Le Multi-Cloud est-il l’avenir du Data Centre?

Au-delà d’un effet de mode, le Multi-Cloud représente l’évolution naturelle pour les applications hébergées en Data Centre. Il y a aujourd’hui un réel intérêt pour ce nouveau type d’architecture qui apporte de nombreux avantages par rapport à un mode de fonctionnement traditionnel. Entretien avec Olivier Steinwehe, Team Leader pour les environnements cloud chez Fujitsu Luxembourg.

 

Pourriez-vous nous expliquer très simplement ce qu’est le Multi-Cloud?

Avant d’aborder le concept de Multi-Cloud, il important de rappeler brièvement la définition du cloud. Un cloud est un ensemble de ressources pouvant être consommées à la demande, en libre-service. Cette notion de libre-service implique que l’allocation des ressources soit automatisée.

Pour ce qui est du Multi-Cloud, il s’agit d’utiliser différents types de cloud, que ce soit du cloud privé (à l’usage exclusif d’une seule entreprise) ou public (partagé par plusieurs entreprises), mais aussi différents fournisseurs de cloud public.

 

Quels sont actuellement les acteurs majeurs du marché Multi-Cloud?

Aujourd’hui, le marché du Multi-Cloud est composé de plusieurs types d’acteurs. D’une part, il y a bien entendu ceux proposant des solutions de cloud privé souvent basées sur des technologies d’hyper-convergence, mais également les fournisseurs de cloud public.

D’autre part, il y a aussi une émergence de solutions permettant de gérer des environnements Multi-Cloud. Ces solutions ont pour but de standardiser la gestion du Multi-Cloud en apportant une couche d’abstraction permettant de s’affranchir des solutions propres à chaque fournisseur. Elles doivent par ailleurs apporter une visibilité sur les coûts et la consommation des ressources, mais également permettre de comparer les différentes offres du marché et de migrer des ressources d’un cloud vers un autre.

 

Quels sont les avantages d’une architecture Multi-Cloud?

Le principal avantage du Multi-Cloud est sans aucun doute la flexibilité de choisir la solution ou le fournisseur le plus approprié à chaque besoin. Quel que soit le but recherché (le prix, la performance ou la facilité d’utilisation et de gestion), le Multi-Cloud permet de faire un choix à un instant donné, mais donne surtout l’opportunité de le réévaluer et de l’adapter dans le futur.

D’un côté, le cloud privé permet d’adapter la solution aux besoins spécifiques de l’entreprise et de garantir les performances. Il peut également être perçu comme plus sécurisé puisque réservé à l’usage exclusif d’une seule entreprise.

D’un autre côté, le cloud public met à la disposition de tout un chacun des technologies innovantes telles que les conteneurs Docker ou l’orchestration Kubernetes. Ce type de technologies peut parfois être complexe à mettre en œuvre et freiner leur adoption.

Le Multi-Cloud permet aussi de mitiger le risque lié à une panne majeure d’un fournisseur de cloud public ou d’une solution cloud privée. Grâce au Multi-Cloud, on peut effectivement envisager des architectures en mode actif-passif, voire actif-actif sur des environnements cloud de différents fournisseurs.

Finalement, le Multi-Cloud offre la possibilité aux clients de mettre en concurrence les différents fournisseurs de cloud. Comme les stratégies Multi-Vendor par le passé, le Multi-Cloud permet de bénéficier des meilleurs tarifs et des meilleurs services.

 

Quels sont les défis posés par un environnement Multi-Cloud?

Si le Multi-Cloud permet de bénéficier du meilleur des deux mondes entre cloud public et privé, il implique néanmoins une complexité accrue. Il nécessite entre autres de devoir gérer des solutions différentes, bien souvent via des consoles distinctes.

De ce fait, les solutions «Cloud Management Platform» permettent de s’affranchir des interfaces de gestion propres à chaque solution. Elles fournissent ainsi des fonctionnalités telles que le provisionnement des ressources via un portail de libre-service, l’inventaire et la classification des ressources par entité (ex. organisation, département…), la surveillance de la bonne santé et de l’utilisation des ressources ou encore la migration de ressources d’un cloud vers un autre.

