Des bienfaits d’une consommation locale et de saison

Le confinement a eu un effet sur les consciences mais aussi sur les comportements d’achat. S’intéressant de plus près aux produits locaux, les particuliers ont montré un véritable engouement pour ces derniers. Ghislaine Soisson, chef de projet de la campagne «Sou schmaacht Lëtzebuerg» à la Chambre d’Agriculture, reste toutefois prudente: cet intérêt soudain semble aujourd’hui redescendre. Raison de plus pour poursuivre la sensibilisation des consommateurs aux avantages d’une alimentation locale et de saison.

 

Quel est le rôle de la Chambre d’Agriculture?

Notre fonction première est de promouvoir une agriculture durable, dynamique et équilibrée d’un point de vue social, écologique et financier. Avant tout, nous défendons les intérêts des agriculteurs, viticulteurs et horticulteurs et visons des objectifs comme la formation initiale et continue et la veille technologique de façon à nous tenir informés de l’évolution de la digitalisation dans le monde agricole. Nous menons également nos propres projets de recherche dans ces domaines. 60% de notre effectif s’attèle au transfert de connaissances et au renforcement des compétences auprès de différents acteurs. Cette activité prend la forme de conseils pour apprendre à mieux gérer son impact sur la nature et la protéger. Enfin, notre dernier volet concerne la promotion des produits agricoles.

 

En quoi consiste votre campagne «Sou schmaacht Lëtzebuerg»?

Elle vise à sensibiliser les consommateurs aux avantages d’une consommation locale et de saison: en évitant les longs transports, on évite également la cueillette prématurée des produits et leur détérioration pendant ces trajets. L’avantage est donc nutritionnel, mais aussi économique puisque en achetant local, le consommateur soutient toute une chaîne de production, de transformation et de vente à proximité de chez lui. Celle-ci respecte des règles strictes, lui garantissant par ailleurs un mode de cultivation sain, qualitatif et transparent. Quant aux élevages, ils sont de petite taille et respectent le bien-être des animaux dont la nourriture provient d’un circuit local également.

Notre campagne vise aussi à faire découvrir au public toute la panoplie des denrées locales: si le lait ainsi que la viande bovine et porcine sont générés en quantité suffisante, d’autres produits comme les choux, brocolis, carottes, pommes-de-terre, tomates, pommes, cerises, fraises et bien d’autres encore sont cultivés en plus petite quantité. D’autres fruits et légumes pourraient évidemment pousser sous serre, mais leur impact écologique serait alors bien plus grand. Nous poursuivons nos efforts pour rendre ces produits accessibles en grande surface et veillons en parallèle à faciliter le contact entre les consommateurs et les producteurs locaux. Ces derniers sont d’ailleurs référencés sur le site internet de la campagne, qui offre un service de géolocalisation permettant de trouver les plus proches en fonction de sa position.

La campagne s’adresse aussi aux restaurants et à la restauration collective, qui peuvent signer une convention impliquant l’utilisation d’un certain nombre de produits luxembourgeois en échange d’une certaine visibilité.

 

Votre site référence également les labels luxembourgeois. Que se cache-t-il derrière ces derniers?

Tous les labels luxembourgeois disposant d’un véritable cahier des charges vérifiable par le consommateur sont en effet repris sur le site. Parmi ceux-ci, notre label «produit du terroir» a été décliné à la viande bovine, aux pommes-de-terre et à la farine/au blé. Concernant la viande bovine, par exemple, ce label garantit que la bête est née et a été élevée et abattue au Luxembourg. Pour les autres produits, il assure que la majorité de la chaîne de production a été réalisée au Luxembourg. Prochainement, nos labels bénéficieront d’une nouvelle identité visuelle et s’étendront à une gamme plus large de produits.

Par ailleurs, le ministère de l’Agriculture a déposé un projet de loi concernant la création d’une procédure d’agrément évaluant les labels sur base de critères techniques clairs et vérifiables, établis par les instances officielles, pour assurer la transparence envers les consommateurs.

 

L’année écoulée a été marquée par la crise du Covid-19. Quel a été son impact sur le monde agricole?

Dès le début du confinement, les agriculteurs ont été confrontés à un problème de main d’œuvre qui venait habituellement de l’étranger et qui n’a plus pu traverser les frontières. Nous les avons alors soutenus en déployant un système d’inscription de volontaires en ligne et en assurant leur coordination. Les agriculteurs et vignerons ont ensuite dû faire face à la difficulté d’écouler la marchandise à une période où la restauration et l’événementiel étaient à l’arrêt.

La crise a également eu un impact sur les habitudes de consommation. Alors que nous venions de lancer une nouvelle campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux, le confinement a été annoncé. À travers l’analyse des statistiques sur notre site, nous avons alors constaté un tel engouement pour les denrées locales que les producteurs avaient du mal à suivre. Bien que l’intérêt ait baissé depuis, on note un accroissement dans la consommation de produits locaux en comparaison à la période «avant Covid». Il est toutefois difficile, avec si peu de recul, de savoir si cette tendance perdurera au-delà de la réouverture récente des restaurants et de la reprise d’un rythme de vie normal. En d’autres mots, nous ne savons pas s’il s’agit d’un intérêt durable développé grâce à la crise ou bien s’il s’agit d’une tendance passagère renforcée par la contrainte de repas pris exclusivement à domicile et la volonté d’éviter les grandes surfaces.

La crise a indéniablement mis en évidence les bienfaits d’une consommation locale. Il parait aujourd’hui tellement évident qu’il s’agit du seul mode de consommation judicieux et durable! Le Luxembourg ne sera jamais à 100% autonome d’un point de vue alimentaire; nous pouvons toutefois privilégier les produits locaux lorsque cela est possible…

 

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