Le commodo rendu commode

Au 1er juillet dernier, l’Administration de l’environnement a modifié la nomenclature et la classification des établissements classés. Impactant directement le travail des bureaux d’études dans leurs démarches, ces changements sont toutefois synonymes de simplifications administratives. Julie Brassoud, responsable commodo et certifications chez BEST ingénieurs-conseils, nous parle des conséquences de ces modifications et de l’arrivée prochaine de l’e-commodo.

 

Pourquoi la nomenclature des établissements classés a-t-elle été modifiée?

Ces changements sont intervenus pour corriger les incohérences qu’il pouvait y avoir dans l’ancienne version de la nomenclature. Prenons l’exemple des parkings; jusqu’à un certain nombre d’emplacements, les dossiers devaient être adressés à l’Administration de l’environnement, au-delà et jusqu’à un autre seuil ils étaient envoyés à l’Inspection du Travail et des Mines (ITM). Si les places étaient encore plus nombreuses, les dossiers étaient envoyés aux deux administrations! Ces démarches illogiques ont donc été harmonisées et résolues et d’autres seuils régissant les demandes d’autorisation ont été revus, en fonction de l’évolution générale des projets. De plus, les communes ne souhaitant plus gérer certains dossiers, des changements de classes ont été effectués pour leur retirer cette compétence.

A chaque modification de la nomenclature, des erreurs se glissent. Au fur et à mesure, l’ITM et l’Administration de l’environnement travaillent de concert pour harmoniser les démarches et les rendre plus cohérentes.

 

Parmi ces changements, lesquels impactent votre activité?

Le changement de nomenclature qui nous impacte le plus est celui relatif aux chantiers. En effet, jusqu’à aujourd’hui, ces derniers étaient dits «classés» en fonction de la profondeur du terrassement et de la distance par rapport à la voie publique. Depuis le 1er juillet, ils sont classés en fonction du volume du terrassement et de la distance par rapport à un voisinage occupé. Cette mesure est bien plus logique car elle exige l’introduction d’un dossier en fonction des désagréments acoustiques pouvant être causés au voisinage.

Au 1er juillet, certains de nos chantiers en cours étaient affectés par ces changements. Lors des modifications de nomenclature, nous bénéficions toutefois d’une phase transitoire au cours de laquelle les autorisations que nous avions reçues avant la date butoir étaient considérées comme valables. Ces changements demandent toutefois un certain temps d’adaptation; nous devons par exemple expliquer à nos clients les modifications des compétences, l’adaptation des seuils, quels sont les nouveaux cas qui nécessitent une autorisation,…

En tant que bureau de génie civil, nous avons l’avantage d’intervenir très tôt dans un projet. Nous travaillons même à la préparation des chantiers et identifions ainsi très vite les besoins en termes de démarches administratives comme l’étude d’impact environnemental, les démarches pour les établissements classés, la conservation de la nature, la gestion de l’eau… Grâce à nos différents services, nous identifions ainsi les autorisations nécessaires aux clients, en dehors du classique permis de construire.

 

Quels sont les autres changements qui vous touchent?

La nécessité de faire un dossier sur la gestion de l’eau a par exemple été revue. Chez BEST ingénieurs-conseils, notre service interne «assainissement des eaux» prend contact avec l’Administration de la gestion de l’eau pour définir si oui ou non un dossier à ce niveau doit être introduit. La nomenclature a reprécisé quels étaient les points qui nécessitaient obligatoirement un tel dossier; toutefois, d’autres cas nécessitent tout de même des démarches administratives et c’est là que notre service peut intervenir pour clarifier la situation.

Comme souvent, les réglementations ne sont pas exhaustives et certains éléments sont sujets à interprétation. Nos différents services se chargent de clarifier chaque démarche appartenant à leur domaine de compétence; je rassemble ensuite toutes ces informations en un seul dossier. Finalement, notre rôle dans l’accompagnement d’un projet commodo est d’identifier les démarches légales par lesquelles nos clients doivent passer.

