Trouver la solution technique optimisée parmi un dédale de solutions

Daedalus Engineering est un bureau d’études en génie civil spécialisé dans les domaines des structures et des infrastructures. Inspiré par la mythologie, son nom est synonyme d’ingéniosité, une qualité qui lui a été reconnue et qui lui a valu une participation aux projets-pilotes luxembourgeois parmi les plus remarqués de ces dernières années. Marc Prommenschenkel et Patrick Hausen, ingénieurs-conseils et associés-gérants de la société, nous présentent leur bureau, son approche et ses projets les plus remarquables. Interview.

 

Présentez-nous Daedalus Engineering en quelques mots…

MP: Fondé en 2000, Daedalus Engineering est un bureau d’études d’ingénieurs-conseils en génie civil spécialisé dans les domaines des structures et des infrastructures, qui propose également ses services en matière de topographie et de coordination sécurité et santé sur les chantiers. Fort d’une équipe de 30 collaborateurs – parmi lesquels 20 ingénieurs –, ce bureau à taille humaine veille à offrir un service personnalisé et à élaborer des solutions individuelles et uniques, toujours en respectant les exigences de ses clients. Ses gérants sont d’ailleurs personnellement très impliqués dans chacun des projets et veillent à entretenir une réelle proximité avec les maîtres d’ouvrage et leurs partenaires.

PH: Depuis le 15 octobre, la société, dont le siège social se situe et demeure à Heffingen, a ouvert une nouvelle succursale à Heinerscheid, localité de la commune de Clervaux. Ce point d’ancrage supplémentaire dans le Nord, en plus d’augmenter le confort de vie de certains de nos collaborateurs qui parcouraient de longues distances pour se rendre au travail, constitue un atout important pour attirer de nouveaux talents. Aussi et surtout, il nous permet de nous rapprocher de nos clients, nombreux dans la région, et d’accroître encore davantage notre proximité, notre disponibilité et notre réactivité.

 

Votre bureau d’études est connu pour avoir réalisé plusieurs projets-pilotes dans le domaine de la construction durable. Comment avez-vous collaboré à leur exécution?

MP: Daedalus Engineering se démarque de ses confrères par sa participation aux deux projets-pilotes de l’État luxembourgeois en matière de bâtiment à énergie positive: le bâtiment administratif de l’Administration de la nature et des forêts à Diekirch et le Lycée technique pour professions de santé à Ettelbruck. Bien que ces projets soient relativement différents dans leur utilisation, ils ont finalement soulevé des défis similaires: s’agissant de deux constructions d’envergure réalisées majoritairement sur base d’une charpente en bois, nous avons dû développer une certaine expertise sur la résistance au feu de ce type de bâtiment, notamment en raison des prescriptions coupe-feu qui sont extraordinairement sévères au Grand-Duché par rapport à celles des pays avoisinants. Nous sommes finalement parvenus à trouver les solutions économiques, techniques et écologiques qui ont permis à ces bâtiments de voir le jour malgré tout. Le savoir-faire que nous avons acquis de cette manière depuis 2009 est aujourd’hui mis à disposition des clients pour lesquels nous réalisons des projets d’envergure en construction bois, un système constructif qui est finalement devenu une spécialité de notre bureau.

Offrir un service personnalisé et élaborer des solutions individuelles et uniques

Au-delà des contraintes liées à la construction en bois, ces deux projets-pilotes ont la particularité d’être «à énergie positive», c’est-à-dire que les bâtiments produisent davantage d’énergie qu’ils n’en consomment, énergie grise (l’énergie primaire non récupérable après la démolition de l’ouvrage) comprise. C’est pourquoi il ne suffisait pas seulement d’envisager la construction des édifices, il fallait aussi anticiper leur déconstruction. Tous nos choix techniques ont été conditionnés par cette approche et ont pu être justifiés par des calculs comparatifs d’émissions de CO2 ou d’énergie grise. Prenons l’exemple des fondations du Lycée technique d’Ettelbruck: en raison de la mauvaise qualité du terrain, situé sur les alluvions de la Wark, celles-ci ont dû être réalisées en profondeur. Nous aurions pu faire le choix de recourir à de traditionnels pieux forés en béton armé, mais nous aurions obtenu des éléments constructifs difficiles à démolir et nécessitant un apport d’énergie primaire important. Au lieu de cela, nous avons opté pour un procédé de colonnes ballastées. Ainsi, lors de la déconstruction, nous nous trouverons en présence de gravier, un matériau naturel qui pourra rester en place.

Dans le même domaine, nous sommes heureux de prendre part à un projet-pilote en déconstruction sélective et en construction avec matériaux récupérés et recyclés mené par l’État dans le cadre du réaménagement du site du Lycée Michel Lucius à Luxembourg-Limpertsberg. En plus d’avoir pu déconstruire d’une manière sélective tout un bâtiment scolaire mis hors service, nous avons notamment pu utiliser du béton à agrégats recyclés issus de cette déconstruction à une échelle bien plus vaste que ce qui a pu se faire jusqu’à présent au Grand-Duché. Ce projet fait ainsi figure de référence pour ce type de construction, que ce soit pour les producteurs, les concepteurs, les entreprises ou les instances étatiques. Dans ce contexte, nos équipes ont pu développer avec ces dernières un mode de mise en soumission spécifique à l’exécution de tels travaux qui ajoute la valeur écologique de l’offre à la liste des critères d’attribution, en plus de sa valeur purement économique.

