Architectour.lu: ascenseur du Pfaffenthal

Cet ascenseur public relie le quartier Pfaffenthal et la ville haute. Le projet encourage la mobilité douce et désenclave ce quartier de la vallée de l’Alzette par un moyen de transport gratuit et rapide. Projetée dans le vide, la cabine se trouve entièrement hors gaine et est vitrée du sol au plafond sur la moitié de sa surface. Elle offre aux usagers un trajet à travers les paysages d’une carrière pour aboutir après 30 secondes sur un magnifique panorama de la vallée et du plateau du Kirchberg. Nico Steinmetz, architecte et associé gérant du bureau STEINMETZDEMEYER Architectes Urbanistes sàrl, a conduit le projet de concert avec InCa Ingénieurs Conseils Associés sàrl et Jean Schmit Engineering sàrl. Il répond à nos questions sur sa conception.

 

Comment avez-vous pensé la conception architecturale de cette réalisation?

Les critères déterminants furent les utilisateurs et le paysage. Pour que cet ascenseur devienne un succès nous devions très bien analyser la situation géographique du lieu et quels utilisateurs nous pouvions viser sur ce site.

Dans le cadre d’une volonté de la Ville de réduire le trafic individuel motorisé, le premier public-cible était, au-delà des habitants du Pfaffenthal, les potentiels cyclistes des localités situées dans la vallée de l’Alzette.

Ensuite c’était le site dans toute sa splendeur, le quartier historique de Pfaffenthal, plongé dans la vallée linéaire de l’Alzette, avec ses beaux versants boisés et le quartier du Kirchberg qui sort de terre au fil des années, l’emblématique Pont Rouge des années 60, et les vestiges des fortifications du Bock, origine de la Ville de Luxembourg.

Le parc Pescatore, peu visité jusque-là, pouvait devenir un point d’accès à ce panorama spectaculaire, à condition de ne pas enfouir mais de mettre en évidence ces nouvelles installations de transport public, d’être vues et de voir…

Enfin, le second public-cible était composé de promeneurs locaux, visiteurs de la capitale et touristes qui pouvaient à partir de ce point traverser les faubourgs historiques, jusqu’au Grund.

 

Quels sont les aspects de sa conception qui en font un élément incontournable du paysage architectural luxembourgeois?

Suite à l’accueil très positif de ces visions avec la Ville, les éléments se sont enchaînés logiquement. Nous avons alors prévu un ascenseur à deux portes pour garantir un parcours positif aux cyclistes; une passerelle désaxée de la tour d’ascenseur pour favoriser l’observation du paysage; les vues à droite et à gauche filtrées par une maille en acier inoxydable, pour laisser deviner le paysage sans le dévoiler de suite; un porte-à-faux de plus de 9 mètres dans le vide, au-dessus du quartier historique; la suppression successive des garde-corps, de la maille métallique, puis du plancher, pour laisser chacun se mesurer au vide; trois parois et un plancher vitrés qui projettent les visiteurs dans un paysage spectaculaire.

C’est l’intensité des émotions vécues à travers ce parcours très séquencé qui font que les visiteurs ainsi que les cyclistes, joggers et piétons quotidiens, apprécient autant cette immersion dans le paysage.

Son succès tient également dans son insertion certes très visible, mais respectueuse de ce lieu historique. Creusée dans la roche, en retrait par rapport au quartier de Pfaffenthal, la tour devait avoir une empreinte au sol plus petite que la plus petite habitation du quartier. C’est cette finesse et cet élancement qui en font un nouvel emblème du quartier, ainsi réintégré au cœur de la cité avec une nouvelle identité.

 

Quels ont été les défis à relever dans le cadre de ce projet?

Il s’agit d’un ouvrage développé avec l’appui de nombreux acteurs sur le terrain, depuis les organes de réglementation et de sécurité, aux entrepreneurs et fabricants. Certaines prescriptions ont pu être complétées par des dispositifs alternatifs, comme la nacelle qui a remplacé l’escalier de secours.

Les installations techniques très sophistiquées d’un ascenseur de 5 tonnes sur une course de 60 mètres ont pu être réduites visuellement au plus strict nécessaire. Le contrepoids et ses câbles se trouvent déportés et cachés dans la tour en béton. Tous les raccordements filaires ont été supprimés, l’électricité de la cabine est livrée par induction à travers un petit rail le long des guides, le téléphone de secours fonctionne par réseau wifi. Ces innovations technologiques ont permis de n’avoir que la cabine, ses rails et ses câbles de traction à l’extérieur.

La finalité était de mettre en scène la multitude des utilisateurs dans leurs parcours verticaux, horizontaux et dans la pointe panoramique. La technologie est mise au service de l’homme qui se retrouve au centre de l’ouvrage.

 

Article réalisé en partenariat avec l’OAI et s’inscrivant dans une série destinée à présenter les quatorze projets highlight du Guide d’architecture contemporaine du Luxembourg, Architectour.lu.

 

Photo: Ascenseur du Pfaffenthal, STDM STEINMETZDEMEYER architectes urbanistes © Bohumil Kostohryz

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