Soutenir et renforcer l’innovation au sein du secteur public

Mouvementée à bien des niveaux, l’année 2020 s’est révélée riche en innovations pour le secteur public. Donnant un coup d’accélération à sa stratégie de digitalisation, l’État luxembourgeois a multiplié les initiatives visant à simplifier les démarches administratives et à renforcer leur accessibilité. Partenaire de certaines de ces modernisations, EY Luxembourg continue à délivrer conseils et propositions aux administrations pour répondre à leurs besoins. Pierre-Jean Forrer, Principal, nous en parle en détail dans cette interview.

 

Quel a été l’impact de la pandémie sur les projets de digitalisation du secteur public luxembourgeois?

Hormis deux semaines de flottement en mars 2020, nécessaires au déploiement d’une infrastructure permettant le télétravail de ses collaborateurs, nous avons constaté que le secteur public a bien résisté à la crise liée à l’épidémie de Covid-19. Le travail à distance a même renforcé notre proximité avec les acteurs publics car les rencontres virtuelles nous ont offert une plus grande flexibilité et nous ont permis d’augmenter la fréquence de nos échanges. Le présentiel restera toutefois une composante importante de nos relations clients afin de combler les limites du distanciel.

L’agenda 2020 des projets de transformation, d’innovation et de modernisation a été maintenu. Au cours des six derniers mois, nous avons même noté une nette accélération du nombre de lancements de projets dans tous les domaines de même qu’un maintien des ambitions annoncées dans l’accord de coalition gouvernemental. En effet, au vu des échéances politiques concernant les réformes prévues pour 2023, toute une série de projets devraient bientôt être lancés.

En définissant le gouvernement numérique, l’OCDE a par ailleurs donné un cadre à la digitalisation du secteur public. Chaque année le Luxembourg fournit beaucoup d’efforts pour évoluer dans ce domaine en accélérant sa transformation digitale. Dans un même temps, le pays veille à répondre aux attentes des citoyens en matière de simplicité et d’accessibilité des démarches administratives. D’autres projets de réformes qui n’étaient pas à l’agenda voient ainsi le jour dans une optique de modernisation et de digitalisation de certaines procédures.

 

Que penser de la stratégie «Gouvernance électronique 2021-2025» récemment dévoilée par le gouvernement?

Les projets actuellement développés par l’État sont tout à fait en phase avec cette stratégie affichée d’évoluer vers un gouvernement digital tel que défini par l’OCDE. L’État, dans la manière dont il organise les projets et les moyens, se conforme aux principes à respecter pour le déploiement d’une administration digitale efficiente: demander une seule fois ses données au citoyen, appliquer le digital par défaut pour l’accès aux démarches, veiller à leur accessibilité pour tous, faire preuve d’ouverture envers les citoyens et le secteur privé et garantir la transparence du traitement, assurer la sécurité des données, et enfin, veiller à l’interopérabilité de ses systèmes informatiques.

Chez EY Luxembourg, nous voulons soutenir le Grand-Duché dans la mise en place de ce gouvernement numérique. Pour y parvenir, nous sensibilisons nos consultants à l’importance d’adresser des propositions de refonte des processus publics et des procédures administratives en lien avec le «digital by design» et centrées sur l’expérience utilisateur. Par ailleurs, il y a aujourd’hui une richesse des données dans les systèmes d’information de l’État dont il faut exploiter davantage la valeur à travers la structuration des projets mis en place. Ainsi leur partage et leur accès doivent être revus de même que les mécanismes de prise de décision qui devront être davantage déterminés par ces données.

Nous veillons également, pour chacun de nos projets, à mettre le service au citoyen à l’honneur; toutes les solutions mises en place sont de moins en moins des organisations structurées en silos mais sont plutôt organisées en plateformes. L’État veut aussi favoriser un accès simplifié et digitalisé aux démarches. Guichet.lu est un bon exemple dans ce sens: il s’agit d’une grande réussite pour laquelle le gouvernement a beaucoup investi afin de proposer une application mobile offrant les mêmes services que le portail, mais en en simplifiant l’accès. Ces éléments font désormais partie de la charte que nous devons respecter dans la préparation et le dessin de tous les projets que nous élaborons. Enfin, dans une même idée, nous veillons à proposer des solutions proactives, anticipant les besoins des utilisateurs. Dans une logique «open by default», toutes les données et politiques publiques seront ouvertes à tous dans les limites de la loi et de la sécurité nationale.

 

Quels sont les services fournis par EY pour soutenir l’innovation au sein des administrations?

