modulaire et le préfabriqué qui permettent une réelle démontabilité. L’économie circulaire est au cœur de beaucoup de nos préoccupations durant la phase de planification ainsi que pendant la mise en œuvre.

Actuellement, le Fonds est également en cours de réalisation d’un autre projet d’envergure, en partenariat avec la Ville d’Esch-sur-Alzette, à savoir le quartier Wunnen am Park à Esch/Nonnewisen, qui comptera à terme plus de 750 logements. Commencé en 2003, ce nouveau quartier mixte et fonctionnel s’intègre aujourd’hui dans le tissu urbain de la Ville d’Esch-sur-Alzette. Le Fonds y a déjà réalisé 119 maisons (dont 4 maisons bi-familiales) et 5 résidences (dont une pour étudiants). Trois ensembles sont encore en cours de réalisation et deux supplémentaires en planification. D’autres projets d’envergure qui ont vu le vote d’une loi de financement dans les douze derniers mois et dont les travaux d’infrastructures ont démarré sont les projets Wëltgebond à Mamer et le projet An der Schmëtt à Biwer avec plus ou moins 150 logements chacun.

 

Comment se portent vos activités et la demande en logements abordables «après» la crise sanitaire?

La demande a considérablement augmenté. En 2020, environ 2.000 ménages ont procédé à une demande de logement locatif subventionné dont 1.000 dossiers complets et enregistrés sur la liste d’attente. Un an plus tard, en revanche, nous avons reçu pas moins de 4.000 demandes dont 1.500 complètes et enregistrées, soit une augmentation de 50% par rapport à l’année précédente. Après le confinement et avec la hausse des prix, certains ménages rencontrent plus de difficultés. Notre liste d’attente continue ainsi de s’allonger. Afin de satisfaire la demande, nous essayons d’accélérer notre cadence de mise sur le marché de logements supplémentaires. Pour ce faire, nous cherchons d’une part à construire plus et d’autre part à acquérir davantage de logements. À cet égard, nous collaborons étroitement avec les communes et l’État qui, respectivement, nous proposent ou nous affecte régulièrement des biens. Il s’agit généralement de projets complexes à envergure réduite comme les «Baulücken» et qui nécessitent la réalisation de travaux importants car ces bâtiments (d’anciens bureaux de police ou de poste, des châteaux, des fermes, etc.) se prêtent rarement à une transformation rapide en habitations et, bien souvent, font l’objet d’une protection patrimoniale. C’est un défi du point de vue technique mais aussi budgétaire puisque, rappelons-le, l’objectif est de construire de manière abordable. Ces projets complexes risquent de prendre plus de temps que de construire du neuf, mais étant quasiment les seuls à assumer ce rôle de préservation culturelle via la rénovation de bâtiments, nous sommes fiers que ces bâtiments retrouvent une «utilité» pour la société grâce à nos travaux.

Maintenir l’humain au cœur de toutes nos préoccupations

Le  service Location a procédé, en 2021, à l’attribution de plus de 120 logements et à quelque 100 relogements rendus nécessaires par l’évolution des besoins de certains de nos bénéficiaires. En parallèle,  plus de 3.000 interventions techniques, 2.000 interventions sociales et 200 enquêtes sociales ont été réalisées l’année dernière. Ces chiffres parlent d’eux-mêmes quant à notre proximité avec nos ménages locataires. Je suis très fier que nous ayons pu répondre présents dans une période où les difficultés se sont accumulées. Lors des inondations de juillet 2021, par exemple, nos équipes ont été particulièrement mobilisées pour venir en aide aux ménages occupants des logements concernés par la catastrophe. Nos collaborateurs sont allés jusqu’à aider volontairement les week-ends, ce qui a été très apprécié.

Il est important pour moi que le Fonds demeure à l’écoute de ses clients; et ces chiffres révèlent que nos services partagent cet avis. L’équipe du Fonds forme une grande famille qui, malgré la pression exercée sur le marché actuellement, fait le maximum pour remplir sa mission de bailleur social. Car c’est de cela qu’il s’agit: maintenir l’humain au cœur de toutes nos préoccupations.

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