Mise à jour européenne

Suite à l’échec des négociations du Brexit, au repli nationaliste à l’œuvre dans plusieurs pays européens et aux crises sociales et environnementales qui ont bouleversé le continent, les élections européennes constituaient un enjeu majeur pour garantir la cohésion et la force de l’Union.

A l’issue d’un scrutin au taux de participation qui n’avait plus été aussi élevé (51%) depuis les élections de 1994, le paysage politique européen fait meilleure figure. Si les sondages et autres intentions de votes promettaient des scénarii apocalyptiques, force est de constater que l’Europe n’a pas tant cédé aux tentations eurosceptiques qui s’esquissaient en son sein.

Le pire a en effet été évité: la vague populiste redoutée n’a finalement pas submergé l’Europe. Bien que le niveau de l’extrême droite ait sensiblement progressé dans la majorité des pays européens, seuls quelques-uns comme la Hongrie, la Pologne, l’Italie, la Belgique, la France et le Royaume-Uni les ont vu entrer en majorité. Ces groupements (Europe des Nations et des Libertés (ENL), Conservateurs et Réformistes européens (ECR), Europe de la liberté et de la démocratie directe (EFDD)) n’affichent finalement «que» 172 sièges à eux trois. Les divergences dans leurs programmes semblent laisser peu de chance à une coalition, mais ils disposeront tout de même d’un pouvoir certain de blocage qu’ils auront le loisir de mobiliser pour affaiblir l’Union.

Chamboulée dans sa majorité absolue, quarantenaire et confortable, l’alliance historique des démocrates-chrétiens (PPE) et des socialistes-démocrates (S&D) a enregistré un grand recul au profit des démocrates et des libéraux (ALDE), des Verts et des extrêmes. Ces derniers ont su renouveler leurs discours respectifs pour atteindre un public las des partis traditionnels peinant à aligner leurs programmes aux attentes nouvelles des sociétés modernes.

Passant de 67 à 105 sièges au Parlement européen, l’Alliance des Libéraux et des Démocrates pour l’Europe a effectivement réalisé la plus belle progression des élections. Elle devient ainsi le troisième groupement d’Europe et espère jouer les arbitres entre les deux pôles qui avaient jusqu’ici traditionnellement composé la majorité. Les Verts affichent quant à eux une évolution marquée en Europe de l’Ouest; bien qu’ils n’arrivent premiers dans aucun pays, ils se placent toutefois à la quatrième position au niveau européen avec 69 sièges.

Les conservateurs du PPE ont aujourd’hui la main pour former une coalition majoritaire, qu’ils devront composer avec au minimum deux autres partis. En tant que tête de liste, l’Allemand Manfred Weber postule au poste de président de la Commission européenne et estime être favori selon le principe du «Spitzenkandidat», voulant que la présidence de la Commission soit attribuée à un membre de la formation rassemblant le plus de voix. Or le PPE, bien qu’arrivant en tête du scrutin, enregistre tout de même un recul de 37 sièges et semble donc souffrir du désaveu de ses électeurs… Cette nomination n’est toutefois pas automatique puisque les membres du Conseil européen – soit les chefs d’Etats – doivent sélectionner les candidats à la présidence de la Commission. Ainsi, Frans Timmermans, membre néerlandais du S&D – passant de 185 à 153 sièges au parlement – et Margrethe Vestager, femme politique danoise de l’ALDE – à peine troisième formation européenne – et soutenue par Xavier Bettel, sont également en lice pour succéder à Jean-Claude Juncker.

Lors du sommet des 20 et 21 juin prochains, le Conseil européen devra finaliser le choix de ses candidats et de la coalition qui accèdera au pouvoir avant de soumettre cette sélection aux votes des eurodéputés fraîchement élus. Les prochaines semaines s’annoncent donc décisives pour les négociations qui dessineront l’Europe de demain.

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