Un secteur-clé de la diversification économique

Cluster for Logistics

Fondé en 2009, le Cluster for Logistics (C4L) a comme objectif de favoriser le développement de la logistique. Considéré par le gouvernement comme décisif dans la diversification économique, ce secteur emploie 20.000 personnes et génère un chiffre d’affaires de 3,8 milliards d’euros par an. Entretien avec Malik Zeniti, manager du C4L depuis 2015.

 

Qu’est-ce que la logistique et pourquoi ce Cluster a-t-il été créé?

La logistique est la science de planifier et d’optimiser le transport de produits par route, rail, voie navigable ou fret aérien. Cela inclut le traitement des marchandises avec des services à valeur ajoutée, comme l’emballage, l’étiquetage et un stockage adéquat. Et cela comprend aussi le transfert de données, domaine qui intéresse beaucoup le Luxembourg.

Le Cluster est une idée de l’ancien ministre de l’Economie, Jeannot Krecké, et de Pierre Gramegna, qui était alors président de la Chambre de Commerce (aujourd’hui ministre des Finances). Le Cluster a été fondé en 2009, en pleine récession, et la logistique a été choisie par le gouvernement comme secteur-clé pour diversifier l’économie.

La mission du C4L est de favoriser le développement du secteur, d’identifier de nouvelles solutions, et d’être l’intermédiaire entre les entreprises et les pouvoirs publics.

 

Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de miser sur ce secteur? 

Le Luxembourg compte, grâce à son histoire industrielle, des entreprises très performantes en logistique. De bonnes infrastructures, un pays fiable, sans trop de conflits sociaux et de grèves, et des ressources humaines multilingues sont des atouts non-négligeables qui profitent à ce secteur.

De plus, la situation géographique centrale du Grand-Duché en Europe le place au centre d’un rayon où se situent les 100 plus grandes entreprises du continent. Le pays est proche des principaux ports européens, comme Anvers et Rotterdam. Et il se trouve sur l’axe nord-sud (Mer du Nord-Méditerranée) et est-ouest (Europe-Asie) du fret routier et rail.

Profiter de ces atouts pour développer le secteur de la logistique était une évidence.

 

Quelles sont les priorités du Cluster?

Le Luxembourg est aujourd’hui le numéro deux mondial en performance logistique

Il y avait deux projets phares. Le premier fut le Hub Sud de Bettembourg, qui a représenté un investissement colossal de 250 millions d’euros. À présent nous recevons 300.000 containers, trois fois plus que précédemment. Notre priorité aujourd’hui est de faire basculer ces containers d’un camion vers un train, car le rail produit moins d’émissions de dioxyde de carbone (CO2) que le fret routier. Au Luxembourg, la route représente encore 84% du transport (58,8 millions de tonnes/an), alors que le rail représente 7%, le maritime 6%, le fluvial 2% et le fret aérien 1%.

Deuxièmement, nous voulions créer des compétences autour de ce secteur. Aujourd’hui, il existe un Diplôme de Technicien en Logistique dans deux lycées. D’autre part, l’Université du Luxembourg et le MIT (Massachusetts Institute for Technology) ont créé conjointement le Centre for Logistics, qui propose un Master dans le domaine. Les quinze premiers étudiants ont présenté leurs mémoires en juin.

Le C4L veut aussi que le secteur soit créateur d’emplois. Il faut adapter les compétences des chômeurs, car nous avons surtout besoin de personnel très compétent, des informaticiens et des ingénieurs. Si 20.000 personnes travaillent actuellement au Luxembourg dans la logistique, 13.000 sont des emplois directs, c’est-à-dire 1 employé sur 20.

  

En moins d’une décennie, quel est le bilan du C4L?

Assez positif, le secteur génère un chiffre d’affaires annuel de 3,8 milliards d’euros et nous sommes désormais sur la carte globale de la logistique. Le Luxembourg est le numéro deux mondial en performance logistique (parmi 160 pays), selon le Logistics Performance Index (LPI) de la Banque Mondiale (chiffres de 2016). Dans toutes les catégories, le Grand-Duché est dans le top 10: nous sommes premiers en transport international, quatrièmes en infrastructures, neuvièmes dans les douanes et dixièmes en compétence logistique.

 

Le Luxembourg a surtout investi dans des niches…

Nous avons créé des services à valeur ajoutée dans lesquels nos concurrents ne sont pas aussi performants. Par exemple, le Freeport qui stocke des objets d’art et de luxe. Le centre pharmaceutique du Findel, un entrepôt à température dirigée, a été le premier en Europe à recevoir le label «Good Distribution Practice». Alors que des aéroports comme Paris et Francfort sont toujours bouchés et où un produit met douze heures à sortir du pays, au Grand-Duché nous pouvons le faire en deux heures. Le Findel a augmenté sa capacité de huit à douze places pour les avions cargo, ce qui lui permettra de rester un aéroport fluide.

 

Le fret est une activité polluante. Comment faire face au défi écologique?

Le gouvernement nous a demandé de favoriser une logistique durable. En 2014, nous avons lancé le programme «Lean & Green» pour encourager les entreprises à diminuer de 20% leur émissions de CO2. Dans ce cadre, il y a des entreprises qui ont fait suivre à leurs chauffeurs des cours d’écoconduite, ce qui permet de dépenser moins de carburant.

CFL Logistique, Arthur Welter et Luxair Cargo viennent de décrocher leur première étoile dans ce programme car elles ont atteint l’objectif des 20%. La quatrième édition du programme débute en septembre et le ministère du Développement durable apporte un soutien financier aux entreprises qui veulent y participer.

 

Quelles activités vont se développer le plus dans ce secteur?

Ce sera surtout le traitement d’informations digitales. Ce n’est pas un hasard si le gouvernement a fait des efforts pour que le centre de données de Google s’installe à Bissen.

Le transport par rail devrait aussi augmenter. Les produits prennent cinq semaines à venir de Chine en train. Grâce à la Nouvelle Route de la Soie, qui reliera la Chine à l’Europe par rail, le temps de transport va être divisé par deux. Le Hub Sud est un investissement décisif pour que le Luxembourg profite aussi de cette nouvelle route du fret ferroviaire.

 

Par José Luís Correia

 

 

Lire sur le même sujet: