La polémique «nucléaire versus gaz» crée des tensions électriques en Europe…

Chacun l’aura remarqué sur sa facture annuelle: le coût de l’électricité s’est envolé. Aussi surprenant que cela puisse paraître, ce phénomène tient son origine dans l’augmentation de celui du gaz. En effet, au sein de l’UE, le prix de gros de l’électricité dont doivent s’acquitter nos fournisseurs est déterminé par la centrale la plus chère réquisitionnée. Si, à un instant T, le mix énergétique auquel l’Europe fait appel pour produire 100% de son électricité comprend ne serait-ce qu’un infime pourcentage de gaz, alors c’est la centrale à gaz réquisitionnée qui déterminera le prix de l’ensemble des ressources énergétiques utilisées, puisqu’il s’agira de la plus onéreuse. Un non-sens dans la mesure où il parait évident qu’une telle infrastructure aura des coûts de fonctionnement largement supérieurs à ceux d’une centrale éolienne ou solaire…

Par ailleurs, si le prix du gaz augmente c’est notamment la conséquence de l’application de la taxe carbone de l’Union européenne, mais surtout le reflet d’un déséquilibre entre l’offre des pays producteurs de gaz et la demande mondiale stimulée par la reprise post-Covid. Parmi ces producteurs, l’on retrouve la Norvège et l’Algérie – dont la production décline – mais aussi la Russie, temporisant sa production dans l’attente de la finalisation de la construction d’un gazoduc, le Nord Stream 2, la reliant directement à l’Allemagne. La création de cette infrastructure hors-norme fait l’objet de nombreuses polémiques, notamment car elle menacerait la sécurité énergétique du pays et affaiblirait ainsi la position de l’Allemagne et de l’Europe dans leurs relations stratégiques avec la Russie dans d’autres domaines de négociation.

L’UE reste par ailleurs dépendante du gaz pour chauffer ses habitations. Le Luxembourg parvient à réduire fortement ses besoins en la matière en encourageant à la rénovation des bâtiments et en imposant des normes élevées aux nouvelles constructions. Toutefois, comme tous les États membres, le pays doit supporter l’électrification croissante de sa société et reste à ce titre dépendant de cette énergie fossile, puisque 7% de l’électricité européenne sont encore produits à partir de cette source. Quant à l’alternative que pourrait représenter le nucléaire, le Luxembourg s’y oppose farouchement, notamment à cause de la gestion future des déchets dangereux qu’il implique. Si ces arguments semblent fondés, le gaz n’offre pas non plus de perspective durable satisfaisante. C’est pourtant ce que semble penser la Commission européenne, qui envisage d’inscrire, d’ici la fin de l’année 2021, cette ressource dans la «Taxonomie verte de l’UE», soit la liste d’énergies durables que l’Europe financerait à taux d’intérêts réduits…

Face à l’urgence climatique, le monde entier est en train de perdre une course contre la montre pourtant vitale. Le nucléaire offre dans ce cadre une solution immédiate pour éviter les émissions nocives, tout en créant une problématique des déchets que les gouvernements devront solutionner à long terme. Mais les effets négatifs du nucléaire sont-ils aussi néfastes que les conséquences environnementales et géopolitiques d’une consommation renforcée de gaz?

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