Cela fait trois années que je suis responsable de ces activités et que nous menons des réflexions dans l’objectif de mieux adresser le secteur public. Nous avons mis en place certaines choses simples comme le déploiement d’une communication et la soumission de propositions plus concrètes et pragmatiques. En ce sens, nous veillons à proposer des «quick wins», soit des réalisations rapides en réponse à des besoins identifiés sur le terrain. Offrant nos services à tous les niveaux (ministères, administrations, entités dont l’actionnaire est l’État,…), nous faisons d’une part un travail proactif de veille quant aux besoins des administrations mais continuons d’autre part à réagir aux appels d’offres. En tant que cabinet de conseil, notre rôle est aussi de mettre en relation des administrations entre elles pour partager les bonnes pratiques et leur donner un plus grand rayonnement.

Nous avons jusqu’ici une bonne collaboration avec ce secteur, qui se positionne en deuxième place après le financier proportionnellement au chiffre d’affaires d’EY au niveau mondial. Une nouvelle génération de jeunes diplômés luxembourgeois est venue renforcer nos rangs, ce qui, couplé à notre management historique luxembourgeois, fait d’EY un des cabinets de conseil avec le plus fort ADN local. Nous sommes ainsi conscients des enjeux du secteur public dans son ensemble. À travers nos cinq offres stratégiques majeures, nous l’aidons à développer soit les méthodes soit les expertises permettant l’identification d’innovations nécessaires dans les processus en place. Grâce à celles-ci, nous entendons doubler notre présence sur ce secteur d’ici 2026.

Un des grands piliers de notre croissance consiste en l’accompagnement de la transformation digitale. Nous investissons énormément dans nos propositions d’innovations technologiques orientées utilisateurs et impliquant la modernisation des systèmes d’information par l’IA, la blockchain, l’IoT, SAP S4 HANA,… Dans un second temps, nous proposons nos services en matière de cybersécurité et de protection des données. Il s’agit d’un défi technologique et réglementaire pour lequel nous devons encore faire preuve d’imagination afin de proposer des solutions permettant de prévenir les risques de cyberattaques.

Si la transition digitale est une grande partie des préoccupations de l’État, d’autres se font également ressentir… Nous le suivons donc également dans ses transformations nécessaires liées au changement climatique. Cet accompagnement se fait dans plusieurs domaines: transition énergétique, durabilité, éthique,… Bien que les demandes soient encore timides, nous envisageons déjà des suggestions d’innovation aux niveaux fiscal, de la réduction du bilan carbone, de l’autonomie énergétique du Luxembourg,… Beaucoup de réformes à venir viendront certainement des besoins de protection de notre écosystème! Le Luxembourg est un acteur de choix en Europe dans le milieu du développement durable et commence à explorer de nouvelles pistes, comme la participation à une filière hydrogène européenne. Nous suivons de près ces évolutions et travaillons sur des offres pour soutenir ces axes de développement.

Nous conseillons également le secteur public dans l’évolution de ses modèles d’investissements et de financements des infrastructures et l’aidons à optimiser son portefeuille d’actifs immobiliers. Enfin, nous le soutenons dans la transformation de ses organisations à plusieurs niveaux comme le développement des compétences et le recrutement, l’adaptation de sa gouvernance, l’amélioration de son attractivité,…

 

En fin d’année dernière, l’État s’est doté d’un GovTech Lab. Que penser de cette initiative dont le but est d’accélérer le développement et le perfectionnement des services publics numériques?

Il s’agit d’une belle initiative! Nous sommes très à l’écoute des projets qu’il lance et qui permettront de multiplier les partenariats d’innovation public/privé. La concrétisation physique du GovTech Lab dans les locaux du CTIE en fin d’année 2021 créera par ailleurs un environnement propice aux rencontres et à l’émulation de l’innovation.

Par cette action, la volonté de l’État est de donner plus d’agilité à l’innovation. Le GovTech Lab est un lieu à travers lequel le secteur public pourra plus facilement exprimer un besoin ou une problématique et ouvrir des possibilités de réponse à toute une série d’acteurs issus du privé et du monde des startups. Cela nous pousse à nous réinventer et à créer davantage de partenariats avec ces startups pour faire de nouvelles propositions innovantes!

Nous essayons également de rester connectés aux travaux concernant les enjeux relatifs à la création d’un cadre d’interopérabilité afin d’y apporter notre point de vue.

Nous suivons donc de près ces initiatives créant des synergies entre le secteur privé et le secteur public. Notre objectif est de faire bénéficier ce dernier de nos réflexions et de notre expertise afin de l’accompagner sur le chemin de l’innovation.

 

 

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