L’un des défis majeurs du Multi-Cloud réside sans aucun doute dans la validation de la conformité vis-à-vis de la politique de sécurité de l’entreprise et le respect des réglementations nationales (ex. CSSF) ou internationales (ex. RGPD). Il est très important de ne pas négliger ces aspects sécuritaires et réglementaires; au risque de s’exposer tant à des vulnérabilités qu’à des irrégularités préjudiciables.

Un autre aspect à prendre en compte est la coopération entre les équipes responsables du développement des applications et celles responsables de l’opération des plateformes. Bien souvent, les objectifs des uns ne sont pas ceux des autres. Là où les uns favorisent l’agilité, les autres donnent la priorité à la stabilité.

Si le mouvement DevOps a pour objectif de réconcilier ces deux opposés, il est encore très peu mis en pratique dans la réalité. Même si le Multi-Cloud n’est pas une réponse directe, la majorité des solutions cloud – privé ou public – fournissent des solutions de «Blueprinting» permettant de mettre à disposition des équipes de développement des environnements applicatifs validés et prêts à l’emploi.

Ce type de logiciels – comme UShareSoft de Fujitsu – peuvent aussi être utilisés pour migrer des applications hébergées en Data Centre vers un cloud privé ou public ou d’un fournisseur de cloud public vers un autre.

 

Quelle est la stratégie de Fujitsu en matière de Multi-Cloud?

Fujitsu a pour ambition de devenir le leader du marché de l’intégration Multi-Cloud dans le monde.

D’un point de vue pratique on entend souvent que le cloud public est plus attractif financièrement qu’une solution hébergée dans un Data Centre. Ce n’est malheureusement pas toujours le cas, mais cela varie en fonction de l’utilisation qui en est faite.

Afin de bénéficier au maximum du mode de facturation à la consommation du cloud public, il est nécessaire de moderniser les applications afin de tirer le meilleur parti des ressources et des technologies offertes par les fournisseurs de cloud public.

Dans ce contexte, Fujitsu est idéalement positionné. En effet, Fujitsu est un des rares acteurs du marché – si pas le seul – à posséder des compétences en infrastructure, transformation d’applications et en sécurité. Fujitsu peut donc accompagner ses clients de bout en bout.

 

Finalement, quels conseils donneriez-vous à une entreprise qui souhaiterait se lancer dans le cloud?

Cela peut paraitre trivial, mais il est important de ne pas voir trop grand d’emblée. Il est conseillé de démarrer avec un environnement restreint (une seule application) sous forme de pilote pour éprouver le concept. Ensuite, procéder de manière itérative (méthode agile) pour monter en puissance de façon progressive et contrôlée.

Cependant, il ne faut pas non plus se lancer dans une migration de grande ampleur sans prendre de recul afin d’analyser les différentes options offertes et prévoir des fondations solides et évolutives.

C’est pourquoi Fujitsu a développé une méthode basée sur les quatre phases suivantes: Inspiration, Co-Creation, Modernisation et Optimisation.

L’Inspiration a pour objectif d’appréhender les concepts relatifs au cloud et de les rendre familiers. Elle permet également de tester les technologies cloud via les environnements «Sandbox» de Fujitsu.

La Co-Creation a pour but d’analyser l’environnement actuel (infrastructure et applications) afin de connaitre les interactions entre les différents composants. Sur base de ces informations, une liste d’applications candidates est déterminée et en dérive une architecture et un plan de migration.

La Modernisation représente la mise en exécution du plan de migration vers une solution Multi-Cloud. C’est lors de cette phase que l’architecture est déployée et configurée avant d’être testée et validée. Finalement, les applications sont «migrées» vers la ou les solutions retenues.

L’Optimisation est une itération en continu ayant pour objectif – comme son nom l’indique – d’optimiser en permanence l’utilisation faite des ressources cloud. Cela peut être une optimisation des coûts, de la performance ou de l’automatisation. Le but étant de s’approcher le plus possible d’un vrai modèle de consommation à la demande.

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