Le Parc Naturel de la Haute-Sûre: Gardien de l’eau

Le nord-ouest du Luxembourg est connu pour sa diversité naturelle avec ses vallées profondes, ses pentes raides boisées et ses surfaces agricoles. Mais il est surtout connu pour le lac de barrage et ses rives, importante source d’eau potable du pays et élément intégral de sa géographie, lui conférant à juste titre l’identité de région d’eau du Luxembourg. Sur ce territoire est établi le Parc naturel de la Haute-Sûre, le plus ancien des trois parcs luxembourgeois, qui s’étend sur une superficie de 162 km2 et qui englobe cinq communes. Hébergée dans l’ancienne draperie, l’équipe du Parc vise à concilier la protection naturelle et le développement régional durable. Entretien avec Christine Lutgen, directrice du Parc.

  

«Les origines du Parc naturel sont étroitement liées à son identité de région d’eau. Dès le lancement du projet du mur de barrage en 1955, la volonté de protéger l’eau du lac de barrage par le biais d’un parc a ressurgi périodiquement. L’idée de l’Etat de créer un parc national autour du lac, dont le seul but aurait été la protection de l’eau, s’est concrétisée en 1986 avec le «Plan global» du ministère de l’Aménagement du territoire».

«Cependant, les communes et la population, notamment les agriculteurs, se sont opposés à un tel projet, craignant que les mesures contraignantes en faveur de la protection naturelle sapent le développement économique régional.  Ainsi, les communes ont proposé un contre-projet suggérant la mise en place d’un parc naturel selon le modèle français, conciliant la protection environnementale et le développement», explique Christine Lutgen.

Elle poursuit: «Reposant fortement sur une approche «de bas en haut», le projet du parc naturel a franchi un premier pas décisif avec la fondation du syndicat intercommunal SYCOPAN en 1989. Le syndicat a joué un rôle indispensable dans la promotion de cette vision et a par ailleurs appuyé l’élaboration de la loi sur les parcs naturels créant ainsi le cadre légal nécessaire en 1993. Le 6 avril 1999, le Parc naturel de la Haute-Sûre fut finalement établi, englobant initialement sept communes».

Nous tentons d’intégrer la thématique de l’eau à tous nos projets

 

La protection de l’eau dans toutes ses dimensions

«En dépit de l’omniprésence de l’eau, la communication du rôle global du Parc posait un défi. Lors de notre bilan obligatoire dressé en 2006-2007 en vue du renouvellement du label de Parc naturel, nous nous sommes rendu compte que la grande diversité de nos projets masquait nos priorités. Ainsi, nous avons décidé de mettre en évidence davantage le sujet de l’eau et nous tentons depuis lors d’intégrer cette thématique à tous nos projets, de manière transversale».

«Si l’accent est souvent mis sur le volet écologique du développement durable, nous œuvrons simultanément en faveur du développement économique et touristique de la région. Découlant d’une initiative du LEADER, le premier projet phare du Parc, à savoir la création de produits régionaux portant le label «vum Séi», illustre bien cette approche globale. Ainsi, nous avons appuyé les agriculteurs dans la mise au point de modes de production alternatifs pour générer des revenus, tout en assurant l’exploitation durable du terrain et des ressources. En même temps, ce label de qualité promeut la marque du Parc au-delà des ses frontières. Cette collaboration en matière d’agriculture s’est poursuivie au cours des années. Entres autres, la coopération agricole dite «LAKU», coordonnée par le Parc, a élaboré un catalogue de mesures volontaires afin de protéger l’eau du lac de barrage».

«Le Parc ne peut d’ailleurs pas promulguer des mesures contraignantes qui interdisent certaines activités, ou instituer des zones de protection, actes qui relèvent des compétences des ministères et de l’Administration de la gestion de l’eau. Ainsi, nous adoptons une approche qui repose sur la pédagogie et la sensibilisation. Je peux citer, à titre d’exemple, le bateau solaire, qui permet aux visiteurs de découvrir l’histoire, la vocation et les démarches écologiques du lac de barrage tout en protégeant l’eau et en amplifiant la valeur touristique de la région».

«En outre, nous avons lancé une campagne de sensibilisation sur le problème des déchets sur les plages aux rives de la Sûre. La mise en place d’un mini-centre de recyclage sur la plage d’Insenborn l’année dernière s’inscrit dans une approche positive qui tente de canaliser les efforts du public et d’encourager un comportement respectueux de l’eau».

 

La coopération importe

«La collaboration avec les communes est à la base du bon fonctionnement du Parc. Les communes sont généralement conscientes de leurs obligations en matière de protection naturelle et favorisent de plus en plus des approches régionales. Dans cette optique, elles considèrent le Parc comme premier partenaire, qui agit en tant que coordonnateur et facilitateur et dispose des connaissances nécessaires».

«Cette approche régionale se manifeste notamment dans la mise en œuvre du Pacte climat, qui se fait conjointement avec les communes du Parc naturel de l’Our. Nos évaluations annuelles dessinent l’image d’un progrès continu et ont révélé que parmi les 66% dex mesures implémentées, 16% sont attribuables aux Parcs naturels. Si nos communes sont performantes dans certains domaines comme la communication, elles font aussi face à de lourds défis, surtout en ce qui concerne la mobilité. De ce fait, le Parc s’est joint au projet INTERREG ‘Last Mile’ qui vise à élaborer un concept de mobilité qui répond aux besoins réels des touristes et des habitants».

«L’amélioration de la coopération avec les communes demeure une priorité. En vue d’assurer un bon démarrage de notre collaboration avec les nouveaux conseils communaux issus des élections de 2017, le Parc a réalisé une tournée des communes dans l’objectif de stimuler un échange de vues et de priorités. En automne, on organisera une journée de réflexion pour concrétiser les résultats de ces échanges et renforcer la coopération. Quant au Parc, j’estime que la continuité et la stabilité structurelle sont importantes pour gagner et conserver la confiance des gens».

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