 

Finalement, quelles sont les caractéristiques de votre approche?

MP: Au-delà de la dimension purement technique des solutions proposées, notre approche se définit par une conception économique et écologique. Nous avons élaboré des outils informatiques permettant de comparer différentes solutions ou variantes de systèmes constructifs du point de vue technique (gabarits nécessaires, avantages et désavantages d’un point de vue statique, physique et architectonique du bâtiment , délais de réalisation, flexibilité de transformation, etc.), économique (coûts de construction résultants et influence sur les coûts d’entretien), mais aussi écologique (estimation des émissions en CO2, énergie grise, énergie primaire, démontabilité de la structure, risques d’émission de substances nocives, etc.). Cette approche nous permet de guider les maîtres d’ouvrage dans leurs choix en fonction de la pondération des différentes contraintes et de leurs désidératas et objectifs.

PH: Notre approche est également tournée vers l’innovation lorsque les contraintes du projet l’imposent. À titre d’exemple, nos ingénieurs ont activement participé au développement d’un système de dalles préfabriquées en bois haute portance et grande portée en collaboration avec une startup autrichienne. Ces éléments innovants seront ensuite mis en œuvre dans un de nos projets. Citons également le nouvel escalier du Müllerthal Trail que nous avons conçu, en étroite collaboration avec les architectes Witry et Witry, de manière entièrement digitale en modules directement reproductibles par les machines d’atelier des charpentiers ou encore le château d’eau d’Altrier où des réservoirs entièrement préfabriqués en acier inoxydable ont été positionnés en tête de la tour, ce que personne n’avait jamais osé auparavant.

 

Justement, via son service «infrastructures», votre bureau réalise également de nombreux projets relatifs à l’eau potable. Pouvez-vous nous présenter vos activités dans ce domaine?

PH: Notre service «infrastructures» réalise des études pour les réseaux de canalisation, la projection de voiries et d’aménagements extérieurs, des levés topographiques ou encore l’étude d’ouvrages d’art, mais sa spécialité demeure, depuis la fondation de la société, le domaine de l’eau potable dans lequel nous sommes capables de fournir toutes les compétences d’études nécessaires: du captage et de l’assainissement des sources jusqu’aux réservoirs en passant par la conception et les calculs hydrauliques de conduites d’adduction, les études de capacités de stockage d’eau ou encore les études de systèmes de guidage et de télégestion des réseaux d’eau potable.

Sur les 20 dernières années, nous avons collaboré à quelque 40 projets de réservoirs d’eau potable dont les volumes de stockage varient de 30 à 4.000 m3. Ceci fait de Daedalus Engineering, malgré sa relative jeunesse et en fonction de sa taille, un des bureaux d’études ayant planifié le plus de réservoirs au Luxembourg. Quel que soit l’ouvrage, nous recherchons la meilleure option en étudiant divers systèmes constructifs. Au-delà de la solution classique du bassin en béton armé enterré, nous pouvons proposer des cuves en acier inoxydable ou en polyéthylène haute densité (PE-HD) pour les plus petits bassins. Pour chaque projet à l’étude, nous nous efforçons de développer une vision sur le long terme car ce que nous construisons aujourd’hui dans le domaine de l’eau potable est destiné à servir deux voire trois générations. Au Luxembourg, beaucoup d’installations sont d’ailleurs plus que centenaires aujourd’hui. Plutôt que de repenser indépendamment quelques réservoirs ou conduites vétustes, nous préférons proposer d’analyser un réseau communal dans son ensemble pour déterminer quelle serait la meilleure solution du point de vue technique mais aussi économique (aussi bien en termes de coûts de construction que de maintenance et d’entretien). Certes, cela remet en question certaines habitudes bien ancrées, mais parfois il est préférable de n’avoir qu’un bon réservoir communal plutôt qu’un réservoir vétuste par village. Aujourd’hui, dans le contexte de changement climatique que l’on connaît, les besoins en eau sont importants et les ressources de chaque commune limitées. C’est pourquoi notre idée est d’inviter les administrations communales à travailler ensemble et à développer des visions plus globales à long terme.

 

Menez-vous actuellement des projets qui reflètent cette philosophie?

PH: En effet, nous raccordons actuellement les réseaux d’eau potable des communes de Fischbach, Larochette et Nommern afin de favoriser les synergies et de réduire les coûts de construction et de fonctionnement pour chacune d’entre elles à court et long termes. L’objectif de ce projet, dont l’idée est née en 2008, est de sécuriser l’approvisionnement de chaque commune en créant un réseau bidirectionnel (qui n’implique donc pas de relation vendeur – acheteur). Chacune d’elles n’ayant qu’une source d’eau potable, le moindre problème (pollution bactériologique, géologique, etc.) peut compromettre son approvisionnement en eau et c’est ce que notre approche permet d’éviter. C’est finalement la politique qui est encouragée par l’État luxembourgeois puisque, pour se voir octroyer des subsides élevés dans ce domaine, les administrations communales doivent désormais se rassembler. En toute honnêteté, cette approche globale réduit le nombre de projets que nous nous voyons confier, mais elle augmente certainement la satisfaction et la confiance de nos clients.

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