Secteur de la construction, combien de divisions au temps du Covid-19?

La construction occupe une position centrale au Luxembourg. En 2019, elle représentait 6% du PIB de manière directe, près de 9% avec les effets indirects et induits. Par ailleurs, ce secteur compte près de 50.000 emplois directs. La construction a été fortement affectée par la crise sanitaire, même si un net redressement de son activité s’est manifesté au 3e trimestre de 2020. Tour d’horizon du secteur avec Muriel Bouchet, directeur de la Fondation IDEA asbl.

  

Le secteur de la construction est souvent évoqué au Luxembourg, mais rarement de manière quantitative. Le présent article va s’attacher à pallier cette lacune en deux temps. Il va tout d’abord évaluer le poids relatif de cette branche d’activité, au Luxembourg et dans les pays proches. Il va ensuite se pencher sur l’évolution de l’activité de construction durant les neuf premiers mois de la «période Covid-19». Il s’agit à ce stade davantage de dresser un «état des lieux» que de fournir des explications des évolutions observées, l’optique privilégiée étant avant tout descriptive.

  

Construction: quel poids économique?

Selon les données de comptabilité nationale élaborée par le STATEC, la construction [1] représentait en 2019 une valeur ajoutée brute [2] (VAB) de 3.467 millions d’euros, soit 6% de la VAB totale (toutes branches confondues). Cette part se situe entre celle de l’industrie manufacturière (5%) et de la branche «information et communication» (7%), ce qui illustre déjà clairement l’importance du secteur en question.

Cette proportion se situe par ailleurs exactement au même niveau qu’en 2000 (également 6%), ce qui montre que cette activité a évolué en phase avec l’ensemble de l’économie, qui a elle-même fait montre d’un grand dynamisme au cours de la période 2000-2019. En termes absolus, la VAB de la construction a été multipliée par 2,8 en l’espace d’une génération, ce qui équivaut à une hausse de 74% en volume (soit, en moyenne, près de 3% par an).

Enfin, la part de la construction dans la VAB est un peu plus élevée au Luxembourg que dans la zone euro ou dans les trois pays limitrophes.

La construction représentait par ailleurs en 2019 10,3% de l’emploi total au Luxembourg. Cette part est nettement plus importante que le poids de cette branche dans la VAB totale (6% pour rappel), ce qui souligne la forte intensité en emplois du secteur. A un million d’euros de VAB correspondent en effet quatorze employés dans la construction, contre huit pour l’économie dans son ensemble. Il s’agit en outre d’une large palette de métiers, ce qui met en exergue le rôle essentiel de la construction en termes de cohésion sociale, au-delà des seules retombées économiques au sens strict.

Ces considérations n’épuisent nullement le sujet du poids économique de la construction, car cette dernière exerce un puissant effet d’entraînement via ses fournisseurs, la consommation de ses employés et ses dépenses d’investissement. Selon une estimation de la Fondation IDEA [3], la «construction au sens large» (après intégration de ces effets indirects et induits) pèserait 5 milliards de valeur ajoutée (8,7% de la VAB totale) et 62.000 emplois soit pratiquement un emploi sur 7.

 

Construction: quelle incidence (statistique) de la crise sanitaire jusqu’à présent?

Il est impossible à ce stade, alors que le Covid-19 n’a pas encore brûlé ses dernières cartouches, d’évaluer les retombées précises de la crise sanitaire sur le secteur de la construction. Une telle tâche requiert d’ailleurs un travail quantitatif et qualitatif de fond, en collaboration étroite avec toutes les forces vives de cet important domaine d’activité. Nous nous limitons ici à un examen purement statistique des données de valeur ajoutée publiées au cours des trois premiers trimestres de 2020 [4].

Le tableau ci-dessous résume cet examen.

Il montre (en colonne) que la construction a davantage souffert de la crise sanitaire que la plupart des autres branches de l’économie luxembourgeoise, ce qui est conforme à l’intuition. La VAB en volume dans la construction a par ailleurs chuté dans une même mesure au Luxembourg et au sein de la zone euro. Ce décrochage a été nettement moins intense qu’en France, mais il contraste avec la situation de l’Allemagne, où la VAB a légèrement augmenté.

Un examen plus précis des trimestres montre qu’en glissement annuel [5], la VAB s’est affaissée de 5% au premier trimestre de 2020 et même de 19% au deuxième trimestre. En revanche, l’activité au troisième trimestre a excédé celle du trimestre correspondant de 2019 a raison de 3%.

Une évolution remarquable, qui montre que tout espoir est loin d’être perdu… Heureusement, car les besoins en logements sont considérables au Luxembourg. Des calculs effectués par IDEA montrent que si la population atteignait 760.000 habitants en 2030 (un scénario nullement irréaliste), la demande potentielle annuelle de logements augmenterait de quelque 25%.

 

Article fourni par la Fondation IDEA asbl

 

 


 

[1] Secteur F de la nomenclature dite NaceR2.

[2] Censée restituer le véritable apport économique d’une branche, la valeur ajoutée est égale à la valeur de la production (8.629 millions d’euros en 2019) diminuée de la consommation intermédiaire (c’est-à-dire des biens et services «détruits» durant le cycle de production; montant de 5.163 millions d’euros en 2019).

[3] Voir le décryptage n°19 de la Fondation IDEA asbl, Construction: un secteur de poids au Luxembourg, 8 mars 2021.

[4] Pour le Luxembourg, les chiffres complets du quatrième trimestre de 2020 ne seront en effet publiés que le 15 mars 2021.

[5] Donc par rapport aux trimestres correspondants de l’année 2019.

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