Au Luxembourg, près d’un employé sur deux a un niveau de compétences qui ne correspond pas à son poste !

A l’heure de la crise du COVID-19 et de la hausse du chômage, détenir les bonnes compétences pour le poste occupé est primordial afin de garantir son maintien dans l’emploi. Cependant, en raison de rapides mutations (globalisation, introduction de nouvelles technologies, etc.) et de frictions sur le marché du travail, de nombreux travailleurs occupent des emplois pour lesquels leurs compétences ne coïncident pas aux besoins de leur poste. Dr Laetitia Hauret et David Marguerit, tous deux chercheurs au Luxembourg Institute of Socio-Economic Research (LISER), ont rédigé un rapport sur ce sujet sensible qu’est l’inadéquation des compétences sur le marché du travail au Luxembourg et dans les pays limitrophes. 1

En effet, l’inadéquation des compétences sur le marché du travail peut avoir d’importants effets sur les travailleurs et la société. Par exemple, les travailleurs n’ayant pas les compétences adaptées à leur poste s’impliquent moins dans leur travail. À l’échelle de la société, cela réduit la capacité de production d’une économie.

Au Luxembourg, en 2015, 46% des employés résidents ont des compétences en inadéquation avec leur poste (52% en 2005), soit un niveau comparable avec la France et l’Allemagne (45%), mais plus qu’en Belgique (40%). L’inadéquation des compétences est principalement le fait des employés sur-compétents ; ceux qui pourraient remplir des tâches plus complexes. Toutefois, cette catégorie s’est réduite depuis 2005, alors que la part des employés sous-compétents est en expansion.
Le fait d’avoir des compétences en inadéquation avec les besoins du poste pèse sur le bien-être des employés et peut affecter leur rémunération. Au Luxembourg, les employés dont les compétences sont en inadéquation avec leur poste se déclarent moins satisfaits de leur emploi que ceux dotés des bonnes compétences. En revanche, il ne semble pas y avoir de lien entre niveau de salaire et sentiment d’inadéquation des compétences au Luxembourg, contrairement à la Belgique et à la France où le fait d’être sous-compétent est lié négativement au niveau de salaire horaire.
Face à ces mutations sur le marché du travail, les travailleurs doivent donc faire évoluer leurs compétences pour qu’elles soient en adéquation avec les besoins du marché du travail.
Des mesures ont déjà été mises en place pour réduire l’inadéquation des compétences (congé individuel de formation, Digital skills bridge, Fit 4 Digital Future 2.0, Fit4Commerce, Fit 4 Financial Markets, etc.). Cependant, le Luxembourg aurait intérêt de renforcer ses politiques publiques dans ce domaine, car il est probable que le nombre de personnes dotées de compétences inférieures aux exigences de leur poste de travail continue à augmenter dans les années à venir.
Dans ce contexte, il est important d’identifier les compétences recherchées par les employeurs afin d’orienter au mieux l’offre de formations initiales et continues et de guider les individus dans leurs choix de formation. Le LISER a développé un programme de recherche qui poursuit cet objectif. Ce programme se fonde sur une base de données, riche et inédite, qui recense des milliers d’annonces d’offre d’emploi parues en ligne sur plus de 270 portails internet (Monster, Addeco, Jobs.lu, …) au Luxembourg mais aussi dans les pays voisins. Des analyses menées sur les compétences figurant dans ces annonces ont permis de souligner un besoin important en soft skills exprimé par les entreprises luxembourgeoises.

 

Laetitia HAURET
David MARGUERIT

 


1 Les auteurs tiennent à remercier Blandine Lejealle, Pauline Bourgeon, Ludivine Martin, Patrick Thill et Julien Licheron pour leurs commentaires.

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