L’Europe ne veut plus d’accidents et de blessures

Sommes-nous en sécurité face aux risques d’accidents et de blessures en Europe ? Les 3 et 4 octobre derniers, 180 scientifiques, responsables politiques et autres parties prenantes de toute l’Europe et au-delà ont participé à la conférence « EU-Safety 2019 » organisée par le Luxembourg Institute of Health (LIH) et Eurosafe au Luxembourg pour tenter de répondre à cette question et prendre des mesures pour combler les lacunes de nos systèmes en matière de prévention des accidents et de sûreté. Protection du consommateur, sécurité routière, prévention des accidents, notamment chez les enfants ou les personnes âgées, au domicile ou durant les loisirs: des thèmes abordés bien distincts mais qui nécessitent un plan d’action aux bases communes.

« Cinq millions de personnes meurent chaque année des suites de blessures et énormément d’autres survivent mais doivent parfois subir de lourdes opérations et/ou traverser une longue période de rééducation ce qui engendre des frais médicaux importants. Nous savons où et comment agir, mais nous devons intensifier nos efforts pour y parvenir plus rapidement » explique Etienne Krug, Directeur du Département de la Gestion des Maladies Non Transmissibles, du Handicap, de la Violence et de la Prévention des blessures à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS).

 

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Qu’il s’agisse d’experts en sécurité routière, en protection du consommateur, d’ acteurs impliqués dans la prévention des accidents des enfants ou des chutes chez les personnes âgées, tous s’accordent à dire que la prévention des accidents et des blessures ne peut être efficace que si l’on en connait leurs causes et circonstances exactes. D’où l’importance cruciale de pouvoir collecter et combiner en amont des données en provenance de plusieurs sources.

« Une collecte de données et une surveillance adaptée sont essentielles pour comprendre les risques et élaborer des stratégies de prévention. La mise en place d’indicateurs communs et le partage d’expériences sur les stratégies et actions de prévention des accidents pourraient contribuer à renforcer la sécurité dans notre vie de tous les jours » souligne Dritan Bejko, épidémiologiste au LIH et organisateur principal de la conférence.

« Au LIH, nous sommes fiers de contribuer quotidiennement à un système de surveillance des blessures extrêmement efficace au Luxembourg, le REcueil d’informations sur les TRaumatismes et ACcidEnts (RETRACE)*, et de faire partie du réseau Européen » ajoute le Professeur Laetitia Huiart, directrice du « Department of Population Health » du LIH.

 

Documenter les « success stories » pour les reproduire

Selon Etienne Krug « nous devons dès à présent mettre en application des programmes de prévention des accidents et des blessures, les évaluer et surtout documenter nos succès, car il y en a, mais nous n’en parlons pas ! »

En effet, il est important de savoir quels programmes de prévention nationaux existent déjà et d’identifier ceux qui ont prouvé leur efficacité afin de les reproduire dans d’autres pays européens.

Il est toutefois très important de s’adapter aux réalités locales, de « comprendre la culture de la population en question afin d’établir des stratégies visant à changer les comportements », précise Nicholas J. Ward, Professeur à la Montana State University, Etats-Unis, lors de la conférence.

 

Sensibiliser les responsables politiques et favoriser une coopération intersectorielle

Lorsque l’on parle de santé publique, les maladies liées au mode de vie et leur prévention suscitent un vif intérêt. Les programmes visant à encourager une vie saine à travers l’activité physique ou une alimentation équilibrée attirent l’attention du public et des responsables politiques. De plus en plus de fonds publics sont alloués à la promotion de la santé au détriment de la prévention des traumatismes. Ces derniers demeurent toutefois encore une cause majeure de décès et représentent un lourd fardeau pour les services de santé nationaux.

« La conférence EU-Safety 2019 visait à sensibiliser les responsables politiques à l’impact des accidents et traumatismes et à intégrer la prévention des blessures de manière cohérente dans les programmes d’action nationaux et européens » explique Wim Rogmans, fondateur d’Eurosafe.

La conférence a notamment été marquée par la présence du Dr Jean-Claude Schmit, Directeur de la Santé pour le Luxembourg, de John F. Ryan, Directeur Santé et Sécurité Alimentaire de la Commission Européenne, d’Etienne Krug, Directeur du Département de la Gestion des Maladies Non Transmissibles, du Handicap, de la Violence et de la Prévention des blessures à l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), et le message de Violeta Bulc, Commissaire Européen aux Transports.

Cette conférence a également témoigné d’une nécessité de rassembler de manière régulière tous les acteurs de la sécurité et de la prévention des accidents au sens large. « Les acteurs des différentes thématiques se réunissent régulièrement, mais entre eux. Ici, ils ont l’occasion de rencontrer les acteurs d’autres domaines et d’échanger leurs méthodes, d’évaluer l’implémentation de leurs mesures de prévention et de discuter de questions d’intérêt mutuel telles que l’épidémiologie. C’est cette complémentarité qui rend cette conférence unique et stimulante », conclut Wim Rogmans.

 

Vers de nouveaux risques

Si cette conférence a donné un nouvel élan à la prévention des traumatismes en ciblant des risques bien connus en Europe, elle a également engagé la discussion quant aux risques émergents inhérents au progrès technologique et à l’évolution de nos modes de vie. Citons comme exemple les jouets de demain « Demain il ne sera pas impossible de télécharger un logiciel permettant d’imprimer le jouet de son enfant en 3D directement chez soi ; mais comment garantir alors la sûreté du produit ? » soulève Graham Russell, CEO du « Government Office for Product Safety and Strandards » au Royaume-Uni.  Des questions se posent aussi quant aux risques liés aux nouveaux moyens de transports comme la trottinette électrique ou encore aux nouveaux métiers de la « gig economy ».

 

Partenaires et financement

« EU-Safety 2019 » a été organisé par Eurosafe, l’Association européenne de prévention des accidents et de promotion de la sécurité́, en collaboration avec le LIH, et avec le support du Fonds National de la Recherche Luxembourg (FNR), du Ministère de la Santé, de l’OMS et de la Commission Européenne.

Mis en place au Luxembourg en 2012 dans les services d’urgences hospitaliers *RETRACE est le fruit d’une étroite collaboration entre le Ministère de la Santé, les partenaires hospitaliers et le Luxembourg Institute of Health. Il a été établi selon les principes méthodologiques définis par le programme européen Injury Data Base (IDB).

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