De nombreux autres points de nomenclature ont changé, avec l’apparition de nouveaux seuils en particulier dans l’élevage, ou le changement d’autorité compétente pour les débits de boisson. Par ailleurs, les forages géothermiques ne sont plus soumis à commodo.

 

Où en sont les démarches concernant la mise en place d’un commodo digitalisé?

Aujourd’hui, et bien que la plateforme soit déjà disponible, il est obligatoire d’envoyer les dossiers par courrier. Nous nous sommes toutefois familiarisés avec l’e-commodo et l’utilisons déjà, mais ne pouvons pas encore aller au bout du processus par voie digitale.

Le système est actuellement en cours d’amélioration et je coopère personnellement avec l’administration en leur remontant les problèmes et incohérences rencontrés. Le formulaire en ligne est au point, le commodo électronique également, mais la loi ne permet pas encore un envoi digital. Nous sommes donc prêts et espérons que cette transition aura prochainement lieu.

L’avantage de la plateforme est que nous savons directement et exactement quelles sont les demandes de l’administration en matière d’autorisations. Nous pouvons donc mieux cibler et anticiper ses attentes et perdons moins de temps à réunir des éléments facultatifs. En effet, pour chaque point de la nomenclature à intégrer à la demande, l’e-commodo indique quelles informations sont nécessaires à quelle juridiction (Administration de l’environnement ou ITM) et quelles sont les pièces à joindre. Notre travail est donc plus structuré!

 

Vous accompagnez également les projets certifiés BREEAM. En quoi cela consiste-t-il?

Cela implique que nous pouvons épauler les clients souhaitant obtenir une certification environnementale pour la création de bâtiments de bureaux ou de commerces. En intervenant très tôt dans un projet, nous pouvons anticiper et conseiller les clients à ce niveau, afin de leur donner de meilleures chances de réussite quant à l’obtention de cette certification. Cette démarche n’est pas obligatoire, elle vise simplement à valoriser et formaliser des efforts réalisés en matière d’environnement.

L’avantage de la certification est qu’elle évalue la durabilité d’une construction selon différents critères précis. La démarche a ses limites car comme tout référentiel, un client peut décider de n’agir que sur certains points. Pour obtenir la certification, il faut toutefois agir sur tous les facteurs, à savoir le management, la santé et le bien-être, l’énergie, le transport, l’eau, les matériaux, les déchets, l’utilisation des sols et l’écologie ainsi que la pollution. Les critères comprennent eux-mêmes des sous-catégories si bien que des éléments comme l’accessibilité en transports en commun d’un bâtiment et son intégration dans l’environnement sont aussi passés en revue. Le bien-être de l’occupant sera également pris en compte et nous nous assurerons donc que les espaces de travail sont agréables, que la qualité de l’air est bonne, qu’il y a un grand apport de lumière naturelle, que la vue est plaisante,… Aujourd’hui, la plupart des bâtiments que nous construisons au Luxembourg sont certifiés.

Nous pouvons également intégrer les principes d’économie circulaire dès la conception du projet. L’application du principe «cradle to cradle» est encore en cours de développement et est donc en phase d’expérimentation dans nos projets. Cela entre toutefois déjà dans l’esprit de nos conceptions, avec la planification de constructions modulaires ainsi que l’utilisation de l’outil BIM. Ce dernier nous aide à identifier, quantifier et situer les matériaux, ce qui sera utile lors de sa déconstruction.

Dans ce cadre, je travaille en étroite collaboration avec notre service de Project Management pour suivre l’évolution du projet en veillant à la fois à l’aspect législatif (obtention des autorisations et du permis de construire) et à la qualité environnementale du bâtiment. Nous pouvons ainsi guider nos clients à travers une démarche BREEAM ou d’économie circulaire.

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