Petit par la taille, grand par les vins

Fonds de Solidarité Viticole

Le Grand-Duché est peut-être un petit pays mais il compte de grands vins à la diversité impressionnante. Pourtant, en dépit de leurs indéniables qualités, les vins et crémants de la Moselle luxembourgeoise voient leurs ventes baisser d’année en année. Pour remédier à cet épineux problème, l’Institut Viti-Vinicole a préparé un vaste plan d’actions. Le point avec les présidents Antoine Clasen, Josy Gloden et Ern Schumacher des trois groupements de producteurs (négoce, coopérative et vignerons privés) ainsi qu’avec le directeur de l’Institut Viti-Vinicole, Robert Ley.

«Tout a commencé par une étude entamée il y a deux ans pour le compte du ministère de l’Agriculture», explique Robert Ley. «Le but de cette étude était de comprendre pourquoi la consommation des vins locaux avait tendance à s’éroder depuis plusieurs années. Cette érosion est principalement due au fait que la physionomie du pays a énormément changé en quelques décennies. Le Luxembourg compte à présent près de 50% d’étrangers et la plupart d’entre eux ignorent qu’il existe des vins luxembourgeois. Ils viennent avec leurs habitudes de consommation et boivent généralement ici les mêmes vins que dans leur pays d’origine».

 

Une grande diversité de cépages

«Nous pâtissons également de l’ancienne image des vins luxembourgeois», ajoute Ern Schumacher de l’Organisation Professionnelle des Vignerons Indépendants. «Autrefois, ceux-ci étaient essentiellement constitués de Rivaner et d’Ebling et destinés à la consommation courante. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Depuis une vingtaine d’années, les vins luxembourgeois ont beaucoup gagné en qualité, non seulement par une forte diminution des rendements mais aussi par une grande diversité dans les cépages: du Rivaner à l’Auxerrois en passant par le Pinot blanc, le Pinot gris, le Pinot noir, le Chardonnay, le Riesling et le Gewürztraminer. Ce gain en qualité a un coût qui se répercute sur les prix, ce que les consommateurs ne comprennent pas toujours».

«Nous produisons des vins modernes, pas trop élevés en alcool, frais, fruités, qui se boivent facilement et qui accompagnent parfaitement tous les types de plats. En quelques années, nous avons réussi à créer des vins gastronomiques d’un très bon niveau et nous n’avons pas à rougir de la comparaison avec d’autres régions à la notoriété viticole bien établie. Le problème, c’est que la qualité de nos produits est encore trop méconnue», commente Josy Gloden des Domaines Vinsmoselle.

 

Modifier radicalement la stratégie marketing

«C’est pourquoi il est devenu impératif de modifier radicalement notre stratégie marketing. Nous ne devons plus seulement nous adresser aux Luxembourgeois qui connaissent et apprécient nos produits mais aussi aux consommateurs étrangers qui composent aujourd’hui la moitié de la population», poursuit Antoine Clasen de la Fédération luxembourgeoise des vins et spiritueux.

Nos vins peuvent sans problème soutenir la comparaison avec d’autres régions viticoles au nom plus prestigieux

«Nous avons ainsi créé un comité stratégique composé de différents groupes de travail et dont le but est de mettre en avant les qualités de nos produits. Concrètement, trois chantiers ont été identifiés. Le premier consiste à mettre en place une image commune à tous les vins luxembourgeois et créer un signe de reconnaissance suffisamment fort pour que les consommateurs puissent immédiatement identifier nos produits comme étant des vins luxembourgeois. A l’avenir, toutes les bouteilles de vin luxembourgeois porteront le même logo qui s’inspire du X de la nouvelle signature commune du pays Luxembourg – Let’s Make It Happen. Dans le même ordre d’idées, nous allons inciter les restaurateurs à promouvoir nos produits en leur décernant un label d’ambassadeur des vins luxembourgeois s’ils remplissent certains critères. Nous allons aussi lancer l’initiative appelée «De gudde Patt» (Le bon pot) qui consiste à placer un autocollant sur toutes les vitrines des brasseries et bistrots qui proposent au moins un vin et un crémant luxembourgeois dans leur carte. Nous comptons ensuite créer des événements autour de nos produits au Luxembourg dans un premier temps, puis chez nos voisins géographiques que sont l’Allemagne, la Belgique et la France. Le troisième chantier concerne l’AOP (Appellation d’Origine Protégée) – Moselle luxembourgeoise. Mise en place en 2014, elle regroupe les vins équilibrés d’entrée de gamme avec la mention d’origine Côtes de, les vins classiques de la Moselle luxembourgeoise ou vins de coteaux et les vins de terroir issus des meilleurs vignobles de la Moselle luxembourgeoise. Nous voulons davantage communiquer sur cette classification pas toujours bien comprise par le consommateur et également mettre en évidence par ce biais l’un ou l’autre cépage typique de la Moselle luxembourgeoise».

«A terme, nous voulons faire évoluer les mentalités à propos de nos produits», conclut Robert Ley. « Ici, au Luxembourg, on pense toujours que les vins d’ailleurs sont meilleurs. Nombreux sont les gens qui sont prêts à dépenser une cinquantaine d’euros pour un vin au nom prestigieux même si la qualité ne dépasse pas celle d’une des meilleures bouteilles luxembourgeoises pour un prix deux à trois fois moindre. Nos produits sont non seulement très bons mais souvent moins chers car, à la différence d’autres régions viticoles, les circuits de distribution sont ici très courts. Le rapport qualité-prix de nos vins est exceptionnel et il est plus que temps de le faire savoir au plus grand nombre, à commencer par les résidents de ce pays».

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