Le quatuor des 28

Les nominations aux postes les plus importants d’Europe sont toujours extrêmement complexes. S’il y a cinq ans, il aura fallu trois mois pour trouver un accord, contre trois jours cette fois-ci, la tâche n’en était pas moins ardue.

Notamment parce que la nouvelle configuration du Parlement rend le jeu des coalitions plus compliqué. Il ne s’agit plus uniquement de composer avec les Conservateurs et des Socio-démocrates mais également avec les Libéraux et les Verts. Les chaises musicales sont d’autant plus alambiquées qu’un accord entre Paris et Berlin ne suffit plus à emporter la décision et qu’il faut dorénavant faire avec les eurosceptiques.

Si pour l’heure, les nominations du quatuor doivent encore passer par le vote du Parlement, on peut déjà se réjouir d’avoir évité la solution de facilité qui aurait été le choix par défaut d’entente. Les quatre personnalités annoncées ont en effet le poids de l’expérience.

Le poste le plus convoité, celui de président de la Commission, devrait revenir à l’actuelle ministre allemande de la Défense, Ursula von der Leyen. Souvent considérée comme une prétendante sérieuse à la succession d’Angela Merkel et en charge des portefeuilles de la Famille (2005-2009), du Travail (2009-2013) et de la Défense (depuis 2013), elle aura passé quatorze années au gouvernement. Membre de l’Union Chrétienne-Démocrate (CDU), elle s’est souvent retrouvée en porte-à-faux avec sa famille politique de centre-droit qui la considère parfois comme trop à gauche.

La Dame de Fer du FMI, Christine Lagarde est pressentie au poste clé de présidente de la Banque centrale européenne. L’ancienne ministre de l’Economie (2007-2011) de l’ère Sarkozy a pour elle l’expérience de la gestion de la crise financière et de ses répercussions à la direction du Fonds Monétaire International (depuis 2011).

La présidence du Conseil reviendrait à Charles Michel, l’ancien Premier ministre Belge MR, habitué du consensus politique. Les socialistes européens qui auraient voulu peser à la tête de la Commission devraient se consoler avec la Diplomatie européenne attribuée à l’espagnol Josep Borrell.

La presse souligne qu’il s’agit là d’un parfait équilibre des genres puisque deux femmes et deux hommes… certes. Ou encore que le choix d’une Allemande et d’une Française n’est pas dû au hasard… probablement. Que trois libéraux contre un socialiste cantonné à la diplomatie, c’est continuer avec l’Europe libérale… de fait. Que ce quatuor francophone place la langue française au centre des débats… la belle blague lorsqu’on sait la prédominance de l’anglais dans cette Europe abandonnée par les Anglais eux-mêmes.

Mais peut-être faudrait-il aussi y voir un choix politique de raison courageuse dans la mesure où il fait place à l’expérience et ne laisse rien passer à l’euroscepticisme.

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