La mobilité post-Covid

Le confinement a mis en évidence les atouts du télétravail et de la digitalisation. Les outils de collaboration mis en place en amont de la crise auront permis la continuité des activités des entreprises. «Les bonnes pratiques doivent perdurer afin de répondre aux enjeux écologiques et de mobilité», interview de Dominique Laurent, Managing Director, qui revient sur les actions de PwC Luxembourg en la matière.

 

Les problèmes de mobilité vous avaient conduits, bien avant la crise, à mettre en place de nouveaux modèles, quels sont-ils?

Même si cette problématique était d’une toute autre ampleur à mon arrivée chez PwC Luxembourg en 2006, nous avions en effet déjà des solutions de mobilité. Je pense par exemple aux navettes de bus qu’il a fallu optimiser tant au niveau du service que des coûts. En collaboration avec la Ville de Luxembourg, nous avons créé la Job Card qui permettait à nos employés d’utiliser tous les bus de la ville. Nous avons également établi une série de règles afin de limiter l’attribution des places de stationnement tout en proposant des solutions alternatives. Nous avons dès 2010 proposé des abonnements au mPass et réalisé une étude annuelle sur les habitudes de déplacements de nos employés. Nous avons aussi développé une application d’autopartage afin de mettre en relation les résidents d’une même région et les faire bénéficier d’une place de stationnement gratuite. En outre, nous disposons d’une flotte de 1.750 véhicules de société.

Pour l’heure, il n’y a presque plus de problèmes de stationnement dans la capitale et les temps de parcours sont redevenus décents mais cela ne perdura pas si nos mauvaises habitudes reviennent à la fin de la crise Covid. Le trafic s’est déjà sensiblement densifié depuis la reprise de septembre.

 

Le télétravail fait-il partie des solutions?

Afin de nous préparer à l’arrivée de nos voisins Auchan, Deloitte et AlterDomus, nous avions dès 2018, œuvré à une plus grande flexibilité du temps de travail. Nous avons donc créé un groupe de travail afin de déterminer les fonctions qui pourraient en bénéficier et développé des applications permettant de capturer le lieu de travail pour ajuster la fiscalité des travailleurs frontaliers.  Enfin, pour répondre aux besoins de ces travailleurs frontaliers nous avons ouvert des bureaux satellites à proximité directe des frontières belges, françaises et allemandes, respectivement à Oberpallen, Wemperhardt, Belval et Wecker.

Ainsi, jusqu’à deux jours par semaine, le travail à domicile et ces bureaux satellites permettent de travailler à distance et de manière connectée. Car c’est bien la digitalisation de nos processus qui est la clé de voute de cette décentralisation.

Même si le travail à domicile reste la norme, 75% de nos effectifs sont déjà revenus d’un à plusieurs jours par semaines dans nos bureaux. A un stade où l’épidémie semble reprendre avec les retours de vacances et la rentrée scolaire, nous continuons de favoriser le travail à domicile à raison de deux ou trois jours par semaine. Ce modèle, s’il perdure et se généralise aux grandes entreprises du pays, pourrait avoir un impact significatif sur la mobilité. D’après nos premiers retours, la plupart des employés non-résidents sont même prêts à payer une partie de leurs impôts dans leurs pays de résidence dans la mesure où ils gagnent en temps de trajets, en repas de midi, en carburant, etc. Bien sûr, ce calcul est à faire au cas par cas mais pour bon nombre d’employés ils y seraient sans doute gagnants.

 

Quelles sont les mesures de précautions mise en place?

Afin d’assurer une distance sociale de minimum deux mètres, il a fallu réduire nos 2.900 postes de travail à environ 1.500. Les employés doivent quotidiennement réserver un poste, et ce, afin de faciliter le suivi des éventuelles contaminations. Bien évidemment, du gel désinfectant est disponible partout, les masques obligatoires lors de tout déplacement sont distribués, le nettoyage a été renforcé pour tous les points de contact et chaque poste utilisé est désinfecté en soirée. Il faut dire que nous nous étions équipés du matériel nécessaire relativement tôt, ce qui nous aura permis d’assurer un déconfinement avec un maximum de sécurité dès le mois de mai.

Nous informons régulièrement nos collaborateurs sur l’évolution de la crise et son impact sur notre firme. Une attention toute particulière est désormais portée sur ceux qui n’ont pas encore eu l’occasion de revenir au bureau soit pour raison de santé ou juste par crainte du virus. La plupart de nos métiers ne nécessitent pas de présence physique permanente et permettent à ceux qui craignent pour leur santé et celle de leurs proches de continuer à travailler à plein temps depuis leur domicile.

 

Quelles sont les problématiques liées au télétravail?

Si le travail à domicile est l’une des solutions pour améliorer la mobilité et réduire notre impact écologique, il serait une erreur de sous-estimer le caractère social du travail de bureau. Le confinement n’a pas été une parenthèse heureuse pour tous et nombreux sont ceux qui ont souffert de la distance avec leurs collègues. Sans compter que travailler dans un contexte familial n’est pas toujours évident.

Le tout est donc de trouver un juste milieu et un bon équilibre entre le travail à domicile et celui en équipe. L’un des enjeux de cette rentrée sera par exemple l’intégration de nos New Joiners. Nous souhaitons proposer le meilleur encadrement à ces 200 jeunes qui commencent leur vie active au sein de PwC en demandant à leurs collègues expérimentés d’être également présents au bureau. Le sentiment d’appartenance à une firme comme PwC Luxembourg passe aussi au travers des liens tissés entre collègues.

Assurer une bonne communication entre les équipes n’est pas toujours facile à distance, il faut notamment considérer les horaires de travail qui ont considérablement évolués durant cette crise avec certains qui commencent à travailler bien plus tôt et d’autres plus tard. Chacun doit garder une faculté de déconnexion une fois sa journée terminée. Il est donc important d’établir des règles sur la manière dont le travail se réalise au sein des équipes.

 

La rupture avec nos mauvaises habitudes, tant souhaitée au plein cœur du confinement, pourrait donc avoir lieu…

Grâce à la digitalisation, la présence au bureau n’est plus un critère indépassable. La productivité est corolaire d’un autre mode d’évaluation du résultat obtenu mais aussi d’une confiance plus grande entre le manager et ses équipes. C’est aussi une autre manière d’aborder ses clients qui eux aussi font face aux mêmes enjeux.

Notre firme a dû s’adapter rapidement pour faire face au Covid-19, la flexibilité et la réactivité sont devenus des éléments cruciaux pour répondre à l’évolution de la crise. Les solutions déjà en place et celles développées depuis le mois de mars font de notre entreprise une sorte de laboratoire à idées pour les problèmes de mobilité. Nos solutions peuvent également être des sources d’inspiration.

Même si notre stratégie de mobilité se basait déjà sur un éventail très large de solutions, dont le télétravail et les bureaux satellites, il ne faut pas oublier dans ce cadre l’aspect humain, l’importance des relations et du travail en équipe. Il faut donc trouver un juste équilibre en ces différents modes de travail pour répondre aux enjeux de nos métiers mais aussi au bénéfice des employés qui restent la principale valeur de notre firme.

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